Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

LA REVUE NOUVEAUX DÉLITS - Page 4

  • Soliflore 99 - Adeline Raquin

     

    Adossée à la nuit Adeline Raquin ok.JPG

    ©Adeline Raquin

     

    Adossée à la nuit

     

    Dans la bolge du souvenir,

    cris d'airain qui te hèlent,

    cris d'hommes aux yeux fins,

    poumons forts et cris d'acier.

     

    Dans la bolge du souvenir,

     

    claquent les rires qui rident la surface des flaques d'échos enlacés.

     

    Au fond de la caverne aux parois brunes,

    le bois imputrescible se met à flotter,

     

    témoin noir, témoin plein, témoin sage des temps passés.

     

    Mais regarde,

    regarde le jour qui résonne des nids étales des alouettes.

     

     

    À plat, face au ciel brûlant, l'oiseau, bec ouvert, fait bruire les herbes sèches.

    Mais regarde, le mulot qui ventre à terre défend son être, qui ventre à terre remue la terre, la fait tourbillonner en poussière sous la charge du vent.

     

    C'est là,

    face au vide,

    les yeux piqués dans le ciel qu'il faut se tenir.

    C'est là,

     

    le dos encore engourdi par l'haleine fraîche des morts, le corps ouvert à l'air sifflant,

    que dans la fixité du ciel, la lumière viendra déposer son lit de cendres irradier ta pénombre, jusqu'à t'en rendre les yeux blancs.

     

     

     

  • Soliflore 98 - Virginie Seba

     

    20200722_095355.jpg

    photo de l'auteur

     

     

     

    DEVENIR TROU


    Faire des trous
    Remplir des trous
    Boucher les trous
    Changer de trou
    Fuir les trous

    Découper des trous
    Compter les trous
    Vider les trous
    Trier les trous
    Alimenter les trous
    Surveiller les trous
    Balader les trous
    Fleurir les trous
    Arroser les trous

    Parler aux trous
    Soutenir les trous
    Applaudir les trous

    Vendre des trous
    Acheter des trous
    Échanger des trous
    Trouver le meilleur trou
    Penser :

    c’est un bon trou
    L’adopter
    Faire son trou

    Filmer les trous
    Jouer comme un trou
    Admirer les trous
    Encenser les trous
    Adorer les trous
    Embrasser les trous
    Lécher les trous

    Gratter les trous
    Curer ses trous

    Virer les trous
    Déloger les trous
    Casser du trou

    Ramasser des trous
    Offrir des trous

    Rencontrer des trous
    Planifier des trous
    Engendrer des trous
    Éduquer les trous
    Dompter les trous
    Graisser les trous
    Tromper les trous


    Tomber dans le trou
    Voir le fond du trou
    Sentir le trou
    Parler le trou
    Avaler des trous

    Devenir trou

     

    https://www.slamchante.fr/


     

     

  • Soliflore 97 - Julie Cayeux

    Dessin de Camille Moukli-Pérez.jpg

    © Camille Moukli-Pérez 

     

    Un amour de jeunesse

     

    Mon premier amour s’appelait Croûte.

    Il n’était pas méchant, seulement il me grattait.

    Il me grattait la vie, il me grattait l’amour, il me grattait jusqu’à la nuit.

    Arriva ce qui devait arriver.

    A force de me gratter, Croûte est devenu une plaie.

    Une plaie purulente, dont je n’arrivais pas à me débarrasser.

    Je ne le souhaite à personne.

    Il me chantait des sérénades.

    Veux-tu fermer ta gueule ? je lui répondais sèchement.

    Je ne sais pas ce qu’il est devenu, ce brave Croûte.

    Tout ce que je puis vous dire, c’est que depuis nos différends,

    dès qu’un amour me gratte, je disparais.

    La fuite reste encore le moyen le plus efficace de se prémunir des plaies.

     

     

     

  • Soliflore 96 - Romain Richard

    spilliaert-6623-l.jpg

    Léon Spilliaert, "Arbres, blanc et noir" (1941)

     

     

    Il y a trop

      

    Il y a trop

    Il y a ces arbres monstrueux

    Qui m’observent la nuit

    De leurs yeux grands ouverts

    Qui m’observent de haut

    L’air sévère

    Et moi qui suis petit

    Si petit

    Ramassé

    Tête au sol

    Interdit

    Étranger 

    Importun

    Déplacé

     

    Moi tout seul dans le noir

    Où les formes enfouies

    De l’esprit

    Me découpent un monde

    Inhumain

    Moi de trop comme humain

    A l’heure où sont les choses

    Où l’être n’est personne

    Où gagne la matière

    Où je ne suis plus moi

    Où rien n’est plus que masse

    Insignifiante masse

    Au regard impérieux

    De ce qui n’a pas d’yeux

    Et l’esprit

    Quand le noir le libère

    De ce qu’il reconnaît

    S’abandonne à ses affres

    Tenté par l’ombre d’y plonger vers le grand fond

    Son propre fond qu’il craint

    Son fond qu’il réalise 

    A mesure

    Qu’il n’ose le trouver

     

    Mais aussi

    Il y a la lumière

    Qui grouille de matière où le regard s’épuise

    De ne pouvoir l’épuiser elle

    Il y a ses grands yeux si perdus

    Qui me jouent me délaissent

    Et puis m’aiment

    Et son cou frêle au point que paraît lui peser

    Une tête elle-même si frêle

    Un visage si fin si joliment tourné

    Un petit nez troussé

    Puis sa bouche au dessin plus parfait

    Que celui des grands Maîtres

    Une lèvre infinie que pourtant

    Un menton délicieux

    Ponctue de sa virgule

    Mais il y a trop encore

     

    Un constant sentiment d’être pauvre

    Le savoir humilié

    L’esprit insuffisant

    Faillant toujours à ses amours

    L’harmonie du présent

    Déborde tous mes sens

    A plus forte raison mon esprit qui l’admire

    Perdant de l’impression tout ce qu’il veut en dire

    L’harmonie du présent

    Excède la caresse

    Que lui portent mes mots

    Jamais ils ne pourront

    L’aborder que de loin

    Jamais ils ne sauront

    L’embrasser tout entier

     

    Alors mes yeux s’épuiseront à voir

    Mon nez à respirer

    Mon oreille à entendre

    Tout mon sens à sentir

    Ce que rien ne peut dire.

     

     

     

  • Soliflore 95 - Cédric Landri

    Photo ours polaire.jpg

     

    Une déchirure dans le vêtement planétaire,

    déchirure entre les espoirs les couleurs les flirts

    et les disparitions dans les écumes du temps

    de tants d'espèces.

     

    Le sang coule à flots sur la plaine béante,

    tandis que des volcans éternuent des plastiques

    dans le ventre des océans.

     

    Et au coin du globe crachotant,

    l'ours pôle erre.

     

    Pendant ce temps on visse à la chaîne

    des smartphones qui grillent le pain

    ou des robots qui tombent amoureux.

     

    Au lieu de former

    des infirmiers de la Terre.

     

     

  • Revue Nouveaux Délits numéro 68

    COUV.jpg

     

    Eh bien 2020 est passé comme un éclair, et on se demande bien après ça, qu’est-ce que cette nouvelle année va bien pouvoir nous concocter dans le grand chaudron fou de la vie ? Virus, guerres, comète, suicides collectifs, extra-terrestres, zombies, miracles ? Qu’est-ce qui va encore nous secouer, nous bousculer, nous jeter à terre ? On n’a aucune prise sur les événements extérieurs mais on peut cependant choisir le meilleur en toutes circonstances, aussi infime soit-il. Il n’y a pas que des mauvaises et sombres nouvelles, il y a des jaillissements surprenants, des résurgences de joie, des illuminations bienfaisantes, une créativité fière et indomptée qui se fout des autorisations et s’il y a bien une énergie qui a le pouvoir de transformer le plomb en or, les larmes en sourires, la colère en création, c’est celle de l’amour. L’amour quand on ne lui met aucune barrière, condition, précaution. Lui aussi fait des vagues, des vagues puissantes et douces, qui inondent le cœur, nettoient l’âme et tout se met à briller ! C’est tellement bon, on oublie à quel point c’est bon. Et gratuit ! Aimer ! Rien ne peut nous empêcher d’aimer, ni confinement, ni distanciation sanitaire, ni crise économique, lois liberticides, rien ni personne ne peut nous interdire d’aimer et de nous aimer nous-mêmes aussi. Pas plus que de danser d’ailleurs ou chanter, jouer, rire ! Il ne s’agit pas de faire n’importe quoi et d’emmerder les autres, mais de rester suffisamment souples pour inventer toujours de nouvelles formes d’expression de cette vie qui bat en nous son rythme vivace. Et si les circonstances s’acharnent à souffler sur les flammes, ne jamais oublier que notre flamme intérieure à chacune, à chacun, possède son propre point d'allumage spontané. Alors résister, oui, mais pas comme des bestiaux acculés qui encornent les murs, mais juste comme une évidence – en vie danse ! – parce que nous sommes des êtres fondamentalement libres, potentiellement capables d’aimer avec une force qui pulvérise toute peur, toute sclérose ; la force de l’eau que rien n’arrête, et qui même retenue par de monumentaux barrages, fomente en secret son évasion par le ciel.

    Alors, que l’an 2021 nous guérisse de toutes nos peurs, de tous nos maux et protège la Terre de toutes nos sinistres folies, et soyons souples, forts et porteurs de vie, partout où nous sommes, partout où nous passons, comme une eau aimante !

     

    CGC

     

    Sans titre-9.jpg

    AU SOMMAIRE

     

    Délits de poésie :

     

    Dorian Masson

    Angélique Condominas

    Pierre Thiollière

    Jacques Merceron 

    Pierre Vinclair : Le vivant dans la ville
    Patrick Werstink : Caléfactions (extraits)

     

     

    Résonances :

    La nuit des béguines d’Aline Kiner, éditions Liana Levi, 2017

    Quintet de Frédéric Ohlen, Gallimard, 2014

    Le Tarot de Saint Cirque de Cathy Garcia Canalès et Lionel Mazari, Gros Textes 2020

     

     

    Les Délits d’(in)citations poinçonnent en sifflotant le coin des pages tandis que le bulletin de complicité vous attend avec ses espoirs et ses plus beaux vœux, toujours à sa place, sur la dernière page, mais aussi avec une mauvaise nouvelle vu la nouvelle et forte augmentation des frais postaux : + 11,6 % pour l’écopli qui a donc doublé en 7 ans ! Aussi, pour ce numéro, on va serrer les fesses mais pour celui d’avril, il me faudra répercuter ça sur les tarifs de la revue, qui augmenteront donc pour la troisième fois en 18 ans.

     

    chat noir.jpg

    Illustratrice :

    Cathy Garcia Canalès

     

    Mon imprimante pour la revue, de plus en plus capricieuse, n’aime plus que le bleu pour les images, même en mode n&b, aussi je ne peux plus décemment proposer à d’autres d’illustrer ce numéro et même les suivants, donc c’est la femme-orchestre qui s’y colle, avec plaisir cependant : mes griffonnages et gribouglyphes sont d’accord pour voir la vie en bleu. S’y est glissé un cheval venu de très loin, un des rares dessins que je tiens de mon père, qui s’en était allé cavaler dans les prairies célestes en 1973.

     

    cheval de mon père.jpg

     


    Mais qu'il y ait des espaces dans votre entente.
    Que les vents des cieux puissent danser entre vous.
    Aimez-vous, l'un l'autre, mais ne faites pas de l'amour un carcan :
    Qu'il soit plutôt mer mouvante entre les rives de vos âmes.
    Remplissez, chacun, la coupe de l'autre, mais ne buvez pas à la même.
    Donnez-vous l'un à l'autre de votre pain, mais ne partagez pas le même morceau.
    Chantez et dansez ensemble, et soyez joyeux, mais que chacun demeure isolé,
    Comme sont isolées les cordes du luth, bien que frémissantes de la même musique.
    Donnez vos cœurs, mais pas à la garde de l'autre,
    Car vos cœurs, seule la main de Dieu peut les contenir.
    Et dressez-vous ensemble, mais pas trop près l'un de l'autre :
    Car les piliers du temple se dressent séparément,
    Et le chêne et le cyprès ne peuvent croître dans leur ombre mutuelle.

    Khalil Gibran

    in Le Prophète (1923)

     

     

    002.jpg

     

    *

    Nouveaux Délits - Janvier 202i – ISSN: 1761-6530 - Dépôt légal : à parution - Imprimée sur papier recyclé et diffusée par l’Association Nouveaux Délits - Coupable responsable et illustratrice : Cathy Garcia Canalès -  Correcteur : Élisée Bec         

     

    Sans titre-7.jpg

     

     

        

  • PREUVES INCERTAINES de Jean-Louis Millet, Nouveaux Délits éd., septembre 2020

    En septembre dernier, est sorti un nouveau recueil chez Nouveaux Délits

     

    PREUVES INCERTAINES

    de Jean-Louis Millet

     

    avec 15 illustrations originales de l’auteur

     

     

    txt03b2.jpg

     "Titubant dans l'escalier liquide
    des rails luisants du tram T3,
    un bel ivrogne nommé Désir
    voyage aux portes de la nuit.
    Oiseau nocturne à bec de bois
    il brûle de la grande soif amère
    et mord la pluie,
    une pluie lasse de pleuvoir.
    Sa solitude hirsute transpire
    en mille éclats de visages fatigués
    dans le miroir de l’incognito."

     

    Édité et imprimé par l’Association Nouveaux Délits
    sur papier calcaire 100 g, couverture 250 g, 100 % recyclé

    12 € + 2,50 € de port

     à commander à l'Association Nouveaux Délits

    Letou - 46330 St CIRQ-LAPOPIE

     

     001.jpg

     

     

     

     

     

     

     

  • Soliflore 94 - Pierre Bastide

    Caramelle est une grenade inoffensive. Si on goupille bien son truc, il demeure secret, et on peut la savourer lentement. C’est une transe dans le bouche, d’où son nom Caramelle Mou. C’est succulent.

     

    Évidemment, si on ne fait pas attention, si on veut précipiter le mouvement, elle vous pète à la gueule et vous en prenez plein les dents !

     

     

    1F735006-AD9C-43AC-906F-E4389F1A96EC_1_105_c.jpeg

    Ainsi va la poésie

     à la saillie du cri

    comme une voix sur l’indicible

     

    comme un doigt sur la plaie

    le couvert est mis à l’aveugle

    sur le continent noir de la beauté

     

     

  • Soliflore 93 - Éric Bouchéty

     

    Bouchéty Ciel haut.jpg

    "Ciel haut" - photo de l'auteur

     

     

    À l’heure grave 

     

    À l’heure grave, à l’heure constante,

    Comme aux autres heures passées,

    Maintenant que l’eau ne t’abreuve plus

     

    Que la bouche sèche a épuisé

    Ses grands chemins, ses lieux communs

    Goûtons-nous entre les deux espaces

     

    Tends l’évidence de ta gorge

    Maintenant qu’il n’y a plus de ciel

    Tends-y l’échelle de tes jambes.

     

    Dans l’heure juste, dans l’heure sensible,

    Apprends-moi le désir sagace,

     

    Ce qui nous tient sur le chaos.

     

     

     

  • Soliflore 92 - Clément Bollenot

     

    Tunnel_Perrache_Sylvie_Frénillot.jpg

    ©Sylvie Frénillot - Quartier de Perrache - Lyon

     

     

    le tunnel avale le tram et moi aussi

    les lumières clignotent

    fragiles comme des lucioles

    le serpent de fer rampe mollement

    sur la voie ferrée

    ses yeux jaunes éblouissent la nuit

    je sens les murs vibrer le sol trembler

    et les lettres noires qui se détachent

    des murs ternes salis par la vie

    ACAB

    en ville pas besoin de lire le journal

    ni de regarder la télé

    tout est sur les murs

    ACAB

    les murs se souviennent

    si les images sont interdites

    ACAB

    mon index repasse les lettres une par

    une

    le tram est passé

    sa voix se perd près de la sortie

    et l'œil de la vidéosurveillance

    est braqué sur moi

     

    www.kildaprojet.com

     

     

     

  • Soliflore 91 - Tom Saja

    Kos - Tom Saja.jpg

    photo©Daphné Castreau-Charara

     

     

    Kos

     

    Sable Grec

    Mer Égée

    Embruns de temps immémoriaux

     

    Le soleil renait derrière les montagnes

    De l’ancienne Halicarnasse

     

    Visages salés

    De silhouettes

    Qui veulent vivre

    Ardemment

     

    L’amour ne manque pas

    Mais que le monde en manque

    Immanquablement

     

    Ce monde n’est pas juste

    Et nous sommes nés du bon coté de la mer

     

     

     

     

  • Soliflore 90 - Anne Barbusse

     

    GEDV0009.JPG

     

    on entre dans l’ère des femmes révoltées : le jardin se vêt

    de vignes vierges rouges comme les combats

    et les femmes hurlent le machisme surplombant,

    les coups, les professions perdues pour cause d’amour maternel

    (dans les divorces les pères demandent la garde pour que les mères

    ne puissent pas partir, ils possèdent l’enfant-objet et tu renonces à un poste universitaire)

    l’homme révolté c’est fini

    alors les femmes se lèvent

    elles en ont assez du machisme des pères des maris des maires des chefs

    elles sont #metoo par étouffement, pleurs, abnégations, face aux plantes ravagées

    les femmes opposent les luttes, manifestantes insultées et vivantes

    plus Marianne que le monde détruit, face au béton

    et aux maires, aux conseillers municipaux inamovibles et

    à la démocratie grippée, aux petits chefs ridicules et désuets

    face aux campagnes désertées, aux friches et vignes arrachées

    et aux lois faites par des hommes pour des hommes, (tu l’as dit à la présidente de l’université années 90, aube du second millénaire, les interruptions de thèse sont autorisées pour service militaire mais non pour congé maternité)

    cela le monde au tournant du millénaire, cela les forêts tranchées, le global warming

    et l’anthropocène absolu

    cela les violences silencieuses et urgentes, le monde à nos pieds exténué

     (étudiante tu ne coucheras pas pour obtenir un poste de secrétaire auprès d’un haut fonctionnaire parisien, poète tu ne coucheras pas pour subventionner un livre auprès d’un vieux maire crapuleux de province)

    droit de cuissage primitif et privilège des hommes mûrs du XXième siècle

    le capitalisme est plus masculin que nos rêves

    au village les femmes sont les seules à hurler au maire leurs révoltes criblées de blessures

    les femmes prostrées se lèvent

    contre les pères qui frappent (soulèvent la petite fille de terre en la tenant

    par ses longs cheveux frisés et dénoués) contre les maris

    qui frappent (parce que nous disent hystériques)

    contre les amants alcoolisés ou camés contre les coups - le fond de teint

    que tu te mets sur le visage le lendemain car

    c’est toi qui as honte d’être la battue de source sûre (avec le père la lèvre

    éclate de sang, mais en grandissant tu as appris à courir vite

    à faire vibrer la rampe d’acier de l’escalier pour t’enfermer

    dans les toilettes), avec le temps tu n’as rien appris

    puis tu jettes ton corps de femme à la face des mondes

    et tu éclates avec les oiseaux, et tu montes en haut

    des arbres pour que le ciel t’absolve, pour que tilleul et acacia

    te pardonnent d’avoir été la frappée, la battue, la folle

    (tu prends des coups parce que tu es folle, disent-ils, répètent-ils,

    ou mauvaise, ce sont leurs termes inébranlés)

    alors tu construis des ZAD et des pancartes rouges, tu bouleverses le cours

    des pouvoirs et tu tiens tête à tous les chefs fonctionnarisés par excès

    et dehors les plantes prennent courage

    la vigne vierge rougit sans honte

    tu seras la révoltée vierge telle la vigne rouge

    et tes pas divorcés auront l’aplomb des arbres fiers comme des ciels

    et ton cri aura la gorge tranchée de féminité et de lune, tu seras

    #metoo dans le réel exalté et les hommes n’osent plus,

    parmi l’effondrement de toutes les biodiversités, décapiter tes désirs

    surnuméraires et tes accouchements flambants et alors

    tu dresseras ta maternité comme une création intempestive tu joueras

    Delacroix pour de vrai mais sans le drapeau tu

    éteindras tous les bûchers dressés par la Didon malheureuse

    et tu prendras les rênes, dans le cours de l’histoire effondrée

    parmi vergers et landes – un soir de juin, le maire abandonne la préemption du potager et

    toutes les plantes respirent, le tilleul pleure d’été – alors les femmes

    sont du côté des oiseaux, tout en haut des arbres elles

    se jettent dans les mots écologiques, dans l’écriture la jamais battue l’instinctive

     

     

     

  • Rage ; rabia de Regina José Galindo

     

    09.jpg

     

    Traduction LAURENT BOUISSET  - Langue d'origine : ESPAGNOL

     
     

    Dans le numéro spécial Guatemala de la revue Nouveaux Délits (n°58) réalisé en collaboration avec Laurent Bouisset, vous aviez pu découvrir des traductions de poèmes de Regina José Galindo, leur puissance à l'image de tout son travail d'artiste poète et performeuse, la voici donc publiée en France pour la première fois aux éditions des Lisières.

    "À l'image de son travail d'artiste performeuse, la poésie de Regina José Galindo est crue, brute, viscérale. Reflet de la violence d'un continent, son écriture radicale dénonce la violence faite aux femmes et aux Indiens dans son « mauvais mauvais mauvais Guatemala » en proie aux gangs après trente-six années de guerre civile. Rendre hommage et affirmer une résistance, c'est ce que construit par son travail artistique et poétique Regina José Galindo, avec rage et vitalité."

     

    à commander ici :

    https://halldulivre.com/livre/9791096274222-rage-rabia-ga...

     

    Le site de Regina :

    http://www.reginajosegalindo.com/en/home-en/

     

    Le numéro spécial Guatemala :

    http://larevuenouveauxdelits.hautetfort.com/archive/2017/...

     

     

     

  • Le Grand Jeu de Cécile Minard

    Rivages poche, janvier 2019

     

    9782743645908.jpg

    220 pages, 7,80 €

     

    Un roman surprenant, vraiment rafraîchissant, qui se laisse boire avec une certaine jubilation et qui, plus encore, contient en lui-même une profondeur de réflexion — des pistes, pas de réponses, seulement des pistes — et une énergie communicative qui fait fourmiller les racines de l’être.

    Une jeune femme dont on ne connaîtra pas l’identité, ni rien de son existence antérieure — ou à peine quelques flashs — si ce n’est qu'elle est bien décidée à s’en couper, tout comme elle va se couper du monde et de toute relation humaine, pour s’isoler dans un coin de montagne, une sorte de cirque naturel qui sent bon le Pliocène, un îlot de deux cents hectares de roche, de bois et de prés au cœur d’un massif montagneux de vingt-trois kilomètres carrés, qu'elle a acheté et équipé de façon très technique. Plusieurs modules y ont été héliportés : un « tonneau » d’habitation high-tech « à demi-appuyé à demi-suspendu à un éperon granitique », plus bas des sanitaires et un abri jardin, réserve et outillage, le tout bien réfléchi, hyper organisé. « Une belle planque ». Grâce à un équipement et un entraînement survivaliste de pointe adaptés à la vie en altitude en toutes saisons — matériel d’escalade, de pêche, de chasse, d’agriculture, une autonomie énergétique, suffisamment de réserves, etc. , la jeune femme prend possession de son territoire et se met à l’explorer peu à peu tout en organisant méticuleusement sa nouvelle existence pour ne pas être prise au dépourvu. Le seul élément du passé qu’elle a apporté avec elle et qui n’a rien avoir avec les bases de la survie, c’est un violoncelle.

    Ce roman, ce sont les cahiers qu'elle remplit, son journal de bord. On pense évidemment au Walden de Thoreau. Un Thoreau version 3.0. La narratrice emploie un langage très technique, scientifique même, ce n’est pas ici un retour à la nature façon hippie, mais une immersion totale dans la solitude et une confrontation avec les limites du corps et de l’esprit. La nature — puissante, exigeante — est perçue comme une source de défi autant que d’enseignement et d’émerveillements. Pour quelqu'un qui, semble-t-il, ne manquait de rien sur le plan matériel, ce choix de vie est donc absolument un choix et un choix absolu.

    « Les conditions idéales sont-elles celles auxquelles on ne peut pas échapper, celles qui nous obligent ? »

    Cet isolement total n’est pas seulement un challenge que cette jeune femme s’est lancé à elle-même, mais une nécessité qui se questionne dans ce tête-à-tête avec soi-même et une nature libre, sauvage, un monde qui n’est pas fait pour les humains « Ce monde n’est pas fait pour nous, et c’est un immense soulagement : on peut donc y vivre — si on y parvient. »

    La narratrice est une personne déterminée qui peut sembler, au premier abord, être faite d’un seul bloc, même si elle laisse transparaître au fur et à mesure de son récit une problématique, liée peut-être à la violence, ou à la peur de la violence humaine, de la contrainte imposée par l’autre plutôt que par soi-même :  « L’autorité : le grand jeu de l’humanité ? ».  

    « J’étais détachée, en plein entraînement général, je n’avais plus à redouter de croiser quotidiennement un envieux, un ingrat, un imbécile. »

    Entraînée donc et préparée à toutes sortes d’éventualités, la jeune survivaliste n’avait cependant pas prévu qu'une créature autre qu'animale puisse partager son territoire. Une créature des plus improbables qui pourrait bien devenir son maître, dans le sens initiatique du terme et c’est ainsi que le Grand Jeu va prendre une dimension philosophique très imbibée de taoïsme, qui amène peu à peu la narratrice à passer de sa volonté de maîtrise sur les éléments extérieurs à un lâcher-prise total, condition ultime pour accéder à une réelle maîtrise, celle à laquelle elle aspirait réellement : la maîtrise intérieure. L’équilibre est au centre de ce roman et l’équilibre naît d’un mouvement perpétuel entre les polarités, sagesse et ivresse marchent sur le même fil.

    Ce serait dommage d’en révéler plus. À vous maintenant, lectrices, lecteurs, d’être curieux.

     

    Cathy Garcia Canalès

     

     

     

    minard_celine-c-lea_crespi.jpgCéline Minard est née à Rouen en 1969 ; après des études de philosophie, elle se consacre à l’écriture. Elle est l’auteur de plusieurs ouvrages : Le Dernier Monde (2007), Bastard Battle (2009) et Olimpia (2010), So Long Luise (2011), Faillir être flingué (2013, prix livre Inter), Le grand jeu (2016), Bacchantes (2019).

     

     

     

     

     

     

     

     

  • Le Chemin des âmes de Joseph Boyden

     

    boyden.jpg

    (titre original : Three-day road, 2004), Albin Michel 2006. 475 pages.

     

    Je viens de terminer ce livre inoubliable, dont la fin m’a fait pleurer. Un hymne tordu de douleur, mais puissant, à la vie arrachée aux champs de mort. Un chant de mort aussi et un chant de guérison. J'y ai appris encore des choses sur cette première guerre mondiale et notamment sur les soldats amérindiens qui y ont pris part. Ici, ce sont deux amis d‘enfance de la nation Cree. En cherchant un peu plus sur le sujet suite à cette lecture inspirée de faits bien réels, j'ai appris, sans surprise hélas, la façon dont ces recrues (comme les autres minorités) ont été traitées, avant, pendant, après...  Mais entre les hommes jetés dans cette grande boucherie, les soldats de base rampant, pataugeant et crevant dans la même soupe de boue et de sang, il n'y avait plus beaucoup de différences. Les deux jeunes Cree vont se distinguer sur le terrain par leurs qualités de chasseurs mais ils en paieront le prix fort : quelque chose les sépare et cette séparation va peu à peu se transformer en gouffre. L’un, abandonné par sa mère qui avait sombré dans l’alcoolisme, avait été sauvé du pensionnat tenu par de rudes religieuses, missionnées pour bouter le païen hors de ces corps de sauvageons, par sa tante, une des rares Cree à perpétuer la vie d’avant à l’écart de la ville et des wemistikochiw et qui l’a pris avec elle au fond des bois, pour lui enseigner tous les savoirs et traditions de son peuple, celles du monde visible mais aussi du monde invisible, elle qui était une des dernières chasseuse de wendigos. L’autre, orphelin, a passé trop d’années dans ce pensionnat, avant que la tante de son ami d’enfance, ne vienne lui aussi le chercher. Le Chemin des âmes force une réflexion sur l'humain dans l’enfer de la guerre, le meurtre autorisé, les limites (y en a t-il ?), mais aussi sur les conséquences de la colonisation et de l’acculturation, leur violence et heureusement il y a cette sagesse ancestrale, qui malgré tout, palpite encore, resurgit quand on la croit disparue à jamais sous la pression de la culture qui se voulait et se veut encore dominante et qui a envoyé des milliers d’hommes colonisés finir en morceaux de viande faisandée au fond d’une tranchée, dans des pays qui leur étaient totalement étrangers. Un livre qui m’a vraiment bouleversée.

     

    Joseph Boyden, né en 1966, est canadien avec des racines amérindiennes, écossaises, irlandaises. Le chemin des âmes est son premier roman. D’autres ont paru depuis, le dernier : Dans le grand cercle du monde, 2015.

     

    En savoir plus sur l'auteur :

    https://www.etonnants-voyageurs.com/spip.php?article2344

     

     

     

  • Revue Nouveaux Délits numéro 67

     

    COUV.jpg

    Octobre 2020

     

    Ensauvagement, en voilà un terme galvaudé encore, quand il sert à définir une spirale ultra-médiatisée de violence. Pourquoi ne pas dire simplement enviolencement ? Si la société s’ensauvageait littéralement, on verrait le béton disparaître sous la verdure. On devrait plutôt parler au contraire de dénaturation, d’artificialisation, d’abrutissement, de dégénérescence… Et souvent même, on devrait se taire ! Il y a en effet tant et trop à dire, et le bruit ambiant est déjà tellement fort, tellement cacophonique, que je préfère m’ensauvager justement et me taire, ou siffloter, ou miauler ou braire ou turlutter… Turlutter oui, comme les alouettes ! Chanter comme les baleines, feuler, grincer, barrir, ricaner comme les hyènes, sûr que ce n’est pas l’envie de mordre qui manque parfois… Mugir, hennir, rugir, glapir, tout plutôt qu’user des mots en dégradant et souillant leur sens. Aussi me voilà affamée de poésie, de celle qui justement ensauvage le langage, le croque et le recrache baigné de sucs, illuminé de l’intérieur par des processus qui échappent à toute explication, tout contrôle, tout dogme, toute rationalisation. Même la noirceur n’est qu’un des innombrables aspects de la lumière quand on passe sa langue par le trou de la poésie, la noirceur n’a rien à voir avec la cruauté. La cruauté n’est pas sauvage, n’est pas l’apanage des bêtes, ni même des brutes, c’est un désir vicié, une froide volonté de faire souffrir, d’humilier, de détruire l’autre. C’est de la cruellisation dont on devrait s’inquiéter, de celle qui s’attaque aux enfants, aux animaux, aux femmes, aux plus fragiles, et qui n’a rien à voir avec la violence de celui qui se défend comme il peut et souvent très mal et à tort d’une autre violence, moins visible, mais toute aussi agressive dans ses effets.

    Et si une des clés pour rééquilibrer, soigner et pacifier nos sociétés était un ré-ensauvagement justement de la Terre ? Renouer, hommes, femmes et toutes nuances intermédiaires, avec la puissance femelle qui sacralise, protège et nourrit ? Sacraliser, du latin sancio : « rendre inviolable ».

    CG

     

    007.jpg

     

    AU SOMMAIRE

     

     

    Délit de poésie : Hélène Decoin, Claire Cursoux, Ana Minski, Aline Recoura, Antoine Bertot, Martin Payette.

     

    Délit d’auto-promotion : présentation et extraits d’À la loupe, tout est rituel, dernière publication en date de Cathy Garcia Canalès.

     

    Résonances : Le Grand Jeu de Cécile Minard – Rivages poche, 2019 & Le Chemin des âmes de Joseph Boyden, Albin Michel, 2006.

     

    Les Délits d’(in)citations poussent au bas des pages, faites-en provision pour l’hiver.

     

    Vous démasquerez le bulletin de complicité souriant à la sortie, toujours partant pour de nouvelles aventures.

     

    004 bon.jpg

    Illustrateur : Nelson Jacomin

    alxavi.nls@gmail.com

     

    Nelson Jacomin est né en 1993 dans le Var. Peintre, photographe, il monte avec deux amis l'association Mercator en 2018 à Paris. Ils publient et éditent de nombreux fanzines et organisent expositions et évènements dans Paris et alentours. Depuis 2020, vit et travaille entre la Suisse et Paris.

    Insta : https://www.instagram.com/nelson_jacomin/

     

     

    008.jpg

     

    Lumières. Pluies. Océans sauvages. Emportez-moi dans la moelle frénétique de vos articulations. Emportez-moi ! Il suffit d’un soupçon de clarté pour que je naisse viable. Pour que j’accepte la vie. La tension. L’inexorable loi de la maturation. L’osmose et la symbiose. Emportez-moi ! Il suffit d’un bruit de pas, d’un regard, d’une voix émue, pour que je vive heureux de l’espoir que le réveil est possible parmi les hommes.

    Emportez-moi ! Car il suffit d’un rien, pour que je dise la sève qui circule dans la moelle des articulations cosmiques.

     

    Frankétienne

    in L’oiseau schyzophone

     

     

    006.jpg

     

    Nouveaux Délits - Octobre 2020 – ISSN: 1761-6530 - Dépôt légal : à parution - Imprimée sur papier recyclé et diffusée par l’Association Nouveaux Délits - Coupable responsable : Cathy Garcia Canalès -  Illustrateur : Nelson Jacomin - Correcteur : Élisée Bec

     

     

     

  • Quelques conseils aux auteurs qui voudraient....

    Nouveaux Délits publie 3 numéros par an (janvier, avril et octobre), de 52 pages. Il y a toujours beaucoup d'auteurs en attente, donc si vous voulez proposer des textes, soyez très patients, MERCI. Envoyez-les de préférence par mail, une dizaine (pas plus), et surtout évitez les pavés par courrier, la meilleure façon de décourager l'unique femme à tout faire de cette revue... Par mail, vous aurez toujours une réponse, mais pas par courrier. Ne soyez pas déçus si vos textes ne sont pas retenus, il s'agit de choix subjectifs et non d'un jugement de valeur. Les Soliflores sont des publications de textes uniques en ligne sur ce blog, et sont complémentaires à la revue. Ils ne sont pas un fourre-tout, mais permettent la visibilité d'auteurs qui ne seront pas publiés ou republiés, dans l'immédiat en tout cas, dans la revue papier. Pensez aussi à lire la revue, au moins un numéro, ça vous permettra de savoir à quoi elle ressemble déjà et d'avoir une idée de l'esprit qui l'anime. Vous pouvez aussi, bien entendu, vous abonner, en demandant par mail un bulletin de complicité mais il n'y a pas de favoritisme pour les auteurs abonnés. La revue est par ailleurs toujours en quête de nouvelles-nouveaux, illustratrices-illustrateurs (un(e) par numéro intégral, non rémunéré autrement que par un exemplaire du numéro illustré, comme chacun des auteurs publiés). Pour toutes autres questions, contactez-moi à nouveauxdelits arobase orange.fr.

     

    Cathy Garcia Canalès, coupable responsable et femme orchestre (comité de lecture, maquettiste, secrétaire, service communication, attachée d'imprimante, agrafeuse, éditrice, colleuse de timbres, correctrice, plieuse de couverture, posteuse, service après vente...).

     

  • Georges Cathalo a lu "Printemps captif", délit buissonnier n°4

     

    COUV small.jpgIl y aura, c’est certain, dans les mois à venir, toute une profusion d’écrits sur la crise sanitaire. Il semble urgent de chercher des résiliences pour faire face aux turpitudes de l’époque, comme lire « quelques poèmes de Nuno Judice ». On peut aussi lire les poèmes de Lionel Mazari, poèmes qui slaloment entre les écueils du temps présent. Quelques jongleries verbales arrivent comme des respirations entre des bouffées d’ultra-réalisme. Mazari n’hésite pas à affirmer : toute ma sagesse est viatique / et la folie me désaltère. C’est sûrement ainsi qu’il va falloir aborder les temps à venir en se ménageant des espaces où assis sur un banc dans le noir , on découvre ce qui se passe comme « ces ombres calmes aux fenêtres » avec ces  brancardiers venus sauver de pauvres gens blessés par la réalité . Pour finir, signalons la belle illustration de couverture de Morgane Plumelle où deux oiseaux en liberté semblent défier notre printemps captif.

     

    à lire en ligne ici :

    https://www.dechargelarevue.com/No10-Passer-de-friches-en-contre-allees-par-un-printemps-furtif.html

     

     

     

     

  • En juillet est sorti le 4e Délit buissonnier... Printemps captif de Lionel Mazari

     

    COUV.jpg

     

     

    Poèmes de Lionel Mazari

    écrits sous confinement entre le 17 mars et le 19 avril 2020

     

     

    « alors...
    plutôt que d'écouter couiner les ambitieux,
    que la crise épidéconomique,
    — hélas vécue comme une épreuve
    par nous, véritables mortels —
    stimule et extasie,
    j'ai ce jour d'huis préféré
    profiter de l'arrêt cardiaque du monde
    et de la suspension de son souffle,
    pour lire, bercé anesthésié
    par cette nouvelle musique de danse macabre,
    quelques poèmes de Nuno Judice ;
    puis tout en sirotant un citron chaud
    édulcoré au miel de sapin,
    ce jour d'huis préféré,
    tandis que tournoyaient dans le ciel gris doux
    dépourvu d'effets dramatiques
    quelques corbeaux émoustillés,
    voir merles et pies, brindilles au bec,
    préparer leur nid,
    sans se soucier de notre mort,
    parmi des explosions de pâquerettes
    et l'éclosion de trois tulipes. »

     

     

    tirage numéroté, 40 pages agrafées

     papier calcaire 100 g. couverture 250 g. 100 % recyclé

    Illustrations en couverture : Morgane Plumelle

     

    10 € +2 € de port,  à commander à

     l’Association Nouveaux Délits – Letou – 46330 St Cirq-Lapopie

     

     

     

     

  • Hommage à Alexo Xenidis

    Douces pensées pour accompagner Alexo Xenidis, de son vrai nom, Ismène Le Berre, dans son voyage vers les étoiles, une poète au cœur grand comme le malheur du monde... splendide poète !
     
    Les vies passent, les mots demeurent, voici un de ses poèmes publiés dans le numéro 57 :
     
    "Si vous voulez que cessent les guerres
    Commencez par cesser celle que vous menez contre
    Votre voisin de palier
    Si vous défendez bec et ongles la liberté
    Commencez par cesser de limiter celle de
    Votre voisin de palier
    Si vous souhaitez au monde le bonheur la joie la paix
    Cessez de dire avec précisions aux voisins de palier
    Quel est leur bonheur
    Quelle est leur joie
    Quelle est leur paix
    Demandez-leur plutôt comment ils sont humains
    Leur façon vaut bien la vôtre
    Leur humanité vaut bien la vôtre
    Et s’il y a des fous parmi eux parmi vous
    Vous en parlerez ensemble
    Au lieu de vous jeter à la gueule les monstres de l’un
    Les monstres de l’autre
    Par moments
    Vous m’épuisez
    A ne connaître parmi les opérations élémentaires
    Que la soustraction et la division"
     
     
    Merci Alexo !
     
     
     
     

  • Soliflore 89 - Chris Giot

     

    John Terlet, University of Adelaide Graphite sur papier au microscope. .png

     

    John Terlet, University of Adelaide

    Graphite laissé par la mine d'un crayon sur du papier vu au microscope

     

     

    Je nous ai vu l’un mourant du pouls de l’autre de ces éclats qui font pourrir les corps plus vite, satisfait de la couleur qui murmurait au sol une histoire de nerfs et sans ponctuation, de nerfs à sectionner et sitôt fait. Pourquoi pas ma béance, calice, et langoureux le sel sur les bordures à vif, le bien être du sel, hurler d’absolu devant le monde, en flammes devers nous. Une justice d’abîme. Mais c’est mettre trop de chaux, et sur quoi encore ? Sur la terre sèche de nos fripes, qui ne connaîtront pas les braises du dehors pour être promises au calcaire.

     

     

     

  • Le Délit buissonnier n° 4 sort le 1er juillet !

     

    Me voilà ravie de présenter le quatrième Délit buissonnier !

     

     

    COUV.jpg

     

     

     

    alors...
    plutôt que d'écouter couiner les ambitieux,
    que la crise épidéconomique,
    — hélas vécue comme une épreuve
    par nous, véritables mortels —
    stimule et extasie,
    j'ai ce jour d'huis préféré
    profiter de l'arrêt cardiaque du monde
    et de la suspension de son souffle,
    pour lire, bercé anesthésié
    par cette nouvelle musique de danse macabre,
    quelques poèmes de Nuno Judice ;
    puis tout en sirotant un citron chaud
    édulcoré au miel de sapin,
    ce jour d'huis préféré,
    tandis que tournoyaient dans le ciel gris doux
    dépourvu d'effets dramatiques
    quelques corbeaux émoustillés,
    voir merles et pies, brindilles au bec,
    préparer leur nid,
    sans se soucier de notre mort,
    parmi des explosions de pâquerettes
    et l'éclosion de trois tulipes.

     

     

    Morgane Plumelle_1.jpg

    *

     

    Poèmes de Lionel Mazari

    écrits sous confinement

    entre le 17 Mars et le 19 avril 2020

     

    Illustrations en couverture : Morgane Plumelle

     

    *

     

    tirage numéroté

    40 pages agrafées

    imprimées sur papier calcaire 100 g

    couverture calcaire 250 g

    100 % recyclé

     

     

    Morgane Plumelle_2.jpg

     

    Dépôt légal : juillet 2020   -   ISSN : 2556-0026

     

     

    10 €

    +2 € de port

     

    à commander à :

    Association Nouveaux Délits

    Letou

    46330 St CIRQ-LAPOPIE

     

     

     

     

     

     

     

  • Pensées pour Tristan Cabral (1944-2020)

     


    " Le pays d’où je viens n’a jamais existé
    Un vieil enfant de sable y pousse vers le large
    Un bateau en ciment qui ne partira jamais"


    et bien le voilà parti, libre pour de bon, bon vent et bon voyage à toi poète !

     

    soirée poésie 009.JPG

    Maison de la Fourdonne, St Cirq-Lapopie, 2008

     

     

    Le somnambule
    Je garde sous la peau mon costume de mort
    avec à l'intérieur le long poignard de l'aube
    ma voix se couvre mon ombre et moi nous sommes seuls
    et je laisse sur l'eau des blessures insensées
    Je suis à bout de peau je fais des métiers d'absence
    je descends dans le corps des oiseaux somnambules
    j'éteins les ombres blanches sur le miroir des morts
    et la couleur du monde s'est perdue en chemin
    Je vois le ciel pendu à des crochets de plomb
    je vois des marées mortes dans le sang blanc des algues
    et sur les seuils de pierre des bracelets d'oiseaux
    Dans un désert de peau je guette un enfant fou
    je vois dans les bûchers des émeutes de miroirs
    et le même visage à toutes les fenêtres....

    Tristan Cabral, 1982
    In "faire-part" n°1er trimestre 1982

     

     

    AFFICHE POESIE O MUERTE (2).jpg

    2008

     

    *

     

    Poète libertaire, brûlant et brûlé, poète visionnaire,

    en témoigne cette vidéo tournée lors du Printemps des poètes

    à Toulon, en 2008

     

     

     

     

     

  • Soliflore 88 - Nicolas Saeys

     

    Mark Jenkins par Gilles Bergeret.jpg

    Mark Jenkins – photo : ©Gilles Bergeret

     

     

    CHOC

     

    Un coup dans la tête

    ça sonne dur ça résonne creux

    je n'ai pas vu le mur arriver

     

    Je parlais du coup j'avais la tête ailleurs

    un songe en image résonnant acoustiquement

    je n'ai pas entendu le vent

    dont l'attention soudaine aurait pu m'avertir

     

    la tempe comme un tambour de cloche

    ce coup pris en pleine ascension du vide

    sur un moi tremblant entre deux rêves oubliés

     

     

    http://aureoledessatyres.over-blog.com/

     

     

     

  • Florent Toniello à propos de la revue et de son dernier numéro

    Florent Toniello sur le site poétique "D'ailleurs" a publié une superbe note concernant la revue Nouveaux Délits et son dernier numéro, un grand merci à lui !
     

    COUV.jpg

     
     
    "19 mai 2020 - Florent Toniello ​nous gâte. 

    ​Aujourd'hui, c'est un billet qu'il nous offre sur la revue Nouveaux Délits. Il y fait mention de "promesse de mouvement, de découverte, de bougeotte même".  Cela vous dit quelque chose ? Moi, oui ! 
    Voyageons poétiquement et découvrons (si ce n'est pas déjà fait) la revue Nouveaux Délits.
    Merci Florent.

    Nouveaux Délits no 66
     
    La poésie vit de mots, mais aussi de rencontres. Qu’elles soient réelles ou virtuelles, celles-ci permettent de choisir sa famille – voire ses familles –, cultiver son jardin de lectures ou faire le plein d’inspiration pour écrire, si l’on s’y adonne. Pour ma part, impossible de nier l’importance de certaines rencontres virtuelles, tant le milieu littéraire (et poétique encore plus) dans mon petit grand-duché est étroit ; la communauté D’ailleurs, créée autour de ce site et de son animatrice, n’en est pas la moindre, mais il y en a d’autres, évidemment, qui élargissent les horizons. Celle avec la revue Nouveaux Délits est de celles-là, et il était temps d’en faire mention ici.
     
    Pourquoi celle-ci est-elle à mon avis importante dans la pléthore de revues poétiques francophones ? Attardons-nous d’abord au sous-titre : « Revue de poésie vive ». Il y a là une promesse de mouvement, de découverte, de bougeotte même. À l’opposé du style reconnaissable et immuable de certaines autres revues. Oui, on peut aimer la poésie patrimoniale, mais les strophes qui se trémoussent et qui ne se ressemblent pas, les poètes qui ne se lorgnent pas dessus pour savoir comment obtenir le prix Mallarmé ou Apollinaire en faisant plaisir aux jurys, ça en jette. Et c’est exactement ce que publie Cathy Garcia dans Nouveaux Délits (elle n’est pas la seule, évidemment, mais nous y reviendrons sûrement). Sans préjugés, elle laisse l’éclectisme dominer sa programmation, sans toutefois oublier de semer des fils conducteurs dans les numéros individuels.
     
    Fils conducteurs aussi, ces courtes citations d’auteurs ou d’autrices de poèmes, romans ou essais que la revuiste propose en bas de page pour faire écho aux textes publiés. Regardons-y de plus près, en prenant un exemple dans ce numéro 66, que nous parcourrons ensuite. « Les invisibles », de Nicolas Kurtovich, est une longue ode de voyage aux États-Unis (« au bord de l’étang table avec joueurs de cartes / d’étranges larmes trouvent un surprenant chemin jusqu’à mes yeux / dans Central Park bouquets sauvages de fleurs jaunes et mauves réunies »), entre San Francisco et New York, en passant par Chicago. Cathy Garcia lui adjoint une citation de Luther Standing Bear, du peuple oglala lakota : « Il n’y avait que pour l’homme blanc que la nature était sauvage. » On touche là à deux caractéristiques de ces citations, qui font la particularité et l’intérêt de Nouveaux Délits : d’abord, une érudition (mot un peu prétentieux que Cathy probablement réfuterait, mais c’est mon billet !) qui permet de faire écho avec des textes classiques, modernes ou résolument contemporains à tout texte publié ; ensuite, et ce n’est pas pour me déplaire, une conscience écologique très poussée.
     
    Dans ce numéro, les poèmes de Christophe Salus le confirment : « Je vois la brousse qui régresse ! / Moins de ronce, sous le piquant ! / Quelle victoire ! On pense, quand / Y poussait tout l’horrible agreste ! » La citation sous ce poème ? « Cette planète craquelée, où l’on met dans des coffres les tournesols du Rêve », tirée d’un poème de Michèle Caussat. Philippe Labaune, lui, présente des extraits de ses séries « Drones » et « Panoptikon ». Une langue fébrile qui s’affranchit des conventions pour décrire un monde qu’on imagine dystopique, mais pas sans espoir : « non à la torpeur et à la mort oui à la couleur ». Complètent ce panorama deux textes de Jean-Louis Millet et des aphorismes de Mix ô ma prose, sans oublier quelques notes critiques de la revuiste, qui aura aussi au début proposé un éditorial et donné la parole à une médecin généraliste en quatrième de couverture, dans le contexte de la pandémie de Covid-19.
     
    On aura sûrement remarqué que tous les auteurs de ce numéro sont… des auteurs, justement. C’est que le précédent n’avait publié que des autrices. Un choix. Et voilà, c’est ce qu’il y a de bien avec Nouveaux Délits : les choix sont intelligents, surprenants, agaçants, justes, tendres, etc. Ce qui compte, c’est qu’ils bousculent les a priori poétiques, qu’ils poussent à la découverte, qu’ils battent en brèche le syndrome de la cabane dans le domaine littéraire. Exactement ce qu’on est en droit d’attendre d’une revue de « poésie vive ». Pour s’abonner, à un prix modique, c’est par là : http://larevuenouveauxdelits.hautetfort.com."