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LA REVUE NOUVEAUX DÉLITS - Page 11

  • NUMÉRO 56

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    janv. fév. mars 2017

     

    Voici donc le 13ème édito de bons vœux pour la nouvelle année, ce qui devrait suffire à porter bonheur parce que pour ce qui est du stock de formules, il est depuis belle lurette épuisé…. Et aussitôt une question vient clignoter dans mon cerveau arborescent : mais c’est qui cette lurette ? Il s'agirait en fait, dixit the web, d'un mot inventé, un hybride entre belle et heurette, heurette signifiant « une petite heure », ce qui est pour le moins étrange, si on considère que toute heure est censée avoir la même durée. En temps en tout cas, mais peut-être pas en sensation de temps. On sait bien qu’une heure de plaisir passe bien plus vite qu’une heure de galère, une heure à la plage passe certainement plus vite qu’une heure sous les bombes, pour peu qu’elles tombent à côté. Il en va donc sans doute de même pour les années, aussi pourrions-nous penser que si nous avons l’impression que « ça » passe de plus en plus vite, c’est que tout ne va pas si mal pour nous finalement. Aussi pourrait-on se souhaiter tout pleins de belles lurettes, non ? Pour ma part j’aurais tellement de choses à souhaiter concernant le sort de l’humanité, que je préfère me taire et laisser la parole aux poètes.                       CG

     

     

    Il était une chose que seule la terreur pouvait obtenir, c’était que ces centaines d’hommes bouillonnant au fond de la baraque fissent silence. Seule la terreur… et la poésie. Si quelqu’un récitait un poème, tous se taisaient, un à un comme des braises s’éteignent. () Un manteau d’humanité les recouvrait. J’apprenais que la poésie est un acte, une incantation, un baiser de paix, une médecine. J’apprenais que la poésie est une des rares, très rares choses au monde qui puisse l’emporter sur le froid et sur la haine. On ne m’avait pas appris cela.

    Jacques Lusseyran in Le monde commence aujourd’hui

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    AU SOMMAIRE

     

     Délit de poésie non formatée :

     

    µ Anna de Sandre

    µ Samaël Steiner

    µ Myriam Ould-Hamouda

    µ Saïd Mohamed

    µ Quelques prenssées de Mathias Richard

    µ Le tremble au cœur autour (extraits) de Jacques Allemand

     

    Résonance :

     

    Règne animal de Jean-Baptiste Del Amo, Gallimard 2016

    Les Palsou – Un conte de Noël d’André Bouchard, Seuil jeunesse 2016

     

     

    Les délits d’(in)citations réfugiés dans les coins ont des choses à dire. Quant au bulletin de complicité, il tapine toujours au fond en sortant.

     

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    Illustrateur : Patrick le Divenah

     

    De sang breton, de naissance angevine, d’habitat parisien. Bigame, car aime autant le mot que l’image. D’où les associations parfois, dans des textes ou des collages. Aspiré par le souffle, inspiré par la spirale, l’absurde, la poésie des sciences, et bien d’autres choses encore, avec passion. Publié dans une trentaine de revues littéraires et d’autres en ligne. Édité chez Passage d’encres, L’Échappée belle, Gros Textes, p.i.sage intérieur, La Tête à l’envers, La Lucarne des écrivains ; et dans des ouvrages collectifs (Henry, Lilo, L’Atelier du Gué, classiques Garnier prochainement…). Rubriques dans inks-passagedencres (cf. Les mots la langue : Par ici la bonne soupe ; cf. Critique : Chefs-d’œuvre derechef). Collagiste dessinateur (illustration de couvertures et de diverses revues). Son site : http://prosesie.free.fr

     

     

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    Les efforts de dizaines d’années étaient annulés en quelques semaines, l’État, déjà instable depuis toujours, s’était effondré en quelques semaines, la stupidité, la cupidité, l’hypocrisie régnaient tout à coup comme aux pires époques du pire régime, et les hommes au pouvoir œuvraient à nouveau sans scrupules à l’extirpation de l’esprit. Une hostilité générale à l’esprit, que j’avais observée depuis des années déjà, avait atteint un nouveau paroxysme répugnant, le peuple, ou plutôt les masses populaires étaient poussées par les gouvernants à assassiner l’esprit et excitées à se livrer à la chasse aux têtes et aux esprits. Du jour au lendemain, tout était à nouveau dictatorial, et, depuis des semaines et des mois, j’avais déjà éprouvé dans ma chair à quel point on exige la tête de celui qui pense. Le sens civique des braves bourgeois, bien décidé à se débarrasser de tout ce qui ne lui convient pas, c’est-à-dire avant tout de ce qui est tête et esprit, avait pris le dessus, et tout à coup, était à nouveau exploité par le gouvernement, et pas seulement par ce gouvernement d’Europe. Les masses, esclaves de leur ventre et des biens matériels, s’étaient mises en mouvement contre l’esprit. Il faut se méfier de celui qui pense et le persécuter, telle est la devise ancienne selon laquelle on se remettait à agir de la manière la plus atroce. Les journaux parlaient un langage répugnant, ce langage répugnant qu’ils ont toujours parlé, mais qu’au cours des dernières décennies ils n’avaient au moins plus parlé qu’à mi-voix, ce à quoi ils ne se croyaient tout à coup plus tenus : presque sans exception, ils jouaient les assassins de l’esprit, comme le peuple et pour plaire au peuple. Pendant ces semaines-là, les rêves d’un monde voué à l’esprit avaient été trahis, livrés à la populace et jetés au rebut. Les voix de l’esprit s’étaient tues. Les têtes étaient rentrées dans les épaules. La brutalité, la bassesse et la vulgarité régnaient désormais sans partage. Ce fait, s’ajoutant à la stagnation de mon travail, n’avait pu qu’entraîner une profonde dépression de tout mon être et m’affaiblir d’une manière qui, pour finir, avait provoqué la pire crise de ma maladie.

     

    Thomas Bernhard

    in Vomissons

     

     

     

     

  • Alexo Xenidis

     

    Temps modernes

    Cette année je ne sortirai pas de sa boîte la petite maison de bois
    Sa mousse ses décors son étoile
    Ma joie d’enfant de la dresser
    Les Rois Mages ont été retenus à la frontière
    Pour trafics divers
    Et renvoyés dans leur pays on ne savait pas trop lesquels
    Alors on a choisi à pile ou face la Syrie ou le Yémen
    L’Âne est parti à l’abattoir pour faire des hamburgers
    Le Bœuf tire des chariots de cuir au Bangladesh
    À Joseph on a dit
    Qu’on n’était plus pour le rapprochement familial
    Et Marie a fait une fausse couche dans la jungle de Calais
    Le Berger s’est pendu à cause de ses dettes c’était
    Un berger grec
    Il restait le Ravi mais il gênait la bonne société
    Il ne gênera plus ils l’ont interné bien attaché
    Il rit maintenant dans du capitonné
    Cette année
    Je ne sortirai pas de sa boîte la crèche
    Je la laisse avec l’illusion du printemps qui renaît
    Avec l’hospitalité avec la tendresse,
    Rangée dans le grenier, pour les dents des rats.

     

     

     

     

     

     

     

  • Soliflore 41 - Olivier Robert

     

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     Stallman - paper art

     

     

    Abrités sous une pluie qui ne nous mouillera plus

    Ou bien que nous ne sentirons plus battre, ni dans le heurt de nos peaux

    Ni dans le remous de nos tympans

    C’est sans crainte alors que nous jetterons nos pensées en direction du soleil

    En cela seulement guidés par sa jaune et chaude attache

    Depuis longtemps par cœur apprise au rebours de nos dessins d’enfants

    Où sa rondeur complice peu à peu entraîna nos mains à se défaire de leurs trop brusques empoignes

    Pour du plus pauvre des mouvements savoir en cueillir le plus fragile des rayons

    Soit, celui perçant au centre de la nuée, au bout de tout déluge

    Jailli d’entre les cieux, un sourire promis à son heure prochaine

    Quand d’instinct nos yeux s’ébahiront, et comme deux temples grecs

    Conduiront nos prières jusqu’au rêve de ce dieu qui toujours s’y cache.

     

    auxpoemesperdus.wordpress.com

     

     

     

  • Revue Nouveaux Délits n° 48 - Sylvère Moulanier

    Quelques extraits de différents textes publiés dans ce numéro d'avril 2014, ces derniers ayant été choisis parmi ceux que Sylvère Moulanier poste plus ou moins régulièrement sur son blog (http://sdfdeluxe.hautetfort.com/). Ce sont de vrais témoignages, pas de la littérature, d'un "sdf de luxe", qui a eu bien du mal  à faire reconnaître son syndrome d'Aperger et son autisme.