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  • Revue Nouveaux Délits n°82

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    Retour en Amérique latine huit ans après. Nous avions proposé en 2017 un Nouveaux Délits spécial Guatemala et voici aujourd’hui ce travail mêlant deux poètes d’Amérique du nord (Mexique) et trois autres d’Amérique centrale (Guatemala à nouveau). Vania Vargas était déjà présente en 2017, et nous avons ici traduit quelques poèmes de son dernier recueil en date : Generalidades y reglas de la fuga (Editorial Sophos, 2024). À nouveau, cette précision cinématographique de ses courts textes. À nouveau, cette densité du moindre mot. Cette façon d’esquisser des espaces hopperiens immenses, où chaque vers semble abriter une présence fragile. Julio Palencia est un compagnon de route présent sur le blog www.fuegodelfuego.blogspot.com depuis plus de dix ans. Il revient dire le monde avec cette concision presque orientale qu’on lui connaît, cette manière discrète d’empoigner, au lieu d’une plume, un sabre doux. Sa lame ainsi coupant les ornements attiserait la vie, je crois, au lieu de l’enlever à quiconque. Isabel de los Ángeles Ruano est une poète guatémaltèque emblématique, un personnage entier, fougueux, hypersensible (comme tous) et empathique à chaque instant, dont on découvrira ici la nuit cosmique, la furie par instants terribles, la clarté plus soyeuse parfois, la détermination surtout, l’envie (la gnaque fragile, on pourrait dire). Tandis que j’essayais de la traduire, j’ai cru sentir le mistral traverser les murs. Jorge Vargas et César Anguiano sont deux poètes de Colima au Mexique qui avaient déjà été traduits par Patrick Quillier en France. Grâce à la revue Teste, j’ai d’abord rencontré Jorge, qui m’a généreusement envoyé depuis le Mexique un livre de César (plutôt que de m’adresser un des siens). Ces deux amigos ont des écritures sans doute distinctes : Jorge décrit les chocs du réel direct, invasif, torturant, sous la forme d’un journal de guerre terrible ; César, lui aussi entaillé par la réalité du monde, me semble envisager les choses avec davantage de recul (l’ironie l’aide à ne pas sangloter, je crois).
    Y a-t-il un pont, un lien, un semblant de nerf unissant ces cinq écritures ? Plus d’un écho involontaire nous semble perceptible, d’une œuvre à l’autre. Partout cette tension du texte de part en part électrifié par une nécessité plus que vitale. Si les destins de ces poètes ont été différents (certains ont pris le réel en pleine gueule, d’autres de manière moins frontale), l’ensemble de leur vers exsude une même inquiétude profonde : comment vivre ici même, là-bas ? Comment continuer à vivre en ayant vu, en ayant entendu tout ça ? L’exigence éthique de l’écriture semble être le poumon que l’on cherche, là où la violence règne et tue. Un poumon qui n’est pas un Graal, très loin de là, mais qui peut maintenir à flot un modeste moyen de respirer, c’est déjà ça.

     

    Laurent Bouisset

     

     

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    AU SOMMAIRE

     

     

     

    Délits de poésie (bilingues) :

     

    César Anguiano (Mexique)

     

    Isabel de los Ángeles Ruano (Guatemala)

     

    Julio C. Palencia (Guatemala)

     

    Jorge Vargas (Mexique) : Diaro de guerra / Journal de guerre (extraits)

     

    Vania Vargas (Guatemala) : Generalidades y reglas de la fuga / Règles et généralités de la fuite (extraits)

     

     

     

    Les Délits d’(in)citations toujours, font écho aux battements de plume. Vous trouverez le bulletin de complicité au fond en sortant, n’hésitez pas à le disséminer autour de vous.

     

     

     

    Numéro réalisé en collaboration avec Laurent Bouisset, traducteur

    www.fuegodelfuego.blogspot.com

    et nous le dédions à la mémoire de Jorge Camarillo et Daniel Birnbaum,

     

     

     

     

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    Illustratrice : Cathy Garcia Canalès

     

     

     

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    Le pire de tout c'est l'habitude. L'homme perd son humanité

    et l'énormité de la douleur d'autrui ne compte plus pour lui.


    Otto René Castillo
    in Rapport sur un acte de justice

     

     

     

     

    http://larevuenouveauxdelits.hautetfort.com/

  • Zéphyrage de Guénane Cade lu par Dana Shishmanian pour Francopolis

    Zéphyrage. Éditions Nouveaux délits

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    (collection Délit buissonnier n° 8), juillet 2025 (56 p., 12 €)

     

    "Ce recueil se lit en coup de vent… Il faut se laisser porter, goûter l’instant, les notations brèves sur des sujets en tout genre, telles des éclaboussures des vagues de la mer sur une plage balayée par le borée, mais aussi les touches suaves d’un zéphyr imaginaire qui apporterait la douceur et la paix sur des contrées dévastées… La voix de la poétesse assume un parler franc et n’hésite pas à interpeller le monde et ses puissants au pouvoir. L’écriture affiche une simplicité sans fard mais nulle naïveté, elle est plutôt mûre et acérée, avec une belle assurance en son pouvoir de trancher entre la haine et l’amour, le mensonge et la vérité, le fanatisme et la vie – tout en s’offrant à la propre réception de chaque lecteur. Citons quelques très belles volutes qui emportent toute notre adhésion :

    Envie de crier

    ça suffit ! Assez !

    Fermez les vannes des chicanes

    les tuyaux de la logorrhée

    les jets de venin

    les vindictes corrosives

    vite   vite rasons les gesticulations

    les indignations les contaminants

    les veules combines

    ma page blanche n’absorbe plus   (p. 19)

     

    La poésie peut compter sur le vent

    elle s’appuie sur la réalité

    en réalité elle s’octroie le droit

    de s’appuyer sur tout même sur toi

    de chantonner se farder s’habiller d’images

    à toi de la dénuder

    de la laisser infuser à ton gré

    de te l’approprier

    comme le vent elle côtoie aussi bien

    l’élégance que la gueusaille   (p. 24)

     

    Lassitude

    je rêve d’offrir des poignées de poèmes

    enveloppées de soie moirée

    paresse   caresse     je rêve

    que ces mots fondent sur la peau du monde   (p. 27)

     

    J’appartiens à la famille de ceux qui ont vu

    voler l’albatros hurleur

    ce voilier à l’envergure légendaire

    ce voltigeur du ciel aux révérences de star

    de ses dessous blancs frôle les rouleaux glauques

    avant de s’élever jusqu’à l’épure   (p. 47)

     

    Faire le tour de l’Amour

    épreuve infinie

    la litanie des erreurs humaines

    est tout aussi perpétuelle

     

    Il n’est pas de vie banale

    évidence anodine pas insipide

    si l’amour déprime

    l’amour propre sombre

    remède simple

    dans un jardin en repos estival

    quand pas une brise ne bouscule les pétales

    arrêtez-vous contempler

    deux escargots énamourés   (p. 53)

     

    Par bonheur j’avais parmi les photos prises dans mon petit jardin sur la terrasse de l’appartement, immortalisé, l’instant unique de l’amour des escargots… et, comme en suivant le conseil de l’amie Guénane, j’en ai fait l’image-emblème de ce numéro : Faites l’amour, pas la guerre !"

     

    Et tant d'autres auteurs, artistes, livres, revues à découvrir dans ce numéro d'automne : http://www.francopolis.net/