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  • "En écho à ton édito" - Patrick Joquel

    Suite pour une tristesse

     

    Il y a la tristesse

    Avec son vieux silence

    Autour du cou

    Avec sa pesanteur sur les épaules

     

    Tout ce qui nous détache

    Et nous laisse à flotter

     

    Vidé

     

    Le bleu a beau flamber

    De tous ses étourneaux

    On ne suit plus leur vol

     

    Tout est à réapprendre

    Jusqu’au léger sourire

     

    Il y a la tristesse

    Et ce n’est pas facile

     

     

    on se retourne

     

    tant de temps déjà

     

    On se connaît si peu

     

    On est si rare

     

    On se protège aussi

     

    De quoi

    De qui

    Pour aller où

    ?

     

     

    on se cogne au monde

    on s’égratigne

    on est percé de toutes parts

    on n’est plus étanche

    on fuit

     

    on résiste

    on s’obstine à façonner

     

    on ne sait ni comment ni pourquoi

    on tient

     

     

    On est là

    Rivé à son établi

    Jour après jour

    A chercher

    Quoi

    ?

    Qu’importe au fond

    Ce qu’on trouve

    On en est le premier étonné

     

     

    on s’étonne

    oui

    comme un coquelicot

     

     

     

     

    bruits de la nuit

    chiens lointains

    crapauds fragiles

    étrange hulotte

    moteurs automobiles

     

    cette odeur d’éternité

    qu’on voudrait tant ne jamais quitter

     

    doux mensonge

    hier était différent

    demain sera autre

    et nul ne sait ce soir

    lequel demain à l’appel

    répondra

    absent

     

     

     

    on est à nouveau là

    en équilibre instable

    entre un désir de sauter dans le vide

    et l’autre

    celui de rester les pieds sur terre et le nez en l’air

     

    on résiste au premier

    on s’accroche au second

     

     

    malgré ces regards écaillés par le martèlement des images

    malgré le silence étouffé par la rumeur des radios

    malgré le sordide et l’indifférence

    malgré le confort

    malgré la tentation de somnolence

    je m’applique à ne rien oublier du vent dans mes cheveux d’enfant

    je cherche à écrire aussi léger qu’un nuage

     

     

    On est tellement seul face à son passé que lorsqu’il revient certains soirs frapper à la mémoire

    on tremble

    et même

    on pleure à bas bruit

     

    On voudrait alors lancer autour de soi des milliers de bulles de savon

    Ou bien

    Sous le bleu

    tout un banc d’étourneaux

    noir olive

     

    On regarde ainsi au travers de leur transparence un paysage habituel

    On le croit immuable si bien installé dans le chant des saisons

    A peine si on se voit vieillir

     

    On se croit si bien installé dans son corps

    Bien sûr il n’est plus tout en course haletante

    ni tout en souplesse

    et pourtant

    si proches

    elles demeurent

    cette enfance et cette adolescence

     

    Familiers fantômes

     

    On s’inscrit dans le présent de ce monde

    A peine le voit-on tourner

    Le temps écrit son histoire en ce corps

    autant que dans la mémoire

    ou le paysage

     

    au printemps

    comme on voudrait croire

    à la légèreté des fruitiers

    à leur si blanche espérance

    à leurs promesses

     

    comme on voudrait

    oui c’est ça

    fleurir

    et secouer la mort

     

     

    On est à peine

    à peine un peu moins gratuit

    dans la vibration

    et beaucoup plus fragile

     

    devant tant d’indifférence au devenir de nos quelques kilos de chair

    d’insouciance autour de l’activité de nos neurones

    comment ne pas crier

    même en silence

    même en papier miroir

     

     

    Peu importe le nombre de soleils couchants perdus

    quand un seul poème les tient tous

    en quelques vers

     

     

     

     

     



    Patrick Joquel
    www.patrick-joquel.com


  • NUMERO 40

     

    Oct. Nov. Dec. 2011

     

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    Edito, médito.

     

    Une fois de plus, me voilà devant la page blanche de l’édito, ne sachant trop quoi y mettre. L’été est passé, vite mais lourdement chargé et il y a donc celles et ceux qui sont partis pour d’autres voyages. Leur rendre hommage ici est le minimum que je puisse faire. La mort de ceux que l’on aime est toujours une leçon difficile à accepter, et pourtant, qu’en sait-on finalement ? Notre sort à nous, les dits vivants, est-il plus enviable ? Je ne vais pas répondre, ni ici, ni ailleurs, à des questions aussi vastes. A chacun de chercher ses réponses, si toutefois réponses il y a. Alors quoi ? Alors rien. Rien et tout à la fois. Un pas après l’autre, sentir, ressentir et aimer. Aimer au-delà même de nos supposées limites. Aimer, parce que tout est si bref et absolument rien ne peut être monotone. L’ennui est l’illusion de celles et ceux qui pensent avoir tout leur temps. Ils ne se trompent pas tout à fait, ils ont effectivement tout LEUR temps, mais nul ne sait quand il s achève.

     

    Mourir est un processus très instructif. C'est fou ce qu'on apprend.

    Le seul ennui, c'est qu'on n'a guère le temps de mettre

    ses nouvelles connaissances en pratique
    Lawrence Block in Le Diable t'attend

     

    Chaque jour est unique, chaque jour est un commencement, chaque jour est neuf et rien ne nous oblige à répéter les mêmes erreurs que la veille. Nous sommes libres, libres d’être ce que nous souhaitons être. Libres ! Cela ne signifie pas que tout se fera tout seul, bien au contraire, et nous ne serons jamais ni plus ni moins que celle ou celui qui marche sa propre existence. Sentir, aimer, marcher. Respirer, boire, manger. De créature à créateur, juste la lettre E qui change de place. La lettre EUX, les autres, que nous pouvons accueillir, intégrer au lieu de les laisser tout au bout, loin du C comme cœur. Juste une lettre, juste un pas, juste un geste. Pas grand-chose, mais pas rien non plus. Créer c’est exprimer, éliminer une pression, se libérer donc. Pour certains, c’est aussi essentiel que de respirer, ils ne peuvent vivre sans. Peut-être ont-ils plus de pression à l’intérieur que les autres, telles de véritables cocottes-minutes ? Peut-être, peut-être… Ce qui est certain, c’est qu’aujourd’hui je n’ai vraiment rien d’intéressant à dire, mais toujours une irrépressible envie de créer. Et la poésie, a-t-elle à voir avec la création ?

     

    Le poète n'est pas le créateur. Il est porteur d'énigmes.

    Michel Camus in Transpoétique

     

     CG

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    AU SOMMAIRE

     

    Délit d’amour :

    Hommage à Beb Kabahn (1974-2011), graphicultrice de stigmates, écrivière en proséïe et tellement plus et encore.

     

    Hommage à Yann Orveillon (1941-2011), poète et voleur de feu, au cœur océan.


    Délit de poésie : Muriel Modély, Patrick Aveline et Guillaume Siaudeau

     

    Résonances : 1 livre, 1 recueil, 1 groupe de musique, 1 couple de photographes.

     

    Délits d’(in)citations s’éparpillent comme toujours à l’automne et vous trouverez le bulletin de complicité, très au fond en sortant, qui adore jouer lui aussi les feuilles au vent...

     

     

    Illustratrice : Corinne Pluchart

    pluchart.corinne@orange.fr

     

    « Je vis près du Mont-Saint-Michel, mon lieu entre tous. J'écris, je marche, je m'arrête, je découvre. La poésie comme racine avec la grève et le vent, le sable et l'eau. Je dessine, je peins. Je regarde le monde et la lumière... souhaitant qu'elle éclaire partout et tous. »


    http://corinne.pluchart.over-blog.com/

     

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    automne profond
    mon voisin
    comment vit-il?

    Saigyo

    in poèmes de ma hutte de montagne

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    Nouveaux Délits fait partie du fond de l’ARPO

    http://www.arpo-poesie.org/

  • Avis de parution : Le Poulpe et la Pulpe de Cathy Garcia

     

     

    AVIS DE PARUTION CHEZ CARDERE EDITEUR

     

    Le poulpe et la pulpe – Cathy Garcia

     

     

     

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    Extrait

    J’ai mordu, bafouillé comme d’autres se lovent et jouissent. J’ai camouflé ma soif dans une cargaison de vertige. Trouvé dans le caniveau, une pépite lustrale.

    Sur les crêtes frontalières, j’ai fait récolte de courbes sereines. Amulettes fertiles. Clarté rayonnante. Trouvé le noyau de la féminité caché dans les arbres.

    Des cavales et des transes, j’ai gardé l’authentique insolence de la pulpe. Ce tremblement des nuques, embuscade hypnotique. Méandre où se coule la joie inconditionnelle.

    Dans ma soif, j’ai la vision d’un oiseau ensorceleur posé sur la branche haute d’un cèdre.

     

     

    « Une poésie grave, précise et drôle à la fois, où je me laisse volontiers embarquer, surprendre souvent, dans un cheminement preste, parfois fébrile ou vertigineux, qui épouse des méandres très féminins d’émotions, de sentiments, de joies et de souffrances. » (Bruno Msika, éditeur)

     

    Poésie. Livre de 60 pages au format 140 x 210 imprimé en noir sur bouffant naturel 80g. Illustré par des dessins de Jean-Louis Millet. Sept. 2011, prix public 10 euros, ISBN 978-2-914053-60-0 Cardère éditeur, Lirac (30) www.cardere.fr

     

     

     

     

     

     

         

  • Pour répondre à la question de Fabrice Marzuolo

     

    Réponse publiée dans L’Autobus n°4

    http://autobus.centerblog.net/48-numero-4

     

    L'univers poétique actuel, pour moi ça ne veut rien dire ou alors faut parler de multivers. Il y a donc toutes sortes de choses dans les multivers poétiques actuels, multitude de courants, de réseaux, de pelotes emmêlés, d'auteurs divers et variés, variables aussi, de styles et d'anti- styles qui font styles etc.


    En tant que revuiste autant qu'en tant qu'auteur, je garde un œil distancié sur les bousculades, les polémiques, les défenseurs de la vraie poésie, les défenseurs de la poésie pour tout le monde, les défenseurs de la non-poésie, les censeurs et les sangsues, les poètes rebelles et ceux qui ont la part belle, les poètes maudits et ceux qui maudissent, les poètes d'hier et d'aujourd'hui, les poètes et les pouets.


    La poésie c'est tout ça et rien de tout ça. Haaaaaaaaaaaaaaaa, la poésie !


    En tant qu'auteur, la poésie, je n'en "fais" pas, elle est là, elle était là avant moi, elle y sera après, je ne pense pas qu'elle soit l'apanage des poètes, les poètes à la limite sont des révélateurs de la poésie qui elle-même est révélatrice de quelque chose que faute de mieux on appelle poésie. La poésie c'est un mot. En tant que mot, elle rejoint le dictionnaire. J'ai déjà dit que les poètes sont des bergers, les mots toutes sortes de bestiaux, qu'on regroupe, qu'on aligne pour en tirer sens, et parfois on les tisse pour en tirer de la magie, qui est au-delà du sens. La poésie a quelque chose à voir avec la beauté, mais pas pour tout le monde, donc je pense qu'il n'y a pas de règle à imposer sinon à soi-même si on en a envie ou besoin de règle. Chacun s'exprime comme il le souhaite, et pour moi finalement l'important dans la poésie, c'est le lecteur. En tant que lectrice, j'aime, je n'aime pas, ça me parle, ça ne me parle pas, ça m'exalte, ça me laisse froide, quels que soient le style, l'école, le genre, le sujet, et donc ainsi se font les rencontres, entre un auteur qui écrit et un(e) lectrice/lecteur qui aime... Alors la poésie elle est peut être là, dans cet entre-deux, dans l'espace de la rencontre. Le reste... n'est que... ce qu'on voudra.


    En tant que revuiste, je peux dire qu'il m'arrive d'avoir la nausée de la poésie, sous toutes ses formes, comme un pâtissier peut-être ou un chocolatier qui ne supporterait plus le sucré... donc là je fais des pauses. Je vous avouerais cependant que je suis extrêmement difficile en poésie, et que je ne m'enthousiasme pas si souvent que ça, et je peux avouer aussi qu'il y a de la poésie que j'aime, parce qu'en fait ce n'en est pas... ce sont des histoires, des récits, des instantanés de vie, et seuls les poètes peuvent peut-être arriver à y voir de la poésie. D'où le fait que beaucoup de lectrices-lecteurs de poésie sont des poètes.

     

     

    Cathy Garcia, 2011