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LA REVUE NOUVEAUX DÉLITS - Page 8

  • Soliflore 72 - Jean Marc Farge

     

     

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    (c)photo de l'auteur

     

     

    Aimer

     

    La femme est un Temple,

    Un lieu sacré à l'image de l'univers,

    Un lieu de don de vie, de lumière.

    Tu m'as donné un pouvoir

    Celui de dédicacer ce sanctuaire.

     

    C'est en toute liberté que je te voue un culte,

    Sans liturgie, car tout se crée dans l'instant.

    Rien n'est enfermé dans un cadre imposé

    L'amour ne peut être emprisonné,

    Il vit et se nourrit de chaque instant.

     

    La vie triomphera de tout si nous y croyons,

    Elle est pureté comme l'aurore naissante.

    Le corps devient une oreille qui écoute l'âme,

    Invite-moi au banquet des futures épousailles.

     

    L'absolu du désir ne peut être violence

    Il est cette juste certitude qui régit tout.

    Cette vérité que l'homme cherche tant

    Se situe dans son exacte liberté de conscience.

     

    Allons là où se situe ce secret qui nous anime

    Le reconnaître, c'est soulager son cœur.

     

     

     

  • Soliflore 71 - Hubert Boisselier

     

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    (c)Alvaro Sanchez

     

     

    Tu n'as pas d'empreinte 

    Hormis la cendre 

    Pas de nom 

    Excepté celui hurlé entre les dents dont tu es né 

    - L'injure de l'oubli dans ta gorge 

    Fore un puits de lave dans ta poitrine 

    Mais il faut bien s'empreindre d'un avenir - 

    Tu n'as de nom que celui écrit par dessus 

    Le tien le leur a eux qui t'appelaient 

    Par ce nom hurlé entre les dents 

    Qui devaient te déchirer 

    Dont tu devais mourir 

     

    Pas trace de toi avant que tu t'imprimes 

    Sur les murs et les pages et les écrans 

    Avant que tu détournes les voies toutes tracées 

    Par ton nom et ceux qui te nommaient alors 

    Vers d'autres lieux vers d'autres corps

     

    Tu n'as d'empreintes 

    Que dans la cendre de qui tu fus 

    De qui tu fuis en lui fermant les yeux 

    Le laissant vivre de son aveuglement 

    Dans cet ailleurs qui fut toi 

     

     

     

  • Soliflore 70 - Xavier Monloubou

     

     

    pour Soliflores - la paix. Xavier Monloubou.jpg

    photo de l'auteur

     

    la paix.

    elle mue d’arbre en arbre. apparition enlacée au cuivre du soleil. d’une marche lente. jamais à l’abri. majesté venue d’ailleurs. mal de rêveur, son agenda toujours ouvert. contre la pierre entrebâillée qui traîne sous la pluie. son brouillon épuisé de ville. ce quelque chose dans le pain. elle sauvera l’autre rêveur. qu’elle impose. au rythme de l’invisible ciel qui respire l’onde blonde, la présence, le geste libre. elle, la paix. elle anime le « i » d’aimer. se déporte avec le pollen et le vent. part encensée. passage secret. pour nous trouver enfin.

     

     

  • Le numéro 60 lu par Marilyne Bertoncini pour la revue Recours au poème

    Les Revues “pauvres” (1) : “Nouveaux Délits” et “Comme en poésie”

    Par | 4 septembre 2018|Catégories : Comme en poésieNouveaux DélitsRevue des revues

    Ce n’est certainement pas à l’excellent qualité des contenus et des projets  que renvoie le terme « pauvre » – mais comme pour ce qu’on nomme « l’art pauvre », je voudrais par ce titre souligner l’inventivité, les maigres ressources (les abonnements et l’investissement bénévole des revuistes), et ce génie de l’utilisation des bouts de ficelle qui permet de concocter des revues ne le cédant en rien aux plus connues, mais qui vivent à la marge, en raison de la confidentialité de leur diffusion.

     

    « Nouveaux Délits, revue de poésie vive » en est un excellent exemple : de petit format (une feuille A4 pliée en 2), agrafée sous une couverture rousse, il offre 54 pages d’excellente poésie accompagnée d’illustrations en n&b – un illustrateur différent invité pour chaque numéro – imprimée sur papier recyclé : « Du fait maison avec les moyens et la technicienne du bord, pour le plaisir et le partage. » ainsi que le déclare la maîtresse d’œuvre, la poète Cathy Garcia, qui mène contre vents et marées cette entreprise depuis 15 ans, et à laquelle je cède la parole en recopiant l’édito du numéro 60, dans lequel on lit l’enthousiasme et les difficultés de l’entreprise. (...) 

     

     

     

    "Ce n’est pas quelque chose sur quoi j’aime m’étaler mais il faut savoir peut-être que si cette revue existe, c’est par une sorte de passion entêtée de ma part, car elle est réalisée (volontairement) sans subvention et bénévolement, dans un contexte de précarité permanente, qui a d’ailleurs tendance à s’accroître d’année en année et ce numéro 60 a eu un accouchement particulièrement difficile. Cependant, je crois bien qu’au final, c’est un beau bébé ! Un peu étrange, douloureux même, mais riche de toute sa complexité humaine et de cette énergie qui passe dans les mots, qui les traverse et parfois nous transperce, cet appel d’air, ce désir indéfinissable de saisir, en nous et hors de nous par les filets de la parole, ce qui le plus souvent demeure insaisissable.”

     

    Feuilletons ensemble ce numéro fatidique : après l’édito que nous venons de citer in extenso, le sommaire : 7 poètes pour cette livraison, dans une partie intitulée « Délit de poésie » puis deux livres présentés dans la rubrique « Résonance ». Suit la mention intriguante « Délits d’’in)citations percent la brume des coins de page » : en effet, la revue est ponctuée de citations plus ou moins longues, dans l’angle des pages non numérotées : on trouve dans ce numéro un proverbe russe, Victor Hugo, Daniel Biga, un haïku de Sôseki… ou encore – en écho au poème de Valère Kaletka, « Le lieu », cette phrase de l’humoriste Pierre Doris : « C’est très beau un arbre qui pousse dans un cimetière. On dirait un cercueil qui pousse ». Car l’entreprise de Cathy Garcia, on le comprend vite, n’est pas dépourvue de cette distance souriante, qui lui a fait choisir le titre provocant de cette publication, liée à l’association et aux éditions Nouveaux délits, à Saint Cirq-Lapopie – rien de moins : revue pauvre, peut-être, mais au moins sous le regard tutélaire d’André Breton, qui y a séjourné après y avoir acheté une maison en 1950. D’ailleurs, si elle invite le lecteur à s’abonner, elle le fait en dernière page avec un « bulletin de complicité » qui vous propose de « blanchir (votre) argent en envoyant (votre) chèque à l’association – et comment résister à cet appel à soutien, lorsqu'on a pu constater la variété des textes publiés ? Dans cette livraison, outre Valère Kaletka, Pierre Rosin, dont on suit le parcours de peintre-poète dans Recours au Poème également, et dont je relève le post-scriptum à l’un de ses textes : « PS : nous pourrons garder les poètes et les peintres à condition qu’ils sachent jardiner ». Puis Daniel Birnbaum, Joseph Pommier, Florent Chamard, dont on peut écouter deux textes lus par Cathy Garcia sur la chaîne youtube « donner de la voix » 

    Puis Vincent Duhamel avec quelques proses poétiques, et Antonella Eye Porcelluzzi, dont la biographie succinte nous amène sur google à regarder les films ou écouter à travers la voix de Cathy sur la chaîne associée à la revue

    Vous ne connaissez pas la plupart de ces noms ? C’est qu’ils ont surtout publié en revue, et que les éditeurs ne les ont pas encore rencontrés, mais parcourez donc, sur le site, la liste des poètes publiés par la courageuse revue Nouveaux Délits – et : bonnes découvertes !

     

    Pour lire l'intégralité de l'article : https://www.recoursaupoeme.fr/les-revues-pauvres-1-nouveaux-delits-et-comme-en-poesie/

     

     

     

     

  • Soliflore 69 - Patrice Blanc

     

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    (c)Alison Scarpulla

     

     

    vagabond,

    le sommeil flirtait avec la mort

    crises justes, aiguisées

     

     

    chose des morts

    dans l’enfer des buissons !

     

     

    images cuites des mots,

    étoiles baignées d’ivresse…

     

     

    les mots sucent  la poussière

    la bête approche

    sur le sentier du dire

     

    elle flanne

    jusqu’au repère du poème

     

     

     

    (…)

     

    les nerfs besognent en terre de douleur

    champs malades

     

    l’existence use le poème

     

    ailleurs,

    mêmes les rêves meurent…

     

     

     

     

    un sommeil rouillé

    un mort lave la nuit

     

    les flaques cassantes

    du ciel

    drainent les falaises

     

    au hasard des pierres…

     

     

     

  • Soliflore 68 - Patrick Le Divenah

     

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    illustration de l'auteur

     

     

    café  2

     

    claque aux doigts

    fringué de sa dégaine

     

    coup d'œil qui délimite le territoire

     

    claque la commande

     

    se jette un verre

    rituel

     

    claque la langue

     

    coude affirmé

    billet désinvolte sur le comptoir

     

    claque le fric

     

    main qui s’impose paternaliste

    droit de cuissage

    claque la cuisse

     

    le pas irrémédiable qui doit laisser un vide

     

    claque la porte

     

     

     

    Patrick Le Divenah a illustré le n°56 de la revue

    http://larevuenouveauxdelits.hautetfort.com/archive/2016/12/27/numero-56.html

     

     

     

  • Soliflore 67 - Laurence Skivée

     

     

     

    La Roche-en-Ardenne, LS août 2018.jpeg

    (c)photo de l'auteur - La Roche-en-Ardenne, août 2018

     

     

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        Lumière pure             entre les plus hautes déchirures

     le vent      la pluie         la liberté

            le chant         et le silence

              mon beau pays

             de joie

     

     

     

             www.laurenceskivee.be

     

     

     

     

  • Soliflore 65 - Pierre J. Niedergang

     

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    (c)Lucile Lert

     

     

    Attaqué de tous les côtés, 

    Je suis une pile

    d’accablement 

    étoile d’un filant

    manque d’espoir

    un dévorant

    dévoré.

    Mais je l’ai dit à votre juge, 

    amoureux.

    J’ai répété, j’ai crié 

    la secousse

    l’ouverture

    qui m’habitait.

    J’ai tenté la suturation,

    J’ai même voulu écrire,

    mais je ne suis pas un graveur de roche 

    Je suis une fumée habile

    qui vibre

    de toutes parts.

    Je ne suis pas un fluide, un flux,

    je ne coule pas.

    Je suis une fumée en vibration 

    en expansion.

    Mais tu m’assièges, 

    tu m’assènes

    que la porte est fermée 

    et les clés, perdues

    dans un lointain futur; 

    que nous sommes

    une prison en démolition

     

    pniedergang@gmail.com

     

     

  • Soliflore 64 - Anne B.

     

     

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     (c)Raphaël Fournier

     

     

    L’ABSENCE

     

    L’absence,

    C’est une part de nous

    Qu'on a éprouvé dans l’autre

    Et qui se respire sans visage

    L’absence,

    C’est une veine

    Qui se frotte à notre démouillée

    C’est cet absurde grillé par l'absolu

    De vouloir tout garder et grandir

    Dans notre fragilité

    L’absence,

    C’est le satin de la branche

    De nos racines

    Où l’on ne voudrait que la cambrure

    Sans la surface dessoudée

    L’absence,

    C’est ce voile

    Qui trempe notre encre dans sa chair

    L’absence,

    C’est la terre brouillée

    A l’indélébile de notre présent

    L’absence,

    C’est cette bulle couchée

    Aux larmes épuisées de la nuit

    L’absence,

    C’est cette promesse que le buvard

    Se remplira à nouveau

    Dès l’aube de sa rosée

    L’absence,

    C’est ce miroir

    Où le cœur se fond dans ses graines

    De toiles de silence.

     

     

    https://www.facebook.com/Anne.B.SOLEIL/

     

  • Soliflore 63 - Jean Piet

     

     

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    (c) Séverine Portejoie

     

     

    Sagesse

     

     Elle s'assied au pied d'un chêne centenaire,

    Hume l'odeur du temps, fumant sa pipe en bois,

    Fait bruisser  les feuilles rouges entre ses doigts

    Lève les bras, enlace le ciel salutaire.

     

    Elle est le loup solitaire sur son rocher,

    Celui veillant sur la meute juste en dessous.

    La sagesse est le fil du temps, l'eau, ses remous,

    Le ruisseau qui connait la mer et ses dangers.

     

    Elle est dans le souffle du vent, dans les embruns,

    Parfume les soupes, le pain des pauvres gens,

    Dîne à la table sans nappe des indigents,

    Puis, calme les colères de ceux qui ont faim.

     

    Vous la trouverez au creux d'un arbre pourri,

    Dans les pommes vertes, dans votre potager,

    Dans les  cimetières, au détour d'une allée,

    Vous parlant de la mort, mais surtout de la vie.

     

    https://www.facebook.com/jean.piet1967/

     

     

     

  • Soliflore 61 - Charles Orlac

     

     

     

    Cézanne.jpg

    Cézanne - La montagne Sainte-Victoire

     

     

     À celle qui

     Verse l’eau fertile sur les sables de la nuit

    Qui barre la route aux vaines encyclopédies

     

     À celle des

     Restanques lézardées sous l’effort de mémoire

    Celles des

     Villages perchés jeunes filles ou grand-mères loquaces

    Leurs collines en marche vers des golfes rutilants

     

     À celle des

     Oiseaux prénommés de couleurs

    Des ravines calcinées et leur bouche plus grave

    Celle des

    Portraits d’anonymes sous la plume désennuyée

    Quand la pensée en panne se cherche un vocabulaire

    Celle qui

    Souligne les crêtes arpégées d’une glorieuse brume

     

     À celle des

    Parapluies emmurés qui désamorce les malheurs

    Qui rapatrie dans leur brousse

    Les taxis aux cœurs embouteillés

    Celle qui

    Rive les ciels nocturnes de réverbères-pleines lunes

    Pour tous les mécréants qui craignent

    Un jour de les voir s’écraser

     

     À celle des

    Abris-bus aux sans-abris parasités de matins clairs

    Parasités du luxe de l’espoir

     À celle qui

    Revêt le vent de pardons jaunissants

    Quand sous la porte il glisse paupières mi-closes

    Celle qui

    Garde-barrière se soulève

    Quand passent les soleils couchants

     

      À celle des

     Volontés puissantes, des barrages défiant les montagnes

    Celle des

    Garrigues hiérarchisant les parfums les heures

    Celle des

    Après-midi incendiés de crépitements d’insectes

     

     À celle qui

    Écosse les jours et les délie de leur fil spatiotemporel

    Celle des

    Balustrades-belvédères où s’arrête la parole

    Où le regard vient à nouveau tout unifier tout simplifier

    Pour mieux partager l’éternité ainsi retrouvée

     

     À celle qui

     Coule l’horloge de cire dans nos cerveaux flottants

     

    extrait de Vie d'origami et autres pliages (Édilivre)

     

    https://www.facebook.com/CharlesOrlac/

     

     

     

     

     

  • Soliflore 60 - Anne Perrin

     

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    (photo de l'auteur)

     

     

    Chaleur suave et étrangeté de ce soir en pointillé
    où rôdent les épaves. Que les yeux se plissent
    aux immondices, que l'écarlate jaillisse
    à l'horizon-délice.

    Fais-moi silence pour ne plus voir l'orage et sa robe de plage,
    fais-moi absence.

    Retenons merveilles aux creux de l'océan,
    sablons les courants des étoiles-vermeil

    Et d'un ciel de feu, nous peindrons
    les oraisons des nouveaux dieux.

     

     

     

  • Soliflore 59 - Sébastien Cochinard

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    Toulouse-Lautrec - La blanchisseuse, Rosa

     

     

    je ne t’idéalise pas
    d’une glaise de mots je sculpte ton retard
    je vais t’inverser de couleurs
    peau rousse et cheveux lactés d’alpaline
    ta langue de feldspath marouflant l’espace de nos bouches
    d’un millefeuilles la mienne ruant aux flux de tes secousses
    à l’oraison de tes jambes
    le rougeoiement des estrans
    l’incendie joint à ses couleurs
    ta langue de victoire des rapides du monde
    ton sexe mont-cratère gorgé de cerises racines
    beau de son ignorance pour l’ardeur du jour
    pour la cannelle de tes yeux
    pour le pluriel ovni de ton regard
    belle d’inassouvance
    pour ton gypse gitan dont je ne sais la saveur

     

    https://www.facebook.com/scochinard

     

     

     

     

  • Petite histoire essentielle de la futilité de Bruno Toméra - Lu par Patrice Maltaverne

     


    Publié par Cathy Garcia, en tant que supplément de la revue Nouveaux Délits (même si ce texte s'achète indépendamment de la revue), "Petite histoire essentielle de la futilité", de Bruno Toméra est son troisième supplément (collection des délits buissonniers).
     
    Cela fait plusieurs années que j'espérais relire des poèmes de Bruno Toméra, que j'ai publié à plusieurs reprises dans les premiers numéros de "Traction-brabant".
     
    Heureux, donc, de retrouver cette poésie inchangée., qui suit, au plus près, des vies d'infortunes, faites de petits boulots mal payés, de misères de la rue, de ces réalités impossibles à cacher, à moins d'être de mauvaise foi.
     
    Si la poésie de l'auteur sort souvent cabossée de ces malheurs ordinaires, ne croyez pas pour autant qu'elle s'y enfonce. Une lueur d'espoir traverse tous ces poèmes, qui est celle d'une fraternité humaine non feinte, et non basée sur l'intérêt. Quelque chose de franc, de direct, de solide, qui s'affirme contre vents et marées. 
     
    Rien de malsain dans ces textes, juste une soif de révolte renouvelée, qui s'exprime avec le sourire, qualité rare qui fait que le style des poèmes, chaleureux dans ses images comme dans ses mains tendues, est reconnaissable et rare entre tous.
     
    Extrait de "Petite histoire essentielle de la futilité", de Bruno Toméra :

    "Le nouveau testament personnel et subjectif"

    En m'invitant dans la fiesta de la vie,

    l'univers a égaré le carton d'invitation
    et me voilà loufiat (comme des milliards d'autres)
    à chercher une planque pas trop inconfortable,
    un peu d'amour et de calme
    mais c'est sans compter
    sur la panne d'électricité au seuil du Grand Soir
    sur la dernière chanson déprimée du rebelle Renaud
    sur dieu et sa bande d'abrutis sanguinaires
    sur les grossistes des boutiques multinationales
    sur le salon de la motoculture et du tripatouillage animal
    sur la délocalisation des entreprises de confettis
    sur la peine-à-jouir de l'égocentrique poésie
    sur le one man show de la spectaculaire connerie
    et son public connaisseur et ravi.
    Sur un tas de fatras que nous enjambons chaque jour,
    pauvres cloches.
    Quand la mort m’enlacera sur un slow éculé
    avec ses clins d’œil d'allumeuse pubère
    ou sur un dico débridé avec des petits cris jouissifs de travelo
    sortir de la fête à son bras sera le point final
    de foutus SOS éparpillés en pointillés
    avec la satisfaction de celui qui s'est exténué
    à rafistoler la ligne de flottaison du radeau jusqu'au bout
    et hypocrite jure que c'était bien mais que toute
    bonne a une fin... Enfin."

    Les illustrations de la couverture et des pages intérieures sont de Jean-Louis Millet.

    http://poesiechroniquetamalle.blogspot.com/2018/07/petite-histoire-essentielle-de-la.html

     

     

     

     

     

  • 1er juillet 2018 – Cabrerets : Chemin poétique du Célé à Pech Merle

    Dans le cadre de la 1ère édition du Printemps des paysages, le Printemps des Poètes joue du Hors Saison, en programmant sa première salve aux premiers jours de l'été 2018, les 29, 30 juin et 1er juillet. Le choix a été fait de retenir trois lieux réunis par un fil conducteur fort (la vallée du Lot) et révélateurs par ailleurs d’une pluralité de situations et de paysages (de confluence, industriels, préhistoriques…) : Aiguillon, Fumel et Cabrerets.

     

    Et donc, voici le programme pour le 1er juillet, à Cabrerets, village pittoresque entre falaise et ruisseau :


    14h Point de rendez-vous : Place de la mairie, où Cathy Garcia Canalès, poète, créatrice et responsable de la revue Nouveaux délits, tiendra un stand.


    Cœur de Village, déambulation de la place du foirail au fil de La Sagne jusqu’au Célé ; présentation de Dominique Segond, maire de Cabrerets, et Emmanuel Prieur, paysagiste concepteur.


    14h30 La légende de la chèvre blanche depuis les berges du Célé
    Point de rendez-vous : Pont du Célé
    Transmission audio de la légende de la Chèvre Blanche de l’autre coté du pont face au château du Diable.


    15h La grotte et le sentier de Pech Merle
    Point de rendez-vous : Église de Cabrerets


    Initiez-vous à la lecture de paysage des Causes du Quercy, avec le PNR des
    Causses du Quercy et le CAUE du Lot :
    - le village de Cabrerets (Belvédère de l’église)
    - le paysage du Causse depuis le sentier de la Grotte, avec halte à mi chemin
    pour découvrir la vue plongeante sur le coeur de village niché au pied de la
    falaise


    Descente par groupe (sur inscription préalable auprès de la mairie) au sein de la grotte et lecture de Dominique Sampiero. Possibilité de retrouver le groupe sur l’esplanade en contrebas du grand escalier sur un espace plat herbé.

     

     

    Le Printemps des Paysages est né de la rencontre du Printemps des Poètes et du Bureau des Paysages du Ministère de la Transition Écologique et Solidaire. Cette initiative en partage entend donner à voir de façon originale la dimension sensible et poétique du paysage (qui en fait sa totale singularité par rapport à d’autres formes d’analyse ou d’aménagement de l’espace).

     

    La brochure pour en savoir plus sur ces évènements : Brochure paysage - poésie A5 V4.doc

     

     

     

     

     

  • Avis de parution : Petite histoire essentielle de la futilité de Bruno Toméra - Délit buissonnier n°3, juillet 2018

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    40 pages agrafées

     

    tirage limité et numéroté

    sur papier recyclé  

    offset 90 gr

    couverture calcaire 250 gr

     

    textes de Bruno Toméra

     

     

     

    l’auteur  présenté par Jean-Louis Millet :

     

    Tom   le malgré tout poète

    Quelle est cette manie de vouloir coller une bio ?  les poèmes se

    suffisent, non ? Pour les bios je préfère l'intime à deux, dans un canapé

    moelleux, prêts à se défenestrer l'ego et le corps, dans le duel de la

    parade séductrice.... (non je rigole)

     

    Mais, faut se méfier des chats acculés dans les coins de murs, balancent

    toujours de foutus coups de pattes, enfin...  je suis aux aguets des

    pulsions de révoltes comme autant de petits espoirs de cette humanité

    déchue.

     

    Ce regard entrouvre la porte d'un désir

    que nous n'aurons pas le temps de franchir

    c'est le cambriolage d'une caresse

    qui restera là, dérobée, sans adresse.

     

    … mais, avec le recul, y a de quoi pondre quelques belles foutues

    phrases  sur le tapis savonneux de l'existence.

    Mon rire délivre insolent et joyeux l'impertinence de vivre.

     

     

    Tom

    Ouvrier mécanicien pour la raison sociale, poète essentiellement

    chercheur de vie et d’étonnement, chercheur de musicos chanteurs & enchanteurs aussi pour que les mots puissent vaincre les lois de la

    gravité.

     

     

    Bio recomposée par petits prélèvements dans l’œuvre et les échanges épistolaires avec « le malgré tout poète ».

     

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    illustrations originales de Jean-Louis Millet

     

     

    Grand spécialiste en rien mais curieux de tout : dessin, peinture, sculpture, photo, écriture, vidéos, édition virtuelle, chasse aux connivences & alternatives… Ensemble de ‘’propos’’ mis en actes dans l'animation de blogs et de sites dont "Zen-évasion", site cave-grenier aux malles ego-mystérieuses : http://www.zen-evasion.com/. Il a déjà maintes fois illustré la revue ainsi que d’autres publications Nouveaux Délits comme Ailleurs simple ; Claques & boxons ; Guerres et autres gâchis  (textes de Cathy Garcia) et ses encres sont à l’origine du livr’art : États du Big Bang. Il a illustré Le poulpe et la pulpe de Cathy Garcia également (Cardère éd., 2010) et Des brins et des bribes (éd. Du Cygne, 2011) de Werner Lambersy et Cheval rouge de Fanny Sheper, 2017 (thebookedition.com). Il a exposé ses travaux artistiques, notamment à Perros-Guirec, en Bretagne, sa terre évasion.

     

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    « Au retour dans la bagnole, intercalé dans la file des pressurés

    l'humanité klaxonnait, gueulait, les bras au ciel, pressés

    de se jeter corps et âmes dans d'autres emmerdements.

    Le connard de derrière habillé en voiture dernier cri

    gesticulait dans le rétro, le poing brandi.

     

    Garde toujours le piaf des urgences dans ton cœur

    Garde toujours le piaf des urgences dans ton cœur.

    Que je me suis dit. »

     

     

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    Serrant mes mains dans ses mains

    elle me dit :

    “Gamin, c'est une bulle de savon, la vie,

    ça pique les yeux et c'est fini.”

     

     

     

     

     

    10 €

     

     à commander à

    Association Nouveaux délits

    Letou

    46330 St Cirq-Lapopie

     

     

     

     

  • Double fond d’Elsa Osorio

     

    traduit de l’espagnol (Argentine) par François Gaudry

    Métailié, 18 janvier 2018

     

    editions-metailie.com-double-fond-hd-300x460.jpg

    400 pages, 21 €

     

     

    « L’ananké. L’impossibilité d’échapper au destin. »

    Sur la côte bretonne à La Turballe, proche de Saint-Nazaire, un pêcheur a retrouvé le corps d’une femme noyée. On découvre qu’il s’agit de Marie Le Boullec, un médecin apprécié, épouse d’Yves le Boullec, un photographe décédé quelque temps auparavant et issu d’une famille de notables locaux connue et respectée. La thèse du suicide semble la plus évidente et sans doute la plus arrangeante aussi pour cette famille sans histoire qui n’apprécie pas qu’on parle d’elle, si ce n’est pour en faire l’éloge, mais cette thèse ne satisfait pas Muriel, la jeune journaliste chargée d’écrire des articles sur la « femme de La Turballe » dans le journal local, depuis qu’elle a eu une conversation avec le commissaire Fouquet. Outre que le but d’un journal est forcément de capter et conserver l’attention des lecteurs, Muriel a un goût pour l’investigation et la vérité et Fouquet en lui révélant les origines argentines de la noyée, a aussi évoqué des assassinats jamais élucidés pendant la dictature, il la met sur une piste que lui-même, proche de la retraite, ne va pourtant pas creuser. Elle va donc mener sa propre enquête, même si elle ne pourra révéler publiquement toutes ses découvertes et encore moins quand l’affaire sera déclarée classée.

    Ce qui a éveillé les soupçons du commissaire dans cette histoire de suicide par noyade, ce sont les fractures du corps de la noyée qui indiqueraient qu’elle soit tombée d’une certaine hauteur et les traces d’un anesthésique retrouvées elles aussi à l’autopsie. Marie Le Boullec étant médecin, cela pourrait confirmer la thèse du suicide, mais il se trouve que c’est du penthotal, exactement le même anesthésique utilisé par les officiers de la junte pendant la dictature argentine, lors de ce qu’ils appelaient des « transferts », ces vols de la mort qui consistaient à balancer des prisonniers vivants, conscients mais anesthésiés, du haut d’avions pendant des vols de nuit tous feux éteints au-dessus de la mer. Membres des FAR, des Monteneros, simples militants politiques, syndicalistes, artistes, étudiants, parents, religieuses ou autres soi-disant subversifs qui comptent au nombre des milliers de « disparus » de la dictature.

    Mais quel rapport avec Marie Le Boullec, même si celle-ci à des origines argentines ? En menant son enquête, Muriel est aidée par Marcel, un ami très ou trop attaché à elle mais calé en Espagnol et Melle Geneviève Leroux, une voisine âgée de Marie de Boullec qui ne croit pas à la thèse du suicide, car cette dernière lui avait téléphoné pour l’appeler à l’aide le soir de sa disparition. Marie était venue parfois chez Geneviève pour consulter ses mails sur l’ordinateur de cette dernière et c’est en réussissant à avoir accès à cette boîte, que le trio tombe sur une correspondance avec un jeune homme dans laquelle il est question de la mère de ce dernier et où elle utilise un autre nom, Soledad Durand.

    Double fond démarre sur un récit, que nous allons suivre simultanément avec l’enquête de Muriel, dans une sorte de patchwork vertigineux, un récit qui nous transporte des années en arrière, à la fin des années 70. Celle qui raconte, c’est une mère et elle raconte à son fils, tous deux sont Argentins et elle raconte pour qu’il sache que, malgré toutes les apparences, elle ne l’a jamais véritablement abandonné. Elle raconte sa participation à la lutte armée contre la dictature, lutte en laquelle elle croyait et comment elle fut contrainte à la clandestinité, elle raconte l’arrestation qui l’a conduite avec son fils alors âgé de 3 ans, au terrible centre secret de rétention, l’ESMA et son « avenida de la Felicidad », un couloir baptisé ainsi par les militaires à cause des hurlements des prisonniers torturés qui y résonnaient en permanence.

    Elle aussi a été torturée sur un grabat de la cellule 13 et son fils à l’écart entendait ses cris, elle criait mais elle n’a jamais parlé. Elle s’appelle Juana, mais aussi Lucia, et elle raconte, elle raconte tout, elle écrit sur du papier.

    « J’aime ce chuchotement de la plume sur le papier. Elle le caresse, l’égratigne, fait surgir des mots cachés, prisonniers. Comme ces noms que je comptais sur les doigts de la main gauche : ceux des nôtres, et sur la main droite ceux de nos ennemis. Des noms que je répétais sans cesse, comme une litanie, une prière païenne. Je m’en souviens encore, il y aura bientôt vingt-sept ans, depuis le 16 septembre 1978 où j’ai commencé à les mémoriser. »

    Du sous-sol de l’ESMA à son antenne à Paris, le Centre de Pilote, où des prisonniers furent envoyés clandestinement pour infiltrer le COBA, les groupes d’exilés sud-américains qui luttaient depuis leur exil et tentaient de dénoncer les crimes de la dictature et puis à l’ESMA de nouveau et de là à un appartement à Buenos Aires, un autre genre de prison, où sa seule liberté fut de pouvoir suivre des études de médecine, elle raconte son destin de femme, de mère, une femme et une mère dont l’intelligence et le courage furent à la fois le salut et l’enfer. Une femme qui n’a jamais parlé mais qui a dû se compromettre au-delà de tout respect d’elle-même et s’arracher le cœur pour sauver des vies. Et si la dictature a eu une fin, son enfer lui n’en a pas. L’injustice et l’impunité continuent de régner 30 ans après et vont la rattraper, même si elle a tenté de sauver ce qu’il restait de sa dignité et ce qui a toujours été le plus cher à son cœur : son fils, dût-il la haïr pour toujours.

    « (…) ce que fuyait la femme de la Turballe, un homme, un régime, une folie, une haine tenace, l’a poursuivie jusqu’ici et la tuée. Noyée. », écrira Muriel dans un de ses articles.

    Il est question dans Double fond de ces circonstances qui permettent à des êtres humains de devenir des monstres sans culpabilité et d’autres qui combattent les monstres, bourreaux et victimes pris dans une même tourmente. Résonne douloureusement cette phrase de Nietzsche : « Quiconque lutte contre des monstres devrait prendre garde, dans le combat, à ne pas devenir monstre lui-même. Et quant à celui qui scrute le fond de l'abysse, l'abysse le scrute à son tour. » Reste qu’il y a tout de même deux côtés de la barrière quand il s’agit de dictature, de torture et d’assassinats. Les faibles, les lâches, les opportunistes qui ont vendu leur âme sont souvent hélas du côté qui semble le plus fort et qui s’auto-justifie sans honte, et même si rien n’est jamais complètement noir ou complètement blanc, apparaît clairement dans ce livre — et dans toute sa pathétique et terrible indigence morale —, la folie humaine.

    C’est tout un pan de l’histoire argentine qui est contenu dans ce livre, avec ses dessous les plus sales, les liens avec la France et les connivences entre militaires argentins et membres du gouvernement français, l’Ambassade argentine en France — comme dans d’autres pays — servant de centre de propagande et le Mondial de Foot en 1978 qui s’est déroulé en Argentine à la face du monde entier. Les hurlements des supporters couvraient ceux des torturés. Et n’oublions jamais qui a enseigné aussi aux militaires sud-américains leurs techniques de torture, à l’École des Amériques…

    L’auteur nous livre une enquête romanesque mais fouillée dont les éléments n’ont rien de fictionnel, il s’agit de toute évidence pour Elsa Osorio, argentine elle-même, d’un devoir de mémoire dont on ressent pleinement la tension et la force émotionnelle et c’est en ce sens que ce livre, écrit lors d’une résidence à la Maison des écrivains et des traducteurs en France, en plus d’être réellement passionnant, est absolument indispensable. Il sert de cadre à une vérité qui n’a pas encore été assez dite, la plupart des coupables n’ayant pas été condamnés, les assassins dispersés dans la nature, sont devenus de redoutables hommes d’affaires, des maffieux avec pignon sur rue, enrichis grâce à leurs crimes, quand ils ne sont pas carrément réapparus dans les gouvernements soi-disant démocratiques qui ont succédé à la dictature. La mort de Marie Le Boullec dans le roman, survient un an après que les lois d'amnistie aient enfin été levées en Argentine par le président Nestor Kirchner, ce qui a permis de ré-ouvrir les dossiers judiciaires des militaires assassins et les conduire devant la justice, le procès le plus emblématique étant celui qui a concerné l’ESMA (École de mécanique de la marine) où plus de 5 000 victimes avaient été torturées puis éliminées.

    Captivant, bouleversant, édifiant et incontournable, Double fond nous prend à la gorge et ne nous lâche plus. L’odeur de la mort, l’odeur de la peur.

    « L’odeur de la peur grimpe aux murs, elle raréfie l’air, elle est plus forte que la saleté, que les torchons sales, plus forte que tout. »

     

    Cathy Garcia

     

    editions-metailie.com-elsa-osorio-sophie-bassouls-2-300x460.jpgNée à Buenos Aires en 1952, Elsa Osorio est romancière, biographe, nouvelliste et scénariste pour le cinéma et la télévision. Elle a vécu à Paris et à Madrid, et réside actuellement à Buenos Aires. Elle a publié notamment de nombreuses œuvres en Argentine (Ritos privados, Reina Mugre, Beatriz Guido, Como tenerlo todo, Las malas lenguas). Elle est lauréate de plusieurs prix, dont le Prix National de Littérature pour Ritos Privados, le Prix Amnesty International pour Luz ou le temps sauvage. Ses romans sont largement traduits en Europe et dans le monde. Son œuvre est disponible en français chez Métailié, dont Luz ou le temps sauvage, Tango, Sept nuits d’insomnie, La Capitana (2012).

     

     

     

     

  • Marc Tison - Des abribus pour l’exode

     

     

    images et peintures de Raymond Majchrzak

    éditions Le Citron Gare, novembre 2017

    CouvertureMarcTison.jpg

     

    82 pages, 10 €.

     

    Sensations vivaces qui imprègnent le mental, maintiennent sous tension le réseau de nerfs, scarifications émotionnelles sur le corps de la mémoire qui n’accepte pas la reddition, ni la soumission. Mémoire du corps jamais rassasiée de cette ivresse qui nous propulse dans le corps de l’autre. Sexe, musique, jeunesse, pures sensations qui lancent les rêves à l’assaut des horizons, pied sur l’accélérateur.

     

    On ne va plus dans les étoiles. Les fusées sont dépiécées. La tête en feu de joie c’était pourtant bien là, claquant le réel à l’enchantement du voyage.

     

    Il y a si peu de temps. Il y a si peu de soi.

     

    Mémoire du corps accro à l’intensité, à la sensation de liberté, aussi illusoire soit-elle.

     

    Il y a tant d’espaces délabrés que tu revisites plein d’espoir, incrédule. L’avant ne s’est pas peint d’éternité.

     

    Le passé n’existe plus, mais le monde a-t-il mieux à offrir ? Tel est le questionnement qui sourd de ce recueil de Marc Tison. Abribus pour l’exode, tentations en lignes de fuite.

     

    L’alcool me flambe toujours au crépuscule

    pour saluer les jours brûlés à l’ennui.

    Je ne suis pas si fragile

     

    Un recueil pas tout à fait nostalgique, ou pas seulement, même lors d’un retour dans le Nord, à Denain.

     

    « Je reviens à mon pays, intérieur, affranchi, en orpailleur. (…) Entre les usines désarmées, les terrils décapités, il reste sur les bars de poussière, les traces rondes des bocks de bières. Les jukebox remisés chuchotent mémoriels des Ep gravés pour des bals rock et ouvriers. »

     

    Le poète pratique un art magique. Avec ses mots, il peut souffler sur les braises, réanimer à volonté la flamme. Ce n’est pas sans danger d’user de ce pouvoir et l’hypersensibilité permanente lui interdit de s’abrutir dans un confort étanche. Convocation lucide de sensations dont le corps ne parvient pas à se défaire au point parfois de ne pouvoir dormir. La révolte est intacte, la conscience vive et les injustices demeurent insupportables.

     

    « Au cœur de l’Europe chrétienne on aime son prochain. (…) Ha qu’est ce qu’on l’aime son prochain quand il est courageux et qu’il reste noyé dans la mer. »

     

    Insupportable comme la tiédeur, la médiocrité, l’hypocrisie, le mensonge, le vide de sens contemporain.

     

    « Les animateurs des émissions d’actualité et de divertissement des chaines de télévision ont des trous dans leurs mots. A travers passent d’immenses tristesses de rien. Alors les téléspectateurs tombent dedans.

    Ceux qui n’ont pas de parachute s’écrasent méchamment le dedans de la tête. »

     

    Même la musique est creuse. « Les notes juteuses - qui touchent le corps – se sont tirées des clips maniérés. Parties continuer la fête ailleurs.

     

    (…) Nous appelons alors musiques les dérangements sonores qui habillent les cliquetis des caisses enregistreuses des supermarchés. »

     

    « Au quotidien on se fait à toutes les crapuleries (!?!) » Ce n’est pas un constat résigné, mais un « !?! », car non poète, tant que ton corps est vivant, il vibre ! Il n’est pas dupe mais il sait encore ressentir.

     

    « Prends le matin nu en embrassade. Tu l’effleures et tu lui souffles des siroccos. Ta bouche pleine du sucre des figues fraîches de l’aube.

     

    Fais l’amour, alors fais l’amour comme se maquillent les rêves. Dans tes yeux explosent des couleurs, des rouges mélangées de jaunes et d’ailleurs. »

     

    Mais il faut savoir qu’après chaque shoot de sensations intenses, il y a la redescente. Amertume et dégoût guettent l’insurgé, les focus sur le monde attisent la rage et la nuit, seul espace de rêve, exige l’insomnie.

     

    « Une communication interlope avec les fantômes de tes désirs. (…) Le sommeil t’attend. Tu n’en veux pas. Pourtant les draps frais sentent si près la mélancolie de l’enfant. Cet état qui t’apeure.

    Comme un licol sur l’encolure d’un mustang. »

     

    Le poète est en cavale, ce n’est pas la mort qu’il fuit, ni même la vieillesse, mais bien ce licol à l’encolure. Semant au vent ses brassées de mots indomptables, cet « autochtone des plaines d’exodes » ne se rendra jamais, parce qu’ayant su saisir l’essentiel de sa vie et de ses folies, il le convoque autant qu’il lui plait pour des fêtes intimes subtiles qui passent au travers des mailles de n’importe quel filet.  De toutes les pertes, il sort vainqueur. Il a gagné la plus belle des libertés, sa liberté intérieure.

     

    « J’abandonne le champ des batailles en friches. J’abandonne la routine des ultimes charges.

     

    J’en reviens à l’absolu.

     

    L’absolu silence. D’où se recompose le mystère. La parole et le chant.

     

    L’absolue virginité. D’où nait l’amour. La complexité absolue du vivant.

     

    L’absolu lointain. D’où se mesure l’avenir. Son effacement conjuré de promesses.

     

    (…) Toute disparition fera un renouvellement.

     

     

    Pas de nostalgie donc, ou pas seulement. Trop de saveur encore dans la bouche, pour cultiver les regrets.

     

    (…) Dans l’espace existentiel de millions d’années lumières, je ne saurais pas l’omniscience. Ça n’a pas d’importance.

     

    Ma vie idiote est une merveille. »

     

     

    Et quand c’est l’âme qui jouit, il n’y a plus aucune limite.

     

     

    Cathy Garcia

     

     

     

    tison nb_031433651bfd190a9d553ddfeb391298.jpgMarc Tison est né en 1956 entre les usines et les terrils, dans le nord de la France. Fondamental. A la lisière poreuse de la Belgique. Conscience politique et d’effacement des frontières. Engagé tôt dans le monde du travail. Il a pratiqué dans un premier temps de multiples jobs : de chauffeur poids-lourd à rédacteur de pages culturelles, en passant par la régie d’exposition (notamment H. Cartier Bresson) et la position du chanteur de rock. Puis il s’est spécialisé dans la gestion et l’accompagnement de projets culturels et d’artistes. S’est mis à l’écriture de poésie très tôt comme la juste expression des sensations vivaces. Habite maintenant dans le Tarn où il continue, heureusement troublé, l’exploration des univers à réinventer.

      

    Raymond Majchrzak est né en 1955 à Escaudain (59), pays minier et industriel, à quelques kilomètres de Denain. Il a fait les beaux arts à Valenciennes. Il peint et travaille des images numériques. Il déroule aussi de longues improvisations musicales plus ou moins électroniques pour lui même à longueur de temps. 

     

    Pour commander le recueil auprès de l'association le Citron Gare, p.maltaverne@orange.fr

     

     

  • Soliflore 58 - Pierre Aurélien Delabre

     

    Ernest Pignon-Ernest  Pasolini portant sa propre dépouille  prise à quelques pas de Campo dei Fiori, Roma par Pierre Aurélien delabre..jpg

     

    catania

     

    j’arrive à catania

    mais mon cœur est souillé

    hésitant

    à l’heure de vivre simplement

     

    et tout dans ma vie

    à ce goût de l’indifférence sordide

     

    mais j’arrive a catania

    qui m’invite à jeter

    un verre d’eau fraiche sur mes regrets

     

    pas envie de rire

    pas envie de jouir

    je tiens trop à mes regrets

     

    et je tisse un monde

    où même les ombres doutent de leurs effets

     

     

    photo prise par l'auteur :

    Ernest Pignon-Ernest Pasolini portant sa propre dépouille prise à quelques pas de Campo dei Fiori, Roma

     

     

     

     

     

  • Revue Nouveaux délits n°60 lu par Patrice Maltaverne

     
     
     

     

    Le numéro 60 de la revue "Nouveaux délits" (14,7 cms X 20,4 cms), animée par Cathy Garcia (et auteur de l'édito et de la 4e de couverture, une belle réflexion à partir de la macro en photo), comprend des textes poétiques de Valère Kaletka, Pierre Rosin, Daniel Birnbaum, Jospeh Pommier, Florent Chamard, Vincent Duhamel, Antonella Eye Porcelluzzi.
     
    Les livres chroniqués par Cathy Garcia sont "Double fond" d'Elsa Orroyo, et "Des abribus pour l'exode", de Marc Tison (ce dernier recueil de poèmes publié par les éditions du Citron Gare).
     
    Avec également les citations de bas de pages empruntées à d'autres livres, caractéristiques de la revue "Nouveaux délits", comme, par exemple, "La terre seule me rassure, quelle que soit la part de boue qu'elle contient" (de Françoise Sagan).
     
    Les illustrations de ce numéro 60 sont de Jean-Louis Millet.
     
    Extrait de ce numéro 60, "Pluion", de Valère Kaletka :
     
    "Cet homme me parle en langage ourlé
    Génuflexions Rodomontades
    Et - j'en suis sûr
    Violences contenues
    Il parle pour vendre
    J'écoute pour acheter
    Ou est-ce l'inverse
    (tiens, dehors, une averse)
    Je suis un miroir qui ne s'aime pas
    (antithétique ?)
    Qu'est-ce que je fous là ?
    (tiens, dedans, une aversion)"
     
     
     
  • Le numéro 60 lu par Florent Toniello

     

    Revue de revue : Nouveaux Délits

    Je l’avoue : déjà abonné à pas mal de revues et avec un budget poésie pas illimité — en tout cas pas aussi vaste que mon goût éclectique, parfois trop, je sais, pour le genre —, j’ai tendance à me reposer sur le grand nombre de revues que je reçois, sans trop regarder les autres maintenant. Eh oui, la poésie est aussi la vie, et il y en a une en dehors de la poésie. Je sais, je radote… Mais le sous-titre « revue de poésie vive » et un appel à soutien de Cathy Garcia, la taulière, qui a vu son vieil ordinateur cesser ses services aux vers et aux strophes inopinément, m’ont convaincu de tenter l’aventure. Peut-être aussi le fait qu’un numéro précédent a été consacré à la remuante poésie guatémaltèque traduite par Laurent Bouisset, allez savoir. Enfin bon : grand bien m’en a pris.

    Le numéro 60 de Nouveaux Délits rassemble des textes de sept poètes, agrémentés par Cathy Garcia d’un court édito relatant la genèse (pas simple) de cet opus et d’une quatrième de couverture en forme d’extrait d’un essai sur la simplicité joyeuse et volontaire. Quand le politique s’en mêle, et bien tourné en plus... S’y ajoutent deux « résonances », notes de lecture aussi bien que jeux de miroir à l’écriture ciselée sur deux livres récents, également par la maîtresse des lieux, décidément productive et tellement amoureuse de la poésie que cet enthousiasme est particulièrement contagieux. Ah oui : de petites notes de bas de page, extraits de poèmes ou de romans, font aussi écho, comme des résonances, aux textes originaux publiés ; ces « délits d’(in)citation » confirment, s’il fallait encore la démontrer, la haute connaissance littéraire de Cathy Garcia, qui peaufine une revue franchement réussie tant sur la forme que sur le fond.

    Car sur le fond, la cohérence de l’ensemble des sept poètes choisis est admirable, et l’exigence dans l’écriture est un dénominateur commun. Connu des amateurs de revues, Valère Kaletka ouvre le bal avec des textes à la nostalgie qui tourne à l’étrange et au fantastique parfois, avec des titres énigmatiques et décalés : « Ahan / Fils de Crâo / Sur la route du Run / Poumons-de-feu / Ahan / Guerre au gramme intégral / À l’anévrisme hautain en rupture / De son ban », peut-on lire dans « Ahan », savant détournement d’un personnage bien connu en « poésie de Cro-Magnon » (là, c’est moi qui invente, ce n’est pas une citation), pourrait-on dire. Pierre Rosin, lui, ose la poésie de science-fiction (on en publie trop peu, je trouve), même si ce n’est qu’un poème parmi les autres où peut-être sonne comme dénominateur commun « le malheur d’être un homme et de n’être rien » : « construisons un vaisseau / une flottille / une arche / semons les germes d’une nouvelle espérance ». Espérance que versifie Daniel Birnbaum, dans une série narrative qui décrit un voyage à Madagascar ; Daniel, comme souvent, y montre une empathie (« elle a les pieds infectés / suintants / sanguinolents / il faudrait les mettre à l’abri de la poussière / de la boue des ordures des mouches ») qui rend ses vers simples immédiatement assimilables sans cheminement intellectuel tarabiscoté : une poésie qui va droit au cœur. Joseph Pommier, lui, ne parle pas d’autre chose que d’espérance non plus quand, après avoir décrit en vers plus longs et plus fourmillants de cassures de rythme une vie au travail marquée par la servitude volontaire, il glisse qu’« Au prix d’un sommeil lourd on s’arrache / À ces pensées rageuses qui stationneront dans l’oubli ». Florent Chamard flirte (un peu, par rapport à ses prédécesseurs plus narratifs et moins métaphoriques) avec le surréalisme pour « réapprendre le silence des horizons sans but » et retrouver « la tentation du sel et des vagues » ; dans sa présentation, il avoue qu’il aime haïr… tout un programme ! Poésie rock’n’roll pour Vincent Duhamel, mon chouchou de ce numéro, avec un poème magistral et habité intitulé « La boîte » : « J’aurais voulu mourir à neuf ans lors d’un mercredi pluvieux ennuagé de flocons et de victoires avec sur le bord des lèvres l’amour d’une pêche ensoleillée de la veille et, dans le cœur, un oisillon s’étouffant d’un requiem enchanté. » Puis vient une étrange boîte offerte par la mystérieuse Matriochka, concentré de peurs et de fantasmes ; un texte puissant sur les attirances de l’enfance, qu’elle soit enchantée ou brisée. Enfin, dernière autrice et seule femme, Antonella Eye Porcelluzzi conclut par une poésie plus déstructurée où le langage se fait plutôt phonèmes que longs vers. C’est un de ses poèmes, court alors qu’elle peut aussi nous embarquer dans de longues variations hypnotiques sur un sujet donné, qui sera reproduit complet ci-dessous.

    En un mot comme en cent : Nouveaux Délits, c’est une belle revue, bien conçue, bien réalisée, et ce numéro 60 en est la preuve.

    Pour en savoir plus et surtout ! vous abonner, visitez le site internet de la revue Nouveaux Délits.


    Love deux song n. 25 (Antonella Eye Porcelluzzi)

    Pour ceux qui conduisent deux avions
    qui dirigent deux industries
    qui chevauchent deux chevaux
    et tirent avec deux arcs
    pour ne pas se retrouver avec
    deux anus à soigner
    en cas d’hémorroïdes.
    je suis un monstre qui a tout osé

     

    Source :

    http://accrocstich.es/post/2018/04/10/Revue-de-revue-%3A-Nouveaux-D%C3%A9lits