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LA REVUE NOUVEAUX DÉLITS - Page 2

  • Revue Nouveaux Délits - Numéro 75 (extraits)

     

    Un audio un peu plus en forme radiophonique, j'innove pour ce n°75.

    Voici donc quelques-uns des poèmes & textes de Marie-Florence Ehret, Alain Simon, Marie-Françoise Ghesquier, Pierre Gondran dit Remoux, Marie Tavera, Daniel Quérol Bonhomme et Cathy Garcia Canalès, publiés dans ce n°75 sorti en avril 2023 et présentation de ce numéro. Extraits choisis et lus par Cathy Garcia Canalès. Illustrations de ce numéro : Anouk Rugueu.

     

     

  • Soliflore 131 - Andrée Buchet

    portraitandrée_borisbuchet.jpeg

    Photo d'un tableau d'Andrée peinte par son mari

     

     

    Je voudrais t’entourer de mon âme,
    Tenir loin de toi tout le mal,
    T’abriter comme au creux d’une lame
    En mon cœur dont l’amour n’a d’égal.
    Tu es mien au-delà de mon être,
    Mon enfant, mon aimé, ma douceur :
    C’est par toi que l’espoir peut renaître
    À mes yeux désertés de lumière.
    Tu es l’ange, la source, l’origine
    De mon si douloureux parcours :
    Je t’appartiens, c’est toi qui me dessines
    La voie vers la beauté des jours.
    C’est par toi que j’existe et perdure
    Traversant les méandres du temps :
    Tu es ma joie, ma folie, mon délire,
    Tu me rends l’infini des instants

     


    photo_andréebuchet.jpegAndrée Buchet née BIVORT, le 24 décembre 1922 à Luxembourg, est une poétesse luxembourgeoise. Elle écrit chez elle toute sa vie, dans l'intimité du foyer qu'elle partage avec son mari, Boris Buchet, peintre de l'école de Paris.


    "J'arrivais pour étudier les lettres et la philosophie à La Sorbonne. C'était en 1946. C’était très dur après la guerre, mais malgré toute cette misère physique qui a encore duré des années, les gens étaient exaltés, on avait des ailes. Je l’ai rencontré dans le train pour venir à Paris, un garçon de la rue où j'avais grandi. J’étais forcée d’écrire. Je n’aurai jamais choisi d’écrire. Quelqu’un m’aimait très fort, ce qui a déclenché en moi une urgence. Ce poème m'a été dicté. Un soir, j’étais dans mes papiers à étudier et j’ai dû l'écrire. L’amour m’a toujours fait écrire. Par la suite, d’autres amours ont alimenté cette écriture, différemment. Lui, était resté. Même après sans être allé, il était resté d’un amour qui a duré toute la vie, toujours aussi profond. Je crois que chacun d'entre nous contient les deux sexes, Platon le disait et, on cherche constamment à retrouver cette part de nous. Cela donne un grand bonheur de retrouver cette moitié, de se sentir complet et vaste comme cet amour. On ne peut pas vivre sans amour."

     

     

  • Gîtes de Julio Cortázar, trad. de l’espagnol (Argentine) par Laure Bataillon, Gallimard, 2012

     

    1341195.jpgCe qu’il y a de fascinant dans les nouvelles de Cortázar, très représentatives du réalisme fantastique de la littérature latino-américaine, c’est qu’elles partent quasi toujours du quotidien, de situations des plus banales et puis, comme si la réalité commune n’était protégée que par un voile extrêmement ténu, soudain par une brèche, une faille, une déchirure, elle est envahie ou insidieusement pénétrée par d’autres réalités bien plus sombres et menaçantes où évoluent des créatures dangereuses, effrayantes ou pire encore. Elles montrent à quel point notre normalité, finalement, tient à peu de chose et qu’un rien peut nous faire basculer dans la folie, attiser nos pulsions les plus obscures, les plus animales, comme la statuette qui rend fou et sanguinaire dans L’idole des Cyclades et Les ménades où un chef d’orchestre paye cher et probablement en chair, son moment de gloire, quand le concert classique se transforme en orgie carnassière, sous la conduite d’une femme vêtue de rouge. Le talent de Cortázar n’est plus à démontrer et bien que les nouvelles de Gîtes, dont certaines figurent également dans d’autres recueils, commencent à dater — première parution chez Gallimard en 1968 — elles n’ont pas pris une ride. Elles se lisent avec toujours autant d’intérêt, de frissons et de plaisir. Une des plus notables, c’est sans doute N’accusez personne. Un homme enfile un pull, situation que nous avons tous connu, ça serre un peu, on se débat, on cherche la sortie, lui n’en ressortira pas vivant. Cette nouvelle, très simple en apparence, est d’une efficacité redoutable. Dans le registre légèrement surréaliste, il y a encore Céphalée où un couple d’éleveurs subit les symptômes de tous les terrains homéopathiques, sur fond d’élevage de bêtes étranges, fragiles et apparemment répugnantes : les mancuspies. Il y a cet homme aussi dans Lettre à une amie en voyage qui vomit des petits lapins. Dans Maison occupée, un frère et une sœur vivent seuls dans une vaste demeure familiale, mais peu à peu sont obligés de se retrancher dans un espace de plus en plus restreint, jusqu’à devoir quitter la maison. Le talent de Cortázar est l’art de rendre palpables les tensions, sans besoin d’expliquer quoi que ce soit, souvent les situations virent à l’absurde mais un absurde si noir qu’il est difficile d’en rire. Parfois, les nouvelles ressemblent à des souvenirs d’enfance, elles ont cette ambiance un peu douce et délavée des anciens albums photos où transparaît sans qu’on s’y attende, la cruauté. Pas mal de nouvelles se construisent aussi autour des rêves, des prémonitions, comme Récit sur un fond d’eau, Dîner d’amis ; de la perméabilité des frontières entre la vie et la mort, comme cet enfant qui pleure derrière La porte condamnée d’une chambre d’hôtel, scène qui pourrait tout à fait figurer dans un film d’horreur japonais et puis dans Le fleuve, une nouvelle particulièrement cynique autour du couple, ainsi que dans Autobus, où deux réalités s’ interpénètrent le temps d’un parcours en autobus, au plus grand effroi de deux des passagers qui n’ont pas de bouquet de fleurs et ne descendent pas au cimetière.

    Cette nouvelle d’ailleurs fait penser à une autre excellente nouvelle qui se déroule dans un tramway : Les vautours, de l’auteur bolivien Oscar Cerruto dans Cercle de pénombre. Pour les aficionados comme moi de ce genre de littérature, on ne saurait trop conseiller l’anthologie Histoires étranges et fantastiques d’Amérique latine parue chez Métailié en 1997, où l’on peut retrouver deux nouvelles de Cortázar : N’accusez personne et Apocalypse du Solentiname. Un auteur à découvrir également, uruguayen, si ce n’est déjà fait : Horacio Quiroga, avec notamment ses Contes d'Amour, de folie et de mort.

     

    Cathy Garcia Canalès

     

     

    Cortazar.jpgJulio Florencio Cortázar Descotte est né le 26 août 1914 à Ixelles, banlieue de Bruxelles où travaille son père puis la famille retourne à Buenos Aires, dès la fin de la Première Guerre mondiale. Le père abandonne la famille. L'enfant, fréquemment malade, lit des livres choisis par sa mère, dont les romans de Jules Verne. Après des études de lettres et philosophie, restées inachevées, à l'université de Buenos Aires, il enseigne dans différents établissements secondaires de province. En 1932, grâce à la lecture d'Opium de Jean Cocteau, il découvre le surréalisme. En 1938, il publie un recueil de poésies, renié plus tard, sous le pseudonyme de Julio Denis. En 1944, il devient professeur de littérature française à l'Université nationale de Cuyo, dans la province de Mendoza. En 1951, opposé au gouvernement de Perón, il émigre en France. Il travaille alors pour l'UNESCO en tant que traducteur. Alfred Jarry et Lautréamont sont d'autres influences décisives. Il s'intéresse ensuite aux droits de l'homme et à la gauche politique en Amérique latine, déclarant son soutien à la Révolution cubaine (tempéré par la suite : tout en maintenant son appui, il soutient le poète Heberto Padilla) et aux sandinistes du Nicaragua. Il participe aussi au tribunal Russell. La nature souvent contrainte de ses romans, comme Livre de Manuel, modelo para armar ou Marelle, conduit l'Oulipo à lui proposer de devenir membre du groupe. Écrivain engagé, il refuse, l'Oulipo étant un groupe sans démarche politique affirmée. Naturalisé français par François Mitterrand en 1981 en même temps que Milan Kundera, il meurt le 12 février 1984 à Paris. Sa tombe au cimetière du Montparnasse est un lieu de culte pour des jeunes lecteurs, qui y déposent des dessins représentant un jeu de marelle, parfois un verre de vin. L'œuvre de Julio Cortázar se caractérise entre autres par l'expérimentation formelle, la grande proportion de nouvelles et la récurrence du fantastique et du surréalisme. Si son œuvre a souvent été comparée à celle de son compatriote Jorge Luis Borges, elle s'en distingue toutefois par une approche plus ludique et moins érudite de la littérature. Avec Rayuela (1963), Cortázar a par ailleurs écrit l'un des romans les plus commentés de la langue espagnole. Une grande partie de son œuvre a été traduite en français par Laure Guille-Bataillon, souvent en collaboration étroite avec l'auteur.

     

     

     

  • Soliflore 130 - Iren Mihaylova

    IMG_20230422_215144_208.jpg

    Tableau de Monet - photo de l'auteur

     

     

     

              • l’effacement

    d’une écriture -



    « Jamais

    tu n’y parviendras »



    Ton corps prostré (convoité) comme refuge

    Tes mains embaumées de promesses



    Tes yeux comme éclairés de

    SOLITUDE



    Le refus que tu portes

    Comme refuge

    En signature du manque

    Sera la clé de l’écluse invisible

     

      

              • Au fond des mots

    (Depuis) toujours

    Une même énigme :

     

    Sauver ce qu’il y meurt

    Ou ce qu’il reste à vivre

     

     

              • Dieu se vide de lui-même

                                et l’homme :

     

                               ce trou inconsolable

          qui contient sa trace

     

     

              • Deux siècles à rayer la fin

    Cerner l’espace de deux silences



    Je remonte d’un abysse

    Rien ne me promet l’ascension



    Il suffit de grimper

    à l’échelle d’un manque

     

     

     

     

  • Soliflore 129 - Alain Nouvel

     

    Sergey Meytuv  -Russie- Petites histoires tristes et rencontres inutiles.jpg

    ©Sergey Meytuv  

     

     

     

    Mon amour quand on sera riches


    Mon amour, quand on sera riches 
    et qu’on sera déconfinés,
    on prendra l'autoroute en fleurs
     le matin dès potron-minet
    et la 206 chauffera.
    Sur une aire standardisée
    au self-service on se rendra
    où il y a plein de desserts
    industriels et très sucrés.
    Des cuisiniers en toque en toc
    nous y serviront quelques frites
    et puis ces cuisses de poulet
    dont on mange même les os.
    Là-bas, nous serons des rois,
    assis à la table en faux bois
    sous des poutres en polystyrène
    on boira notre café crème.
    Comme le moteur refroidit,
    à Ouistreham on poussera,
    où on verra les car ferries,
    on écoutera en anglais
    les haut-parleurs des compagnies
    dire des mots qu’on comprend pas.
    On rêvera de l'Amérique
    en buvant une soupe aux huîtres.
    Et puis on reviendra chez nous,
    par la route aux ronds-points relous
    pour économiser les sous
    tout en prenant des raccourcis 
    loin des radars et des soucis.

    Mon amour, quand on sera riches,
    on dormira au Sofitel
    dans les environs de Paris.
    Et on prendra le RER
    pour voir de plus près Disneyland. 
    Comme c’est trop cher l’entrée
    on tournera autour des grilles
    et on entendra les flonflons
    des boîtes à rêve et à musique.
    On marchera sur des chemins
    parmi les champs de betterave
    en contemplant de loin les tours
    de plastique et de carton-pâte 
    les attractions multicolores. 
    Ce sera l'été, il fait doux,
    on fera l'amour dans un bois
    en écoutant les haut-parleurs
    des grand huit, autos tamponneuses,
    et des petits trains de la mort.
    Il y aura le brouhaha
    lointain des enfants qui rient, on
    aura profité de tout ça
    sans rien payer tant mieux tant mieux
    ça nous rendra heureux, heureux.
    On terminera le séjour
    dans un F1 au lit friable
    et puis on se mettra à table
    au Mac Do au KFC
    son vieux barbu qui vous sourit
    comme un Joseph de cathédrale.
    On lui répondra tendrement
    en buvant notre Kronenbourg.
    On rotera tout en songeant.


    Mon amour, quand on sera riches,
    on soutiendra nos libidos
    en allant dans des club SM.
    On y trouvera quelques vieux
    qui se fouettent en disant « Je t’aime »
    puis toute une armée de soumis
    qui draguent en geignant : « Maîtresse »
    et ils te montreront leurs fesses,
    que tu punisses à l’envi.
    Ils pleurent à tes pieds : « Madame,
    châtiez-moi, je suis infâme. »
    Quelque éléphant du socialisme
    des professeurs et transgresseurs,
    eux, vont en des salons privés
    pour des pratiques plus osées.
    C’est réservé à une élite 
    des vieilles pies aux grosses bites.
    Mon amour, quand on sera riches,
    on se payera ces soirées
    pour après, de retour chez nous,
    s’exciter de tous ces à-coups.
    Et quand on se fera la fête, 
    on aura ce bordel en tête, 
    ce sera doux, ce sera doux !

     

     

  • Numéro 75

     

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    Quelle époque épuisante, collectivement et puis pour beaucoup individuellement ! Tellement qu’écrire un édito pour ce numéro semble au-dessus de mes forces et puis il y aurait tant à dire que ce n’est pas une petite page qui y suffirait. Quelques mots résonnent : colère, absurdité, injustice, paix, changement, radical, urgence, catastrophe, confusion, bêtise, mépris, inhumanité, aveuglement… Mais j’ai trop usé ma langue sur les bords amers et tranchants de ce monde modelé par quelques fous qui prennent toute l’humanité et son futur en otages. Je préfère laisser ma langue non pas aux chats mais à toutes celles et ceux qui œuvrent à alimenter le feu des consciences, à élever l’imaginaire, à semer des graines de sens là où rien ne pousse, à parler la langue du vrai, aussi noire que nécessaire mais qui ne triche pas, qui n’enrobe pas de vernis, de sucre de séduction ; à celles et ceux qui savent la langue de soin qui tend vers l’autre des mots de secours, langue bonne et belle des naïfs qui refusent de jouer dans la cour des cruels et des prétentieux, langue du sage silence aussi quand la cacophonie rend tout contact explosif. Tant de langues, tant de possibles. Car « Nous sommes arrivés à un moment de l’histoire où nous devons d’urgence redéfinir le sens de la civilisation », a dit très justement Hayao Miyazaki et clairement cette langue qu’on nous assène depuis les hauteurs des palais et des étincelants buildings n’a plus rien à voir avec une quelconque idée de civilisation.                          cgc

     

     

    Je sais pourquoi

    autant se taire

     

    Ne pas crier dans le désert

    quand c’est chaque grain de sable qui souffre

    ne pas parler aux vieux murs qui radotent

     

    Passer en silence

    avec la petite escorte d’insouciance

    qu’on aura un temps séduite

     

    Lionel Mazari

     

     

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    AU SOMMAIRE

     

     

    Délits de poésie :

     

    Marie-Florence Ehret, Au jardin (extrait)

    Antoine Simon

    Marie-Françoise Ghesquier, Le pont suspendu (extraits)

    Pierre Gondran dit Remoux, ainsi s’endort le ballast suivi de on hoche on hoche on hoche (extraits)

    Marie Tavera

    Danielle Querol Bonhomme, Fondrières de la parole

     

    Délit de l’autre : Éric Cuissard, L'autre qui était peut-être lui (extraits)

     

    Résonance : Gîtes de Julio Cortázar, trad. de l’espagnol (Argentine) par Laure Bataillon, Gallimard, 2012.

     

    Délits d’(in)citations ainsi font font font les petites pâquerettes. Vous trouverez le bulletin de complicité fort désolé : la disparition du tarif éco, entre autres, force à l’augmentation du prix de l’abonnement (par voie postale) donc à prendre en compte pour tout renouvellement à partir du 1er avril 2023.

     

     

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    Illustratrice :  Anouk Rugueu

     

    « Ancienne libraire, j’ai toujours aimé lire, écrire et dessiner. Ayant eu la chance de travailler de nombreuses années à la librairie d’un musée, j’ai pu fusionner mes centres d’intérêt dans le plaisir quotidien de feuilleter des livres d’art, de discuter de création et de livres avec les clients et visiteurs. Je dessine aujourd’hui surtout sur des pages de livres anciens et des matériaux de récup. »                                              

    Son site : https://rugueu.com/

     

     

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    Pour qui sait se ménager du loisir, une journée s’étend sur mille ans.

    Pour qui a le cœur vaste, une cabane est aussi spacieuse que l’univers.

     Zicheng Hong

     

     

     

     

  • Le livre de sensations


    Parution le 1er février 2023

     

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    2014-2022

     

    "Parfois, j’ai des orgasmes de nature qui m’ouvrent le cœur en deux comme une graine mûre. Je suis l’arbre, la mésange, la grenouille, le nuage, la pluie, l’orage, je pourrais dévaster un bureau de pôle emploi, en faire une jungle pleine de feuilles, de cris et de fouillis odorant. Où est la case poète ? S’il n’y a plus de place pour les arbres, les plantes, les oiseaux, les animaux, il n’y en a pas non plus pour les enfants, les mystiques et les poètes, tout ça c’est la même chose, tout ça est connecté directement à la source, la source vitale, la source de toute chose. Pur ressenti, pure perception en résonance avec le monde des formes mais en totale inadéquation avec celui des normes et des apparences. Il n’y a pas de mystère, tout est mystère et la normalité est une affreuse invention, réduction, supercherie."


    à tire d'ailes toujours, 52 pages bien remplies, agrafées, 
    papier recyclé à 100 % 
    mon illustration en couverture : "Dans la chair", 2023

     

    12 € + 3 € de port,  à commander directement : mc.gc@orange.fr

     

     

     

  • Revue Nouveaux Délits - n°74 (extraits)

     

    Quelques poèmes parmi ceux publiés dans ce numéro paru en janvier 2023 des auteurs suivants : Vincent Gispert ; Alexandra Norelli ; Joséphine Maaci ; Rafaëlle Gandini Miletto ; Virginie Seba ; Pierre Maubé ; Ara Alexandre Shishmanian & Cathy Garcia Canalès.
    Lecture par Cathy Garcia Canalès.

     

     

     

  • Revue Nouveaux Délits - n°73, octobre 2022 (extraits)

     

     

    Quelques textes et poèmes parmi ceux publiés dans ce numéro paru en octobre 2022 des auteurs suivants : Yvan Robberechts ; Kiko Christian Moroy ; Alain Guillaume ; Isabelle Garreau ; Thierry Desbonnets ; Georges Cathalo et une présentation de "Calepins voyageurs et après ? – Tome 1" de Cathy Garcia Canalès, paru en juillet 2022 et rappel de la sortie de "La cloche a sonné" d'Aline Recoura, délit buissonnier n°6, juillet 2022 également. Illustrations de ce numéro : Corinne Pluchart. Lecture par Cathy Garcia Canalès.

     

     

  • Soliflore 128 - Anna Kermen

     

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    Arthur Hughes - Ophélie

     

     

    où est mon frère
    au fond
    de la rivière
    il n'y est pas
    car j'y suis et
    je ne le vois pas

    comme j'en ai
    le cœur plein et
    les yeux remplis
    je me méfie
    des ombres
    des reflets
    que j'y vois

    il n'y est pas
     
    là-haut
    hors d'atteinte
    loin
    de mon étreinte
    un soleil en morceaux
    voilé à travers l'ombre
    me rappelle que la vie existe

    son or m'indiffère
    me lacère
    il ne m'enverra pas
    sa chaleur

    car il ne brille pas
    pour les cœurs
    plombés
    tombés
    tout au fond
    de la rivière

    aucune silhouette
    sur la berge
    prête à me hisser
    à me sauver

    où est mon frère

    bien au fond
    de la rivière
    je suis seule

    je suis celle
    qui tombe
    qui tombe
    qui tombe

    comme une pierre

    pas celle
    que tu relèves
    pas celle
    dont tu rêves

    comme j'ai
    le cœur
    gros
    à aimer
    à avaler
    une rivière
    ne suffit pas
    ne sera pas de trop

    comme j'ai
    le cœur
    qui déborde
    de mots
    je me tais
    je m'endors
    au fil de l'eau

    où je n'entends
    que ton silence

    où est mon frère
    que fait mon frère

     

    insta : @anna_s_kermen

     

     

     

  • Soliflore 127 - Alexandre Poncin

    Chat Ombre.jpg

    photo de l'auteur

     

     

    La lumière aujourd’hui

    n’a pas daigné

    saluer mon salon

     

    je n’en garde aucune

    rancœur

    — sinon pour moi

     

    qu’ai-je fait pour

    être si sérieux

    si vérace

    — impénétrable

     

    je pensai à mon enfance

    moi qui fut rivière

    allant sans rien savoir

    des transports minéraux

     

    le soleil y barbotait

    goulûment

    ses rayons clapotaient

    tout y était chair de poule

    autant dire clair et humble

    nous riions sans crispation

     

    Je n’ai pas été fidèle

    à moutonner mes colères

    mes contradictions froissées

    mes petites pétrifications

    mes calculs et mes autres

    lâchetés faites au monde

     

    Ce jour

    je ramasse humblement

    ma poussière

    demain me dira bien

    ce que je suis

    ce que je ne suis pas

     

    https://alexandrepoemes.fr/

     

     

     

     

  • Soliflore 126 - François Audouy

     

    audouy.jpg

    auteur inconnu

     

     

    Surnuméraires


    Semi-provinciaux, grands banlieusards,
    nous logions dans de vastes hangars
    anonymes que nous n’habitions pas.
    Nés confinés dans nos campagnes
    avec une avance dérisoire,
    nous errions en sous-préfectures
    où aucun tram n’aboutirait,
    perdant nos centres de gravité
    à mesure que s’amenuise l’espoir.
    Le dimanche, on va en forêt,
    bon bol d’air entre deux autoroutes ;
    comme chien en laisse on pisse un coup,
    rentre s’abrutir aux ondes hertziennes.
    Quand on s’évade, il est trop tard,
    cet exode est ancré en nous
    et on apprend à composer
    jusque dans nos moelles épinières.
    Nous sommes des hordes de surnuméraires,
    zonards, zombis, flous et hagards,
    effacés des images d’archives,
    rayés des registres, des radars.
    On nous éduque à la patience,
    à sagement faire nos devoirs ;
    polis et muets comme des pierres,
    nous ne nous berçons pas d’histoires.
    Nous nous souviendrons d’Anaïs
    qui au plaisir nous initia,
    des émissions du samedi soir,
    du mélange de pomme et de vodka,
    des Noëls tristes et des œufs de Pâques,
    des parents faisant semblant d’y croire,
    des vacances au bord de la mer,
    aux mêmes dates, aux mêmes endroits.
    Il ne fallait pas le monter le volume,
    il fallait effacer nos traces ;
    il fallait bander dans les clous,
    ne surtout pas manger l’espace.
    Comme l’unique cinéma
    clignote de ses blockbusters
    face au bowling - zone commerciale-,
    les témoignages de nos vies sur terre
    doucement s’estompent dans l’air du soir

     

     

     

  • Fée d’hiver d’André Bucher

    En hommage à l’auteur qui s’est envolé vers le territoire d’au-delà le 1er octobre dernier et qu’il ne sera jamais trop tard de lire, une note de lecture rédigée en 2012.

     

    fee-dhiver.gifFée d’hiver d’André Bucher. Le Mot et le Reste, décembre 2011


    Pour celles et ceux qui ne connaitraient pas encore le talent d’André Bucher, voici une bien belle façon de le découvrir. Dans Fée d’hiver, on sent le souffle d’un Jim Harrison, dont André Bucher est grand lecteur, mais l’écriture de cet écrivain poète paysan est unique. Elle sent le vécu, le territoire arpenté, la solitude affrontée. Fée d’hiver est un roman à la fois âpre et magnifique, austère et puissamment physique, comme les lieux dans lesquels il prend place dans ce sud de la Drôme, à la limite des Hautes-Alpes. Des lieux sauvages, entourés de montagnes, désertés par les hommes partis rejoindre les villes, où la vie, croit-on, offrirait plus de facilités. 

    Le roman démarre sur un prologue, un article paru dans le journal Le Dauphiné libéré, daté du 31 août 1948. Un fait divers, « Drame de jalousie dans le sud de la Drôme », qui fait écho au titre du livre : Fée d’hiver. Cette fée d’hiver qui vient comme pour rompre une malédiction, une sorte de réparation d’accrocs dans les mailles du destin.

    La première partie du roman est un journal intime à deux voix, s’étalant entre 1965 et 1988. Une façon de présenter les lieux, le contexte, les personnages. Daniel et Richard sont deux frères, l’un géant et l’autre court sur pattes, l’un parle peu, l’autre ne parle plus du tout. Ce sont les deux enfants laissés orphelins par le drame familial évoqué dans l’article du journal. Placés en famille d’accueil par la D.D.A.S.S., ils ont grandi et retournent maintenant vivre dans la ferme familiale aux Rabasses, pas très loin du village de Laborel. Une ferme délabrée, que Richard, l’ainé, va peu à peu transformer en casse. Daniel lui, muet depuis le drame, s’occupe d’un troupeau de brebis. Deux marginaux en quelque sorte, repliés sur eux-mêmes, que les gens alentour prennent pour des attardés.

    Et puis il y a les Monnier qui ont une scierie. Le père était l’amant de la mère de Richard et Daniel, responsable en quelque sorte de leur malheur, mais il est mort lui aussi, emporté par un cancer peu de temps après. Restent les deux fils, dont l’ainé dirige maintenant la scierie et le cousin Louis, le nabot que les frères Monnier aimaient tant tyranniser quand ils étaient encore enfants. Ces deux-là depuis toujours enclins à la morgue et à la méchanceté et la vie n’avait pas aidé à les changer.

     

    Heureusement il y a Alice, la jeune sœur. Alice travaille comme secrétaire à la scierie de ses frères, elle part à midi ravitailler les bûcherons. Alice est différente et elle n’a pas peur de passer du temps avec Daniel, le mutique des Rabasses, quand il fait pâturer ses brebis. Elle passe le voir, cherche à communiquer avec lui. Bien qu’elle soit bien plus jeune que lui, Daniel l’aime beaucoup, seulement les années passent vite. Un jour, alors qu’Alice a déjà plus de trente ans, elle finit par dire oui au cousin Louis. Daniel décide alors qu’il ne parlera vraiment plus jamais et arrête son journal. Nous sommes en 1988.

     

    Le roman enchaîne alors sur l’histoire de Vladimir entre 1995 et 1998. Vladimir est serbo-croate et bûcheron. En 1995, avant le cessez-le-feu entre les Serbes et les Bosniaques, sa sœur et ses parents périssent dans la destruction de leur village. Vladimir, c’est son métier qui l’a sauvé, il était dans la montagne en train de bûcheronner quand c’est arrivé. Quand il est revenu, il n’y avait plus rien, juste larmes, cendres et décombres. Il a donc fui, son pays, ses souvenirs, sa douleur. De pays en pays, une vie rude et solitaire d’exilé, de sans-papier, avec pour seul bagage, seul lien avec son passé, une anthologie bilingue de poésie des Balkans. Il exerce son métier partout où il peut et de pays en pays, finit ainsi par arriver en France. Dans le parc du Lubéron, il travaille comme surveillant d’incendies avec Alain, un étudiant qui prépare une thèse sur l’éclatement de la péninsule des Balkans et parle donc un peu la langue de Vladimir. Ainsi, tout en guettant les feux, débroussaillant, éclaircissant les bois, il aide ce dernier à perfectionner son français. Le Lubéron hors saison touristique est totalement dépeuplé au grand étonnement de Vladimir.

     

    « — Et encore, tu n’as rien vu. Ici ça va, on est dans le Lubéron. Passe seulement de l’autre côté du plateau d’Albion, en redescendant jusqu’à l’extrême pointe Sud de la Drôme, à la limite des Hautes-Alpes, tu verras… c’est bien pire. Là-bas même les corbeaux sont inscrits sur les listes électorales. Par contre en tant que bûcheron, tu devrais pouvoir trouver. Plus personne ne veut faire ce boulot. »

     

    C’est comme ça, qu’en mars 1998, quelques mois après la fin de leur contrat, Vladimir se retrouve face à Alice devant la scierie des Monnier.

     

    « — Bonjour Madame. Je m’appelle Vladimir, je suis bûcheron et je cherche du travail. »

     

    Entre temps, Alice, avait donc vécu sa vie de femme mariée. Mariée moins par amour que par peur de rester seule et aussi sous la pression de ses frères, histoire que la scierie reste en famille. Le petit Louis était devenu un homme, toujours aussi faible mais plus sournois et puis il s’était mis à boire, à boire et à frapper.

    Alice était loin, bien loin de ses rêves. Après huit années de mariage, la coupe était pleine et elle avait quitté le domicile conjugal pour aller vivre dans un gîte d’une amie d’enfance, pas très loin des frères Lacour : Richard et Daniel. Ça faisait longtemps qu’elle ne les voyait plus, elle s’en voulait. Les choses allaient changer.

     

    Vladimir donc, est embauché par la scierie. Non déclaré, il loge dans une caravane vétuste sans aucune commodité, mais il a l’habitude et se contente de ce qu’il a jusqu'au jour où les frères Lacour viennent lui témoigner quelques signes d’amitié et finissent par lui proposer d’aménager sur leurs terres, dans une cabane à remettre en état, au fond du Val Triste, à quelques kilomètres de leur ferme.

     

    « Une tanière toute en rondins de pins mal équarris, adossée à la forêt et donnant sur une clairière avec une vaste prairie où serpentait un ruisseau qui prenait sa source en haut du vallon. L’eau y était fraîche même en été et elle avait un léger goût de rouille. »

     

    Vladimir ne se doute pas qu’il va préparer là un nid d’amour pour une fée d’hiver.

     

    André Bucher à l’art de communiquer la nature, les sentiments qu’elle provoque et même ses propres sentiments à elle en tant qu’entité vivante à part entière et ce, d’une façon totalement originale, des images non attendues qui donnent beaucoup de fraicheur à l’écriture d’une histoire elle-même captivante, toute pleine de rebondissements, de profondeur, d’humanité et de rage aussi. Ce roman est un torrent de montagne à glisser à votre chevet.

     

     

    Cathy Garcia Canalès

     

     

     

    Écrivain, paysan, bûcheron, André Bucher est né en 1946 à Mulhouse, Haut-Rhin. Après avoir exercé mille métiers (docker, berger, ouvrier agricole…), il s’était installé à Montfroc en 1975, vallée du Jabron, dans la Drôme, où il est décédé des suites d’une maladie le 1er octobre 2022. Il était l’un des pionniers de l’agriculture bio en France. Écrivain des grands espaces, lecteur de Jim Harrison, Rick Bass, Richard Ford…, des écrivains amérindiens tels James Welch, Louise Erdich, Sherman Alexie, David Treuer…, son écriture puise sa scansion, sa rythmique dans le blues, la poésie, le jazz et le rock’n’roll. La nature n’est pas un décor mais un personnage de ses histoires. Fée d’hiver est son sixième roman.

     

     

     Le regard aussi est un toucher.

    in La vallée seule

     

     

    Bibliographie :

     

    Tordre la douleur, roman, Le Mot et le Reste, janvier 2021.
    Un court instant de grâce, roman, Le Mot et le Reste, 2018.
    À l'écart, récit, Le Mot et le Reste, 2016.
    La Montagne de la dernière chance, roman, Le Mot et le Reste, 2015.
    Confidences de l'oreille blanche, conversation entre André Bucher et Benoît Pupier, Revue critique de fixxion française contemporaine n°1, Écopoétiques, mars 2015.
    La Vallée seule, roman, Le Mot et le Reste, 2013.

    Histoire de la neige assoupie, Une hirondelle qui pleure tout le temps (nouvelles), Chiendents n°17, Cahier d’arts et de littératures, André Bucher, Une géographie intime, éditions du Petit Véhicule, 2012.

    Fée d’hiver, roman, éditions le mot et le reste, 2012.
    La Cascade aux miroirs, roman, Denoël, 2009.
    Le Pays de Haute Provence, carnet de voyage, vu de l’intérieur, récit, en collaboration avec le photographe Pascal Valentin, pour l’office de tourisme du Pays de Haute Provence, 2007.
    Déneiger le ciel, roman, Sabine Wespieser, 2007.
    Pays à vendre, roman, Sabine Wespieser, 2005.
    Le Cabaret des oiseaux, roman, Sabine Wespieser, 2004.
    Le Pays qui vient de loin, roman, Sabine Wespieser, 2003.
    Le Juste Retour des choses, Saint-Germain-des-Prés, Miroir oblique, 1974.
    Le Retour au disloqué, récit, Publication par l’auteur, 1973.
    La Lueur du phare II, Éditions de la Grisière / Éditions Saint-Germain-des-Prés, Balises, 1971.
    La Fin de la nuit suivi de Voyages, J. Grassin,1970.

     

     

    André Bucher, col de Perty, janvier 2012 © B. P..png

     

    Il songea que les empreintes des animaux dessinaient régulièrement des courbes ou des cercles. Les plantes également décrivaient des ronds pour se multiplier. Il n'y avait, selon lui, que l'homme pour se diminuer en s'imposant de vivre, et parfois de penser, à l'intérieur de carrés ou de rectangles. En y réfléchissant, il constata qu'il n'existait, pour ainsi dire, aucun carré dans la nature. Que l'on considérât la terre, la lune, le soleil ou l’œuf, ou encore les nids.

     

    André Bucher in Déneiger le ciel

     

     

     

     

  • Numéro 74

     

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    Un kilo de plomb ou un kilo de plume ? Qu’est ce qui est le plus lourd, me demandait-on, enfant… J’avais déjà ma petite réponse et aujourd’hui encore, je sais : ce n’est pas au poids qu’on juge l’équivalence alors vive les plumes ! Plus il y en a et plus on s’envole, plus il y en a et plus on plonge dans la douceur, la chaleur et peu importe quels drôles d’oiseaux nous sommes ! La noirceur du corbeau peut caresser nos mélancolies mais gardons-nous du plomb… À moins d’être de très talentueux alchimistes, laissons-le là où il est, bien profond sous la terre dans son berceau de cuivre, il y a son rôle à jouer, équilibre d’une terre à terre, yeux dans les yeux des ouragans. Du monde, n’en parlons pas, il nous assourdit trop déjà, chacun-e devrait être en mesure de savoir ce qu’elle-il doit faire pour ne plus se faire plumer ni additionner le plomb et surtout laissons l’amour au-dessus de ça. L’amour ne nous appartient pas, nous sommes ses oisillons et s’il veut bien nous prendre sous ses ailes, ce n’est pas pour y rester mais pour apprendre à donner aux autres plus de légèreté. Plus d’air, plus de lumière à respirer. Ni cage, ni chaînes, ni boulet. Tout s’écroule mais ne perdons pas de temps à nous lamenter sur les pertes, aiguisons notre attention pour percevoir ce qui en nous gagne en légèreté, ne nous laissons pas abattre mais sentons ce poids de plume dans nos poches : plus on le partage et plus il est doux et léger et réconfortant.

     

    Que cette année dite nouvelle nous soit douce, tendre et réconfortante.

     

    et là

    autour

    sens tes bras qui s’allègent

    la terre sous tes pieds

    tu danses

    tes mains comme des plumes

    légères

    l’oiseau

    tu l’entends ?

    ça pulse

    ça palpite

    ça pépite…

     

     

    CGC

     

     

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    AU SOMMAIRE

     

     

    Délits de poésie :

    Vincent Gispert, extraits d’À l’Est de l’horizon

    & Alexandra Norelli

     

    Délit de désobéissance et liberté : Joséphine Maaci

     

    Délit de poésie (suite) :

    Rafaëlle Gandini Miletto, extraits de marées

    & Virginie Seba

    & Tout un chacun de Pierre Maubé

    & Ara Alexandre Shishmanian, extraits des cycles inédits Stases et en-stases et Haillons, traduit du roumain par Dana Shishmanian, avec la révision de l’auteur

     

    Résonance hommage : Fée d’hiver d’André Bucher, Le Mot et le Reste, décembre 2011.

     

    & petit cadeau de la femme-orchestre

      

    Délits d’(in)citations qui incitent à regarder dans les coins.

    Vous trouverez le bulletin de complicité au fond en sortant, qui pour l’instant fait comme si l’inflation (enflure, gonflement, dilatation, emphysème, œdème…) ne le concernait pas.

     

     

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     Illustrateur : Kiko Christian Moroy

     

    Voir sa présentation de poète dans le n° 73 

     

     

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    Sous l'influence d'une grande peur, presque tout le monde devient superstitieux. La peur collective stimule l'instinct du troupeau et tend à produire de la férocité envers ceux qui ne sont pas considérés comme des membres du troupeau. La peur génère des impulsions de cruauté, et donc favorise des croyances superstitieuses qui semblent justifier la cruauté. Ni un homme, ni une foule, ni une nation ne peuvent être fiables pour agir humainement ou penser sainement sous l'influence d'une grande peur. 

    Bertrand Russell

     

     

     

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    *** les illustrations dans la revue sont en N&B ***

     

    Revue Nouveaux Délits – Janvier 2023 ISSN : 1761-6530 Dépôt légal : à parution – Imprimée sur papier recyclé et diffusée par l’Association Nouveaux Délits  Coupable responsable : Cathy Garcia Canalès Illustrateur : Kiko Christian Moroy Correcteur : Élisée Bec       

     

             

  • « Reste le choix d’être poète. (…)

     

    Si nous restons prisonniers de nos vieux critères, il n’y aura aucune issue. Remettre en cause la croissance illimitée, la prédation décomplexée, la xénophobie revendiquée, l’indifférence assumée, l’arrogance affichée, demande bien plus qu’une évolution : il s’agit de changer de paradigme. C’est toute notre image du monde qui est ici en jeu. Il ne saurait être suffisant, ni même signifiant, d’inventer de nouvelles manières de satisfaire nos vieux démons : il est vital de réenchanter un tout autre « habiter l’espace ». Qui ne renie ni les savoirs ancestraux ni les découvertes scientifiques. Mais qui s’autorise - à titre expérimental - toutes les ruptures, toutes les fractures. La langue n’est pas neutre : renommer la croissance du PIB en « taux de divergence suicidaire » aurait sans doute quelques conséquences sur nos ressentis, nommer « autoterrorisme intérieur » notre décision implicite de n’offrir aucun avenir vivable à nos enfants pourrait éveiller quelques consciences. Les mots comptent. Le poète ne se laisse pas intimider par la dictature malveillante d’une pensée oppressive qui tue chaque possible alternative avant même son éclosion. Comprendre et clamer que le réel pourrait être autre, esquisser l’inchoatif des ramifications avortées, exhiber les modes des mondes manqués constitue le cœur dur de la poésie en acte. Le poète refuse l’unicité du prisme. Même s’il est révolutionnaire, même s’il est solidaire, même s’il est salutaire. User d’une seule grille de lecture relève nécessairement d’une atrophie radicale. Le subtil démissionne dès que le pullulement est réfuté. Le monde est « plus d’un » de dedans et la pensée échoue tout autant quand elle gomme la multiplicité que quand elle omet la déconstructibilité. Les résistances poétiques doivent maintenant se disséminer, se déterritorialiser, se chaotiser, se diffracter et s’infecter mutuellement. Il est question d’écriture mais aussi de pensée, de regard, de ressenti, de geste, d’engagement, de désir, de plaisir. Le vivre poétique est tout sauf triste, étriqué et nostalgique. Il est transgressif, précis et aventureux, par essence. Il peut aussi devenir enchanteur, libérateur et salvateur. Par choix. »

     

    Aurélien Barrau - extrait de son intervention à Résistances poétiques, débat qui a réuni Edgar Morin, Isabelle Autissier et Erri de Luca, le 6 novembre 2019, lors du Forum Libération « Finance solidaire : des idées et des actions pour changer la société » à Paris.

     

     

     

  • Soliflore 125 – Haroun Guino

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    Turfu 

    C’est un petit soir à Marseille
    Et le vent souffle sur l’avenir.
    Qui en devine le fond absurde ?
    Son chant baroque ou minuscule ? 
    La vie superbe qu’il annonce,
    Avec ses airs de victoire ?
    Verra-t-on dans la vérité qu’il chante, 
    La faiblesse de ses armes ? 
    Et comment ne pas voir aussi, 
    Dans le profond de son sourire, 
    Dans la jolie révolte qu'il porte, 
    Son refus d'aboutir. 

     

     

  • Soliflore 124 – Lucie Roger

     

     

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    image de l'auteur

     

     


    Mosaïque

    Par petites touches, petites pièces 
    Construisant mosaïque chemin 
    S’animant en couleurs mélangées 
    Mélangeant porcelaine les instants 
    Instants du chemin coloré, parsemé 
    Sinueux, ce chemin porcelaine 
    Porcelaine s’ajoutant par touches petites
    Touches de mots, pièces aimantes
    Porcelaine fine, colorée et vibrante 
    Du chemin incomplet, lacunaire
    Aux mots dépareillés, oscillants,
    Pièces porcelaine colorées s’agençant
    Formant improbable le chemin 
    Fragmentaire, chemin inavouable 
    Conduisant vacillants les pas 
    Tremblement des cœurs porcelaines
    Vers ces instants fébriles, fragiles
    Ces chers instants colorés marquants
    Instants savourés sur chemin mosaïque 
    Inachevé chemin en mosaïque vers toi

     

     

  • Nouveaux-Délits « revue de poésie vive » # 73 - Octobre 2022 par Didier Trumeau

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    Commencer un Nouveaux-Délits est toujours un plaisir immense. Nulle exception, et la surprise vient simplement de la forme car le fond je le sais sera de haute volée. Voyez l’édito de Cathy qui propose un aperçu réaliste de la situation actuelle même pas agressif avec les hurluberélu-e-s qui mériteraient pourtant une sévère remontrance eut égard à leur inaction irresponsable, du moins à leurs actions totalement responsables… Mais aussi montre le chemin que tout le monde connait, et qu’il tient à chacun d’emprunter, pour que le monde permette la vie à tous, durablement… Les mots n’y suffiront pas et pourtant les dire, les écrire, les répéter, les réécrire, finiront bien par trouver l’oeil clairvoyant et l’oreille attentive. Le papier est toujours plus cher, et cela correspond bien à l’idée que je me fais du papier, papier cadeau pour recevoir et envelopper les mots, pour recevoir et développer toutes les histoires du monde, celles passées, d’aujourd’hui et à venir, pour recevoir le savoir et permettre au plus grand nombre d’y avoir accès… Le papier une matière exceptionnelle - je n’aime pas le mot noble - et sans doute plus pérenne que le média numérique… Un Nouveaux-Délits se présente toujours sous son écrin vieux rose suranné et précieux. Cela peut sembler fade et au contraire il y a dans cet aspect d’un autre temps une sensation de douceur, de paix et d’hospitalité, une invitation à ouvrir l’ouvrage, et d’être à la maison. Pour ce numéro, c’est Corinne Pluchart qui illustre de ses traits, ciselure et collages, les pages en papier recyclé comme la couverture. C’est à la fois énigmatique et végétal. Pour une fois Nouveaux-Délits ne se contente pas - et ne se contente jamais !!! - de nous offrir de la pure poésie avec ses Yvan Robberechts, Kiko Christian Moroy, Alain Guillaume, Isabelle Garreau, mais avec Thierry Desbonnets nous propose - en plus de deux poèmes, des réflexions profondes dont la portée humaniste doit sembler une lapalissade aux bienpensants, font mieux que moraliser, et rappelle précisément et simplement l’idéal soignant, l’idéal humaniste. Georges Cathalo avec ses uppercuts y va aussi de sa vision de notre monde désincarné, et la puissance de la conscience devrait (ré)conforter ceux qui doutent et désespèrent. Et ses poèmes dédiés sont à la hauteur de l’ensemble de Nouveaux-Délits. Petite auto-promo - qui le ferait sinon ? - pour parler du dernier recueil de Cathy Garcia Canalès « Calepins Voyageurs » qui nous parle de son parcours dans le milieu du spectacle de rue, et c’est bien entendu essentiel pour ceux qui ne se contentent pas de rêver mais en plus concrétisent. Et toujours ces extraits pointus, et ces citations magnifiques pour compléter, Nouveaux-Délits. Voilà !!! 

     

    Le 14-11-2022

    Didier Trumeau

     

     

     

  • Soliflore 123 - Pierre Théobald

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    auteur inconnu

     

     


    ÉLEVAGE SAUVAGE

    Mâles castrés, oreilles coupées :
    Mise en préparation !
    Queues tranchées, becs meulés :
    À vif, ces amputations !
    L’animal est maintenant prêt :
    Apte à la production !
    Ces centimes font rendement :
    Voilà la croissance !
    Performer pour l’amortissement :
    Objectif finance !
    L’animal, déjà mis en aliment :
    Performance !

     

     

     

  • Soliflore 122 - Dorothée Coll

     

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    illustration originale de Philippe Chevillard

     

     

    Le cuir

    Le cuir de nos amours
    exhibe ses entailles
    Je passe la main sur les blessures, les cicatrices
    imprime sur ma peau la dentelle des bords 
    Empreinte des remords

    On s’étripe, on s’éviscère
    nos lignes de conduite s’écrivent à cœur ouvert
    Transparence des ruisseaux de sang
    qui zigzaguent entre les rochers

    Les patrons de nos deux corps mal ajustés
    attendent qu’un couturier fantasque
    les drape d’un tissu moiré
    et les faufile de blanc
    que les coutures apparentes
    guident les petits poucets
    que nous étions, souviens-toi, avant de nous égarer

     

     

     

  • Soliflore 121 - Sacha Zamka

     

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    Nuée - photo de l'auteur - 2022

     

     

    arbres

    une seule injustice et c’est celle de naître
    les siècles sont figés les heures sont inertes

    arbres nous revenons à ceux de la genèse
    que sommes-nous ? un corps que la souffrance innerve
    l’aube n’est rien de plus que de l’imaginaire
    nous dormons regard givre et nous rêvons yeux neige

    dérivons-nous sur une ou bien plusieurs planètes ?

     

     

     

     

     

  • Nouveaux Délits n°73

    MESSAGE IMPORTANT ! Pour celles et ceux qui ne le savent pas, le prix du papier a littéralement explosé : 60 % d'augmentation et pour ce qui est des "délits buissonniers" (comme mes propres livres en autoproduction), le papier est beaucoup plus cher entre autre parce qu'il doit être de qualité pour les illustrations mais aussi parce que ce sont de vrais livres. Avec ça, j'ai toujours utilisé du papier recyclé, encore plus cher donc et de plus en plus rare (comme les fabricants) par un souci d'éthique que je n'abandonnerais pas. Je n'ai pas répercuté cette hausse spectaculaire sur les prix, pas plus que je n'avais répercuté celle des frais postaux mais aussi de l'encre et même de l'imprimante que j'ai dû changer l'hiver dernier en tombant en pleine pénurie mondiale d'imprimantes (!!!?). Comprendre : il faut acheter la gamme bien au-dessus et vite avant qu'il n'y en n'ait plus non plus... Encore un pas, et ce sera tout simplement impossible de continuer, alors comment dire ? Ben tout simplement : abonnez-vous, achetez des livres, soutenez la création et les producteurs indépendants tant qu'il en est encore temps ! Merci ❤

     

    ***

     

     

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    Adepte pratiquante depuis longtemps de la secte des décroissants, alias les khmers verts et autres terroristes en herbe de la simplicité joyeuse et volontaire, je ne devrais que me réjouir du très soudain engouement des zélites pour la sobriété… Enfin, pour notre sobriété, à nous les gens très zordinaires. Un bon nombre d’ailleurs n’a pas été consulté pour être énergétiquement et financièrement sobres depuis longtemps ou toujours — et le picrate bon marché pour l’oublier ne dira pas le contraire. Je dois avouer que je perds vite mon calme devant les énormités proférées actuellement (déjà que…), ce qui est mauvais pour mon évolution spirituelle.

    L’art du greenwashing n’a d’égal que celui du brainwashing… et autres anglicismes à la mode (and God took the queen !). En mai dernier, je tapotais sur mon clavier : « Hier j'ai entendu à la radio le terme "écologie pragmatique" sans doute en opposition avec une écologie qui serait utopique, l'un et l'autre ne veulent strictement rien dire, comme 95 % de ce qu'on entend actuellement venant des "autorisés à parler", civilisation du blablabla aux multiples méfaits (…). J'ai souvent eu honte de faire partie d'une espèce qui se laisse ainsi mener par le pire d'elle-même et par ses roquets en chef et qui en redemande de l'hypnose séductrice d'influences en tout genre — et surtout du plus mauvais — mais là ça devient irrespirable. Pour moi il n'y a plus de judicieuse radicalité assez radicale pour stopper cette folie et elle sera de toutes façons étouffée, écrasée par ce besoin de continuer encore et encore à sucer tout ce qui est suçable, à pomper ce qui est pompable. Nous sommes toutes et tous complètement incohérents ! (…) J'ai toujours au fond de ma poche un peu de poudre de perlimpinpin d'espoir — pas de celle qui se jette aux yeux, plutôt celle à diluer jour après jour dans la citerne grise du découragement  — l’espoir que quelque chose va faire ding ou bing ou clash soudainement et en même temps dans la tête de chacun-e d'entre nous, partout sur cette planète ! Et je dois dire qu’un certain nombre de personnes, et notamment des jeunes, mettent de la couleur dans ma poudre mais je n'oublie jamais que des hurluberlus de notre espèce sont bien plus (ir)responsables que d'autres : ceux et celles qui se prennent pour des hurluberélu-e-s pour toutes sortes de déraisons et puis nous autres habitants des pays qui se gavent depuis des siècles, des millénaires même » et je finissais ce coup de gueule trop long pour le mettre ici par « Nous n'avons plus beaucoup de temps et toutes celles et ceux qui ont compris depuis trop longtemps déjà sont fatigué-e-s de tenir la torche allumée, vraiment, je peux le voir, l’entendre et moi-même à ma propre mesure et déception après déception, je n’en peux plus. Alors voilà, aujourd'hui même, tout ce qui nous tue, tout ce qui tue, oppresse, manque de respect à cette planète et à toutes les formes de vie doit tomber, aujourd'hui même, maintenant, là, de suite !!! »

    Et bien ce sera là mon édito pour ce numéro d’automne !

     

     

    Ne leur pardonnez pas. Ils savent ce qu'ils font.

    Claire Séverac (1948-2016)

     

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    AU SOMMAIRE

     

     

    Délits de poésie : Yvan Robberechts ; Kiko Christian Moroy ; Alain Guillaume & Isabelle Garreau avec des extraits de Manière noire

     

    Délit de bonté : Thierry Desbonnets, deux poèmes & des réflexions profondes

     

    Délits pluriels : Georges Cathalo avec quelques uppercuts tirés Des pluriels plutôt singuliers & cinq nouveaux poèmes dédiés

     

    Délit d’autopromotion pour les Calepins voyageurs et après ? – Tome 1 de Cathy Garcia Canalès, paru en juillet dernier

     

     

    Délits d’(in)citations, petits plombs légers au coin des pages, la chasse est ouverte, ici il n’est question que de nourrir l’esprit et non point tuer. Vous trouverez le bulletin de complicité au fond en sortant qui résiste bravement (ou en totale inconscience) à l’inflation, poil au fion !

     

     

     

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    Illustratrice : Corinne Pluchart

     

     

    Je ne crois pas à un effondrement spectaculaire et brutal, du jour au lendemain. Et je me tiens en retrait de la mouvance "collapsologue", que je respecte pourtant. Il n’en demeure pas moins qu’il est effectivement incontestable qu’une catastrophe est en cours. Ce n’est plus une crainte, c’est un bilan : 60 % des animaux sauvages ont disparu en 40 ans.

    Posons-nous une question amusante : sur des échelles des temps géologiques, l'humain laissera-t-il une trace ? Un scorpion-géologue, dans 100 millions d’années, pourra-t-il savoir que nous avons existé ? Naturellement, toutes nos constructions seront balayées : des cathédrales aux usines, il ne restera rien. Et pourtant, il y bien un signe qui marquera le passage des humains sur Terre : la 6e extinction massive. On verra, par les fossiles, que la vie a soudainement périclité sans aucune cause géologique ou météoritique. Voilà la trace que nous laisserons sur notre planète : un anéantissement vertigineux du vivant.

     

    Aurélien Barrau

     

     

    Copie de IMG_20220806_152514.jpg

     

     

     

     

     

  • La cloche a sonné d'Aline Recoura, délit buissonnier n°6

     

     

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    Délit buissonnier n° 6 sorti le 1er juillet 2022 !



    *


    elle dit non à l’institution
    on lui reproche son manque de travail d'équipe
    ça dégénère dans sa tête
    elle comprend qu’on lui demande de pallier
    toutes les incompétences et défaillances
    elle est coincée
    on lui parle de professionnalisme
    de laisser ses émotions de côté
    quand pendant deux ans tout le monde semblait
    ravi que la maîtresse sorte des cadres affectifs
    donne à la petite fille ce qu'elle ne trouvait nulle part d'autre
    tout le monde semblait content d'avoir la paix
    de cette petite fille comprise au moins par une personne
    la maîtresse
    c'est pour ça qu'elle décide de changer de métier


     *


    illustrations originales de Ludo Godot
    tirage numéroté
    56 pages agrafées
    imprimé sur papier Keaykoulor calcaire

    100 g & 250 g 100 % recyclé

     
    10 € +3 € de port, à commander à
     l’Association Nouveaux Délits

     

     

     

  • Avis de parution : La cloche a sonné d'Aline Recoura, délit buissonnier n° 6

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     Sortie le 1er juillet 2022 !

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    clique sur l'image pour voir de près

     

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    Cette petite fille n’avait de mot 

    que le prénom de sa maîtresse

    qu’elle a eu en maternelle

    pendant deux ans

    en CP la nommant encore et toujours

    quand on lui demande qui est ta maîtresse

    l’institution décide de la faire retourner en maternelle

    quelques heures par jour

    la maîtresse est toujours là

    la maîtresse vit très mal

    tombe malade

    elle adore cette petite fille

    elle pleure son abandon 

    elle pleure chaque jour quand à la sortie de l’école

    la petite fille lui saute dans les bras et la serre tellement fort

    elle dit non à l’institution

    on lui reproche son manque de travail d'équipe

    ça dégénère dans sa tête

    elle comprend qu’on lui demande de pallier

    toutes les incompétences et défaillances

    elle est coincée

    on lui parle de professionnalisme

    de laisser ses émotions de côté

    quand pendant deux ans tout le monde semblait

    ravi que la maîtresse sorte des cadres affectifs

    donne à la petite fille ce qu'elle ne trouvait nulle part d'autre

    tout le monde semblait content d'avoir la paix

    de cette petite fille comprise au moins par une personne

    la maîtresse

    c'est pour ça qu'elle décide de changer de métier

     

     

     

    *

    L'auteur :


     

    Lire et écrire ses passe-temps favoris (en dehors des heures de son métier de professeur des écoles). Depuis janvier 2022, directrice de rédaction de la revue Cabaret. Elle a publié en 2020, Banlieue Ville à La Lucarne des écrivains et en 2021, Scènes d'école au Lys Bleu et Cardio Poèmes aux éditions du Petit Rameur. À paraître : Pichenette dans les mots aux éditions Gros textes et Nuages dans le sang aux éditions de La Lucarne des écrivains en 2022. Elle contribue à de nombreuses revues papier de poésie (Comme en poésie, Cabaret, HS 7, Traction Brabant, Les amis de Thalie, Les Impromptus, Décharge, Traversées, Nouveaux Délits, Météor, Verso, FPM, L’Intranquille, Maux à mots, Wam, L'Air de rien…) et numériques (Cosaque des Frontières, Lichen, Behigori, Capital des mots & Hors-série n°6 de la revue Cabaret : 40 jours 40 vies, 2020) et des anthologies (On dit Cap, Ad Vitam Aeternam, Voix des îles). Elle dit régulièrement ses poèmes sur scène et est membre du collectif Contre Silence.

     

    *

     

     

    illustrations de Ludo Godot

    tirage numéroté

    56 pages agrafées

    imprimé sur papier

    Keaykoulor calcaire 100 g & 250 g

    100 % recyclé

     

    *

     

    10 € +3 € de port,  à commander à

     l’Association Nouveaux Délits – Letou – 46330 St Cirq-Lapopie

     

     

    Délits buissonniers

    est une collection de tirés à part

    de la revue Nouveaux Délits

     

    Vous pouvez lire Aline Recoura

    dans le numéro 67 (octobre 2020)

     

     

     

     

     

  • Revue Nouveaux Délits - Numéro 70 (extraits)

     

    Quelques extraits de ce numéro 70 sorti en octobre 2021, avec des poèmes de Liliane Birsinger, Chiara Pastorini, Christine Bouchut, Narki Nal et Cathy Garcia Canalès, des extraits tirés des extraits publiés du recueil "Cheese !!!" de Gorguine Valougeorgis, sorti depuis chez Plaine Page (déc. 2021) et un extrait de la nouvelle de Julien Englebert, "La bague noire". L'ensemble lu par Cathy Garcia Canalès.

     

     

  • Et pourquoi moi je dois parler comme toi ? écrits bruts (et non bruts) réunis par Anouk Grinberg

    Le Passeur éd. 15 octobre 2020

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    256 pages, 20,90 €.

     

     

    C’est en puisant, entre autres, dans la Collection de l’Art brut de Lausanne  que la comédienne et artiste peintre Anouk Grinberg a pu rassembler tous ces écrits, dits bruts car écrits par des personnes internées et considérées comme démentes ou délirantes. Des écrits souvent dessinés aussi car un bon nombre d’entre eux font l’objet d’un graphisme très particulier et c’est pourquoi on trouvera aussi dans cet ouvrage des photos de ce qui forme une œuvre brute complète.

     

    Anouk Grinberg a une histoire avec la folie, avec celle de sa mère dont elle a eu peur et même honte : « Je ne l’ai pas aimée, je n’ai pas réussi. J’étais de la famille humaine qui se détourne. ». Ce livre est sa façon de réparer : « Par un grand détour, ce sont ces hommes et ces femmes qui m’ont conduite vers cette mère, cette femme, et si j’ai négligé de son vivant toutes ses lettres affamées, je suis heureuse aujourd’hui d’être passeuse de textes jamais lus ». De cette mère, elle dit : « Ma mère était comme ça. Une petite femme fine, intelligente, mal adaptée à la vie bourgeoise. Elle aurait voulu peindre, et elle a été mère, épouse. (…) Elle n’a pas su dire non à la famille qui faisait une croix sur ses désirs, elle n’a pas su dire oui à la petite voix qui devait lui parler tout bas, et elle est descendue marche après marche dans le malheur, comme dans un refuge où on n’irait plus la chercher. On l’a mise dans des endroits pour fous, le désespoir a prospéré avec sa litanie de délires, alors qu’elle était une lumière sur la terre ». Alors, Anouk Grinberg dédie ce livre « à tous ces lumineux que le monde ne doit pas oublier. » Il ne s’agit pas de faire une anthologie d’écrits de fous mais de montrer plutôt la valeur littéraire de ces écrits, qui « ont inspiré les surréalistes et d’autres auteurs reconnus qui se sont fouillé les méninges pour atteindre leur liberté. »

     

    On ne sera pas surpris donc, de trouver aussi dans ce livre des écrits dit non-bruts, des écrits de poètes, car qui d’autre qu’eux s’approche le plus de cette forme d’indécente liberté ? D’ailleurs deux d’entre eux — et on note par ailleurs ici la curieuse absence d’Artaud — comme Paul Éluard ou Tristan Tzara, ont trouvé refuge durant la guerre, l’un en 1943, l'autre en 1945, à l’hôpital psychiatrique de Saint-Alban-sur-Limagnole en Lozère où furent internés deux auteurs bruts figurant dans ce livre.

     

    La préface a été rédigée par Jean-Pierre Siméon dans laquelle il nous dit : « Les fous, donc, prétendument les plus dénués d’entre nous (ou faudrait-il dire les plus dénudés ?), ont ce talent inouï, et que l’on ne dira qu’avec prudence involontaire, de s’affranchir absolument des lois de la langue et de nous révéler en conséquence dans la langue même cet absolument impossible de la langue dont rêvent les poètes, mais que leur raison sociale empêche généralement d’assumer jusqu’au bout. »

     

    Et pourquoi moi je dois parler comme toi est donc « un livre sur la vie et la création, non sur la folie. » Si les fautes d’orthographe et la ponctuation n’ont pas été retouchées, certains passages ont cependant été volontairement coupés car trop incompréhensibles. Les auteurs de ces écrits bruts sont nés entre 1827 et 2005, mais plus spécifiquement au XIXe et XXe siècle. On trouvera une photo et une courte biographie pour chacun d’eux, mais une partie sont des textes anonymes, les auteurs n’ayant laissé aucune autre trace de leur passage sur terre.

    « (…) dans nos sociétés riches et prétentieuses, ce trop-plein d’antennes est sévèrement puni. Les sans-fard inspirent la honte et le mépris, alors ils fanent ou enragent, et c’est le début de l’enfer. On les met dans des hôpitaux, on les force à manger des médicaments pour les remettre droit, on leur enlève la parole puisqu’ils parlent mal la langue de papa et maman, on leur enlève leurs droits, parfois leurs noms. » nous dit Anouk Grinberg dans son prologue.

     

    Écrits compulsifs, écrits rageurs, écrits du désespoir et de la privation de liberté, mais aussi tentatives de communication, de tresser une passerelle entre des réalités qui s’entrechoquent. Des êtres humains « enfermés dans un faisceau de malentendus », comme si leur pensée, leur vision étaient erronées alors que, bien souvent, ils ont été surtout broyés par les conditions de leur existence quand ils n’ont pas été tout simplement et violemment mis à l’écart, parce qu’ils gênaient l’ordre et la raison établis ou bien considérés socialement comme définitivement idiots parce qu’incapables de contacter le monde extérieur comme ce fut le cas pour Babouillec, autiste sans paroles, diagnostiquée comme très déficitaire et qui n’a jamais appris à lire, écrire et parler et qui est auteur de plusieurs livres, grâce à sa mère qui l’a sortie des institutions spécialisées et a fini par trouver le moyen de communiquer avec elle, lui permettant ainsi de révéler et diffuser son génie littéraire et ses pensées dont l’acuité et la pertinence sont absolument jubilatoires.

     

    La postface de Sarah Lombardi, directrice de la Collection de l’Art Brut de Lausanne donne un éclairage sur l’origine et l’histoire des écrits issus de cette collection dont certains ont déjà été publiés précédemment et mentionne les personnes, médecins ou autres, qui s’y sont intéressés, non pas d’un point de vue pathologique mais sur le plan du processus créatif.

    Pulsion d’écrire, pulsion de vivre : de crier, défier et même rire et aimer dans le silence carcéral, que ce dernier soit imposé de l’intérieur ou de l’extérieur. Un bon nombre des textes publiés ici donnent envie justement de les lire à haute voix, ils ont quelque chose de théâtral, entre comédie et tragédie, le grand théâtre de la vie. Certains sont des pieds de nez au dogme de la normalité, d’autres sont peut-être bien trop en avance sur leur temps, d’autres encore font mal car ils sont paradoxalement des appels au bon sens de celui qui les lira… Beaucoup sont des blessures ouvertes qui débordent sur le papier et des flux de douleur qui frayent un chemin vers la lumière. La poésie est très souvent au rendez-vous.

     

    « Veuillez dire à ce langage

    Qu’il dise qu’il est là

    C’est une prière

    La vie ne peut pas vivre »

    Constance Schwartzlin-Berberat (1845-1911)

     

    Un ouvrage précieux qui, espérons-le, permettra de porter un autre regard sur ce que la société nomme trop facilement des folles et des fous.

    « Alors que la vie elle-même est démente, qui de nous peut dire où se trouve la folie ? Trop de bon sens, n’est-ce pas aussi de la folie ? (…) Et la folie suprême n’est-elle pas de voir la vie telle qu’elle est et non telle qu’elle devrait être ? » avait écrit Cervantès.

     

    Cathy Garcia Canalès

     

     

    dsc-0613.jpgAnouk Grinberg est née à  Uccle (Belgique), le 20 mars 1963. Fille du dramaturge Michel Vinaver, elle fait ses premiers pas sur les planches dès l'âge de 12 ans dans Remagen mis en scène par Jacques Lasalle. Malgré quelques apparitions au cinéma à partir de 1976, la jeune fille se consacre avant tout au théâtre et commence parallèlement des études d'ethnologie. Après quelques rôles secondaires la comédienne rencontre Bertrand Blier qui la révèle au grand public et dont elle devient la muse. Ils tournent trois films ensemble avant de se séparer : Merci la vie (1991), Un, deux, trois, soleil (1993) et Mon homme (1995). Malgré deux beaux rôles dans Un héros très discret de Jacques Audiard (1995) et Disparus de Gilles Bourdos (1997), Anouk Grinberg espace ses apparitions au cinéma. Elle se consacre au théâtre mais également à la peinture et à l'écriture.

     

     

     

     

  • Nouveaux Délits n°72

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    Il y a des poètes voyants, des poètes pythies, des poètes monstres qui reçoivent en flots continus des données qui — s’ils ne trouvent moyen de les transcrire — peuvent les submerger, les rendre fous. Le flux est tel que la respiration elle-même ne trouve plus sa place, un essoufflement comme une transe dans laquelle tout lecteur sera emporté car il n’aura rien à quoi s’accrocher. Des eaux tumultueuses mais pas glaciales, car le feu ardent de la poésie brûle sans interruption. Possédée, incantatoire, opératoire, comme le chaman qui souffle sa fumée sur le corps du malade. Ici lecteur, c’est toi le malade. C’est nous. C’est l’humanité.

     

    Ce genre d’écriture n’est pas à la mode, on l’a dite maudite, elle fait peur, elle inquiète, elle dérange les conforts, agresse les quiétudes organisées, fait sauter les verrous, les défenses, donne le vertige, la nausée, touille nos tripes sans permission. Elle puise à la source même du Verbe tout autant ravageur que créateur. Pauvre poète traversé et sommé de délivrer le message, c’est un écartèlement permanent : s‘il se tait, il devient fou ; s’il parle, on le prend pour un fou. Ce poète est excessif et peu vendeur, on préfère attendre quelques siècles avant de le lire. Pourtant, il voit là où nous sommes aveugles et ce qu’il voit le foudroie, le brutalise : la laideur sans fard, ni masque, la lumière aussi éblouissante que crue, la beauté qui renverse et les ténèbres sans sas de protection. Il ressent vivement là où nous sommes commodément désensibilisés, il se souvient de ce qui est effacé par nos amnésies quotidiennes. Il entend l’effroi, l’écho du gouffre. Il sait ce que nous étions et ce que nous deviendrons si nous ne nous rappelons pas ce que nous sommes.

     

    Il sait et il ne sait rien. Il est l’ignorant qui ne peut jouir de son ignorance, il est parcouru, pénétré, transpercé de toute part et chaque mot qui passe par lui est un trou par où nous pourrions apercevoir une fraction de la réalité originelle.

     

    Il a appris cependant depuis le temps que ce torrent le traverse, le retourne, le traîne, le broie et le suffoque, à prendre appui dans l’œil des vortex, à trouver des points d’accroche, l’issue en soi incessible. Il est un vivant mort autant de fois qu’il aura fallu pour se dépouiller jusqu'à l’os, voir son âme nue et il nous tend la main, grimpeur aguerri aux chutes, il nous désigne une brèche par où se hisser. Il partage ses visions, se fait conteur, éclaireur, compagnon.

     

     Il y a un sens à trouver à tout ce que nous vivons ou craignons de vivre : il s’agit de guérir. Et le poète-guérisseur trace des chemins de mots comme autant de formules pour briser les maléfices. Du latin malefacio : faire du mal.

     

    CGC

     

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    AU SOMMAIRE

     

    Délits de poésie :

     

      • Anne-Marie Bernad

     

      • Jérémy Semet

     

      • Vincent Calvet : Naître au Mystère (extraits)

     

      • Odile Steffan-Guillaume : Les Yeux du sablier (extraits)

     

      • Stéphane Mongellaz

     

      • Perle Vallens : Journey (extraits)

     

      • Michel Woelffle : Contes et poèmes d’un été perdu et 71ème hiver (extraits)

     

     

    Résonance : Et pourquoi moi je dois parler comme toi ? écrits bruts (et non bruts) réunis par Anouk Grinberg, Le Passeur éd. 15 octobre 2020.

     

     

    Les délits d’(in)citations continuent à germer au coin des pages. Vous trouverez le bulletin de complicité peut-être un peu sombre et agité à la sortie, le contexte n’est pas à la fête… Merci infiniment pour votre soutien !

     

     

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    Illustratrice : Shenandoah Allheilig-Rivet

     

    https://www.instagram.com/shenandoah.allheiligrivet/

     

    Artiste plasticienne, passionnée depuis son plus jeune âge, bercée par une multitude d'influences culturelles, elle poursuit aujourd'hui son parcours nomade, mêlant rencontres et créativité, échanges et idées nouvelles. Son travail, s'articulant notamment autour du dessin, s'élargit également à d'autres formes d'expressions et formats (peintures, collage, sculptures, photographie, récup'art, customisation d'objets, Land art).

     

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    « Je suis ici pour vous parler de singe à singe. Une cinquantaine de bombes thermonucléaires suffisent à détruire l'humanité. Familièrement appelées bombes atomiques. Mais il n'y a pas cinquante bombes atomiques dans le monde. Il y en a quinze mille.

    La question est donc la suivante : si cinquante bombes atomiques suffisent à anéantir l'ennemi et même l'ami, pourquoi en avons-nous construit quinze mille ?

    Il n'y a pas de réponse rationnelle. Même la logique de guerre la plus cynique ne peut justifier un tel gaspillage inutile.

    Si nous étions au bar entre amis, je vous dirais : c'est la preuve que nous, en tant qu'espèce, ne sommes pas seulement mauvais. Nous sommes aussi des couillons.

    Mais s'il y avait un psychanalyste dans le bar, on pourrait aller un peu plus loin : il expliquerait que cette accumulation démesurée est une forme de collection. En psychanalyse, le collectionnisme est étudié comme une perversion.

    En 1955, Albert Einstein et Bertrand Russel ont rédigé un appel au désarmement signé par une douzaine de lauréats du prix Nobel. Il disait : "Nous vous demandons, si vous le pouvez, de mettre de côté vos opinions et de raisonner simplement comme les membres d'une espèce biologique en danger d'extinction".

    Le mot le plus audacieux, le plus utopique de la phrase que je viens de vous lire est l'emploi du verbe "raisonner". Je ne pense pas que ce soit à notre portée. »

     

    Michele Serra, journaliste italien

     

     

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    Revue Nouveaux Délits – Avril 2022 ISSN : 1761-6530 Dépôt légal : à parution – Imprimée sur papier recyclé et diffusée par l’Association Nouveaux Délits  Coupable responsable : Cathy Garcia Canalès Illustratrice : Shenandoah Allheilig-Rivet Correcteur : Élisée Bec

     

     

     

     

     

     

     

  • Soliflore 120 - Thierry Delhourme

     

     

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    ©Gil Goulpié

     

     

     

    L’ombre épousant la lumière

     

     

    Bienvenue à l’enfant que je n’aurai jamais

    il court déjà dans les herbes folles

     

    Bienvenue au futur de mes amis

    pour eux j’avais le désir de naître

    sous leurs sabots aux pointes givrées

    c’était un désir sans volonté ni rituel

    avec juste la transparence à mon seuil

    mes visions fraîches comme pains de l’aurore

     

    Bienvenues les femmes de pailles et d’or

    dont j’envie la flamme dressée

    chaque nuit pour réparer le monde

     

    Idem les funambules et jongleurs qui brisent

    la roche pour en sucer l’âme

    ils sont guetteurs de joies ravaleurs de mensonges

    et bien plus nombreux les yeux dans le dos

    que dans nos chansons nos aventures humaines

     

    Alors comment allons nous dire

    l’odeur de la fête qui frappera tantôt

     

    Peut-être

     

    Bienvenue la chose hantée en sa pure merveille