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Soliflore 114 - Christophe Salus

 

chiens violets dans la nuit rouge 001.jpg

tableau de René Mazyn, tous droits réservés

 

 

 

Religieuse prose

 

Les exégèses exagèrent :

 

Dans ces Livres pleins de virgules,

que l’histoire a lentement essuyées,

Tout peut se voir et s’interprète,

et si l’on s’en tient au seul mot,

ce sont bien des pages glauques d’horreurs !

 

Et comme on peut pas faire pire

et que le délit plagiaire est proscrit :

 

« Écrivons nous-même notre livre sacré ! »

 

 

 

 

 

Commentaires

  •  Ecrivons nous-même notre livre sacré :


    °°°°°


    Le sourire

    … Et ceux-là aussi mangeront des enfants,
    et l’être humain marchera longtemps, la main dans la main
    de l’Ange de l’ignoble, la fille crachera sur le père,
    et le fils sur la mère ; et l’on tuera des chats,
    et quand tous les chats seront morts,
    nous crèverons les yeux des gens,
    ce sera le temps du sourire,
    sur les dents.


    °°°°°°


    L’exode

    Dans le grand noir collant, qu’un vague feu raie,
    la tribu avance harassée, titubante ;
    les idoles cassées, le cœur en déshérence,
    ils sont comme des loups, hurlants, forcenés,
    dangereux.

    Et tous de fuir et de se perdre, de disparaître,
    avalés par les trous, dans l’épouvantable nuit
    du monde…

    Là-bas, le soleil ne se lève pas.

    °°°°°°


    Les femmes

    - Ces stupides créatures ne font presque pas la guerre.


    °°°°°°


    Les anges

    O chérubins armés, et vous, les saints de garde
    (car ton Dieu ne t’a point abandonné)
    Par les tripes des éventrés
    palpitants,
    trempées dans les sables brûlants
    des déserts implacables,

    je vous salue et me prosterne
    sous les épées de feu, sous les ailes gigantesques,
    les auréoles tranchantes, les arabesques maléfiques,
    les byzantins idéogrammes empoisonnés…

    Inclinez-vous devant les anges !
    Que pas un seul de vous ne songe
    échapper aux oiseaux d’orage !


    °°°°°°


    Prophètes


    Yassudesh, Hasra’th, Mib-Duhab, sous l’égide
    malade de Dieu, le frère dément de « l’Ancienne »
    et tous ceux dont le vent souffle derrière les yeux,
    distillèrent les pieux mensonges !
    … Et l’amère vérité, pour le bien et la folie des hommes,
    resta cachée dans les replis sinistres de leur déguisement.

    Ainsi, les prophètes furent parmi les pires choses du monde
    - Et le peuple buvait leurs borborygmes -
    Et les dieux mauvais ricanèrent, et les dieux bons
    - qui sont les mêmes - crachèrent à la face du peuple
    tout le fiel de leur fausse naissance,
    de leur piètre immanence, et de leur désir pourri.

    - Mais Moi, je vous le dis ! le malheur et la maladie
    s’abattront sur les âges qui viennent, et nous regretterons
    la prédication naïve, la lumière des bûchers, les horreurs des sphinx,
    nous regretterons les clous !
    Et du ciel éventré tomberont, vomis par le néant,
    des fleuves de sang répandus pour la gloire, et,
    des os broyés des infidèles et des apostats,
    des agnostiques et des hérésiarques,
    la poussière s’échappera, occultant toute lumière...

    A jamais !

    … Dans la nuit infinie, la race maudite des hommes grouillera,
    pataugeant ses propres humeurs ; et nous mangerons nos excréments,
    et de nos sanies puantes s’élèveront encore des liturgies geignardes
    et l’espoir puéril qu’un démiurge nous sauve…

    En vérité.


    °°°°°°


    Paradis

    Et Dieu a préparé pour eux des billevesées contre la peur,
    de fausses fleurs dans des jardins artificiels pleins
    de pauvres phantasmes ; des histoires bêtes à pleurer ;

    et toute la tristesse d’un présent soumis.

    … Or, cette vie, toujours future et meilleure,
    Fortifiera la foi et l’espérance,
    et, comme la carotte à l’âne accrochée,
    le dessein d’un maître.

    …Car il est préparé pour toi des délices et des roses ;
    et toujours l’herbe sera verte, et les oiseaux
    te mangeront dans la main…

    La fin des temps !
    C’est long !


    °°°°°°

    Dieu

    Monothéiste, comme le chibre !

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